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Du Hainaut à la Louisiane
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Jean Louis Beaucarnot a consacré quelques pages de son livre Quand nos ancêtres partaient pour l'aventure Lattès 1997 (pp 225 à 227) à cette migration d'une centaine de personnes (138 inscrits, moins quatre qui ne se présentèrent pas) du Hainaut vers la Louisiane, d'après l'étude d'André Haussy Du Hainaut au Mississippi, Imprimerie Y. Robert, 1996. Qu'il ne prenne pas ombrage si je cite un long extrait de son livre que tous ceux qui s'intéressent aux migrants devraient posséder dans leu bibliothèque.

Un généalogiste du Nord, André Haussy, a découvert, au hasard d'une liasse d'archives, un acte de 1720, par lequel cent trente-sept personnes s'engageaient, devant un notaire royal de Maubeuge, à partir pour la Louisiane. Tous sont Hennuyers, autrement dit originaires des régions à cheval sur la frontière séparant le Hainaut français du Hainaut impérial, ce dernier dépendant des Pays-Bas autrefois espagnols et devenus autrichiens. La plupart sont des laboureurs ou des artisans. Généralement célibataires, ils tentent de fuir une vie difficile dans une province éprouvée.
Dans ce but, ils s'engagent à partir pour la Louisiane, plus exactement pour Sainte-Catherine et Sainte-Reyne, se louant carrément à un certain Jean-Baptiste Hubain, natif de Maubeuge, qui fait fonction d'agent de recrutement pour les directeurs de ces deux colonies. Ces volontaires promettent de « s'engager avec leurs hardes incessamment et sur les premiers ordres (...) dans tel navire qui sortira du port Louis ou autres ports de France, armés par la royale compagnie d'occident ». Hubain, de son côté, est « tenu de faire embarquer les vivres nécessaires pour le passage desdits engagés ». Arrivés là-bas, durant six ans, ils devront « défricher, cultiver et améliorer les terres », travaillant « aux semences, plantes, bastimens et ouvrages », en échange de quoi eux-mêmes et leur famille seront « nourris et entretenus de hardes et nippes sur lesdits lieux, tant sains que malades (...) aux frais et dépens de ladite compagnie sans rien diminuer sur les gages et salaires qui leur seront promis ». Au terme de ces six années, la compagnie promet de rapatrier ceux qui le souhaiteraient et de permettre aux autres d'y rester travailler à leur propre compte, moyennant alors des avances de fonds pour faciliter leur établissement.
Pour le travail sur place, durant la durée du contrat, les salaires, augmentés de primes à l'engagement donnés en plus de l'entretien, sont élevés, allant parfois jusqu'à 300 livres. Stimulés par ces perspectives, nos volontaires vont donc s'embarquer à Lorient, sur le bateau La Loire, pour une traversée dans les habituelles et inhumaines conditions d'entassement et d'inconfort. Le voyage dure trois mois, d'août à novembre, avec une escale à Saint- Domingue. Arrivés dans le golfe du Mexique, il leur faut gagner leur destination, en chaloupe et à la rame, puis remonter le cours du Mississipi jusqu'aux fameuses colonies où ils vont arriver harassés, parfois malades, pour tenter d'y amorcer une nouvelle vie.
De rudes épreuves les attendent. Le climat, les inondations, le régime alimentaire, les révoltes des indigènes font rapidement paraître les salaires insuffisants, et certains sont licenciés pour incapacité au travail ou ne sont pas payés suite à des difficultés des employeurs. Ils doivent pourtant s'accrocher, vivant sous la protection des fortins voisins et se serrant les coudes.
André Haussy, qui a étudié les destins de ces hommes loin de leur Hainaut natal, a pourtant relevé quelques belles réussites. Ainsi Pierre Piquery, autrefois boulanger à Taisnières-sur-Hon, parti avec sa femme et deux bébés, obtiendra le titre de « boulanger du roi » et, par là, le monopole du commerce de la farine à La Nouvelle-Orléans. Les descendants de Pierre-Philippe Lambremont, forgeron à Maubeuge, deviendront des fermiers puis des planteurs et des sucriers riches et prospères.
Mais tous ces efforts sont ruinés par la banqueroute de Law, et c'est une colonie peuplée d'à peine cinq mille colons (et trois mille esclaves) que la France cédera à l'Espagne en 1762, un an avant que le traité de Paris, mettant fin à vingt ans de guerre contre les Anglais, ne force Louis XV à abandonner à l'Angleterre toutes les possessions françaises d'Amérique du Nord, pour ne garder que les îles de Saint-Pierre-et-Miquelon.
Nos 231 Acadiens arriveront à La Nouvelle-Orléans deux ans plus tard. Ils y seront rejoints par plus d'un millier d'autres, avec lesquels ils fonderont la Nouvelle Acadie où arriveront plus tard d'autres Français, chassés de Saint- Domingue par le soulèvement de l'esclave noir Toussaint-Louverture rallié aux idées de 1789. A la même époque, en France, la Révolution poussera également quelque deux mille familles à se réfugier aux États-Unis et principalement à Philadelphie.


 

Le texte intégral du contrat d'engagement peut être trouvé en format Pdf sur le site des Racines du Patrimoine Avesnois, complété d'une introduction et de la liste des migrants.

 

Contrat d’engagement pour la Louisiane
AD NORD J942/30/6076
Maître Jacques Brochery en date du 17 janvier 1720 Maubeuge
Le 14 février 1721 M Dargenson en a fait delivrer copie N° 6076

Engagement de 138 hommes en differens tems pour lille de Ste Catherine a la Louisiane appelles communement missisipiens.

Pardevant nous Jacques Brochery notaire Royal et homme de fief assiste de Pierre Bertin et de Jacques Joseph Brochery aussi hommes de fief du hainaut residens en la ville de Maubeuge soussignes, ont comparu en leurs personnes les cy apres nommez maitres laboureurs charpentiers, menuisiers et autres gens de different sexe et de profession demeurans auxdits lieux qui seront cy apres marques en leurs articles, lesquels se sont chacun pour soy volontairement loues et engages audt Jean Baptiste Hubain natif de cette ville de Maubeuge y demeurant faisant pour Messieurs les intéressés et Directeurs de la colonie de Deucher ditte de Sainte Catherine a la Louisiane ; d’ordre des sieurs Deucher et Kolly ledit sieur Hubain. present et acceptant auquel lesdits engages ont promis et se sont chacun pour soy engages de sembarquer avec leurs hardes incessament et sur ses premiers ordres ou de laditte compagniée, dans tel navire qui sortira du port Louis ou autres de France, armés par la Royalle compagniée d’occident qui leur designera parce que toutefois ledit sieur hubain sera tenu de faire embarquer les vivres necessaires pour le passage des dits engages pour du premier tems favorable qu’il plaise a Dieu donner aller et voyager en qualité de passagers sous son commandement ou de tel autre qu’il plaira a la ditte compagniée de Deucher ditte de Sainte Catherine dans le navire qui leur sera indiqué pour se rendre sur le terrain concedé à laditte compagniée de Sainte Catherine a la Louisiane, ou estant heureusement arrives lesdits engages s’obligent de defricher, cultiver et ameliorer les terres qu’on leur donnera, et de la maniere que ledit sieur Hubain ou laditte compagniée le souhaitera. Travailleront pareillement aux semences, plantes, bastimens et ouvrages qu’il souhaitera ainsi que toucher les autres choses licites et honnestes qu’il leur commandera sans pouvoir quitter ou abandonner lesdits travaux en façon quelconques ny sous quelque pretexte que ce soit a peine de perdre leurs gages sallaires et toutes autres pretentions, mesme de repondre des dommages ou interrest et profit cessans de la ditte compagniée. Seront lesdits engages leurs femmes et enfans nouris et entretenus des hardes et nipes sur lesdits lieux tant sains que malades selon leur sexe different aux fraix et depens de laditte compagniée, qui ne poura pour cause de ce en rien diminuer sur les gages et sallaires qui leur seront promis par chacun de leur article, aux quels laditte compagniée fournira les outils et ustensiles necessaires, et donnera aux femmes desdits engages le tiers des gages du mary ou a proportion de leurs capacités. Est convenu que le present engagement sera pour autant de temps quil sera marqué dans leur dit articles qui ne commencera a courir que du jour de leur arivée a la Louisiane passé lequel tems finy les dits engages seront et demeureront libres du present engagement, et ledit sieur Hubain ou laditte compagnie obliges de les faire passer embarquer et faire repasser en France sur les premiers vaisseaux de laditte compagniée qui se trouveront sur les lieux sans pouvoir exiger lesdits engages quils puissent s’embarquer sur autres vaisseaux par condition expresse, si mieux n’ayment lesdits engages rester a laditte colonie pour y travailler pour leur compte particulier comme ils aviseront bon dans un terrain que laditte compagniée leur donnera dans la colonie a perpetuité pour sy establir en leur faisant des avances necessaires pour faciliter leur etablissement soblige ledit sieur hubain tant en son privé nom que faisant pour laditte compagniée de payer les gages et sallaires desdits engages tels quils leur seront promis apres la fin de chaque année, lesqules payement se feront soit en argent ou marchandises des lieux équivalantes et au prix constant, lesquels gages et sallaires commenceront a courir du jour que lesdits engages sortiront des costes de France pour faire route a leur destination et commenceront a estre payes un an apres leur arivéee, et ainsi continueront de lestre d’an en an jusques a la fin de chaque engagement Sur lesquels sallaires ledit sieur leur donnera un tiers de leur engagement quil promet leur payer avant leur sortie de cette ville pour achopter leurs menues necessites, ainsi que de l’argent necessaire pour leur conduite a se rendre au lieu de leur embarquement a raison de la paye dont ils sont convenus pendant ce temps de leur marche jusqu’au dit embarquement. De laquelle gratification il ne sera fait aucune diminution sur leurs gages parce que toutes fois ils pouront les exiger sil arive perte, ou prise dudit navire en allant a laditte colonie. Et si au cours dudit voyage le navire ou ils s’embarqueront se trouvoit indigent et hors d’estat de le continuer par perte ou autrement les dits engages seront tenus de se rembarquer sur tel autre navire de la compagnie qui leur sera indiqué par le dit sieur Hubain a peine dy estre contraints par corps, s’obligent en outre de transitter sur les dits lieux et tout ce qui leur sera commandé et ordonné par ledit sieur Hubain mesme de le servir dans toutes les appartenances et dependances de laditte compagniée a luy personnellement ou a ceux qui pouroient estre mis a sa place, mesme dans toutes les nouvelles decouvertes quil poura faire le tour ainsi et de la maniere quil le souhaite, et au cas que quelqu’un desdits engages negligeat le travail et ne s’acquitat de sa profession et de son devoir, il convient des a present comme alors qu’il soit fait diminution sur ses salaires du domage qu’il aura causé. Et s’il arivoit que quelcun desdits engages quitteroient pendant leur dit engagement soit ledit sieur Hubain ou lesdits travaux il luy sera permis de les arrester ou faire arester et prendre au corps sans ministre ny d’autorité mesme de les obliger a recompenser le temps qu’ils auroient perdu sans aucun espoir de recompences ny sallaires, et a l’instant sont comparut les engages cy après denommes ...

lien vers le fichier PDF sur le site Racines du Patrimoine Avesnois


Un site en anglais est consacré aux descendants des passagers du "Mayflower of Louisiana"; on y trouve listes et liens.

The Mayflower of Louisiana: 1720
In 1720, over 100 colonists, many with their families, left Hainaut and migrated to Louisiana, where they became among the first families of Louisiana. These families have been likened to the Mayflower of Louisiana, according to Lambremont descendant Jack Pastorek, as they were among the very first permanent working families to stay in Louisiana.
These early colonists, who were born mostly in what is today Belgium, signed contracts in Maubeuge, Hainaut (now France) to come to Louisiana and work the land, according to Mr. Andre Haussy, a French Genealogist who rediscovered the original contracts about 1990 in archives in Lille, France and has published a book and several papers about these colonists. Originally at least some of these colonists were destined for St. Catherine Concession at present day Natchez, today only marked by St. Catherine Creek. The name also lives on in a nearby wildlife reguge, St. Catherine Creek National Wildlife Refuge. Sadly, many of the colonists lost thier lives, including the director Mr. Kolly, during the Natchez Massacre.
The first colonists spent their first year at Biloxi, according to George DeCoux, director of Parks at Gulfport, and descendent of two of the colonists, DeCuir and DeCoux.
After the first year, these colonist made their way to at least two farm concessions - one near New Orleans and the other at Pointe Coupee, both along the Mississippi River.
My ancestor, Albert DeCuir (deCuire) was among these colonist who left their European home for a new life in a new world. There were 60 engages (contractees) who signed who were from in what is now France, and 68 engages who were from what is now Belgium, and one each from Italy and Switzerland.

lien vers le site Hainaut Louisiana

 


Sur Wikipédia, on peut trouver des articles sur les villages de colons, les Acadiens et la grande Déportation, sur le financier John Law etc...

lien vers l'article sur John Law de Lauriston


Un groupe de discussion Yahoo en anglais est consacré aux descendants de cette migration:

"A discussion group for descendants and those interested in the Hainaut families which settled in Louisiana since 1720. An English site to help Louisiana and American researchers share ideas on research in Hainaut, Belgium and France."

lien vers le groupe Yahoo Hainaut Lousiana


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