Sentence, qui maintient les Voituriers
dans l'usage du Paccage
Du 23 Août 1753
A tous ceux qui ces présentes Lettres
verront: LOUIS-BAZILE DE BERNAGE, Chevalier, Seigneur de Saint Maurice, Vaux,
Chassy, & autres lieux, Conseiller d'Etat ordinaire, Grand- Croix de l'Ordre
Royal & Militaire de Saint Louis, Prevôt des Marchands, & les
Echevins de la Ville de Paris. SALUT.
Sçavoir, faisons: Que vû au Bureau de la Ville de Paris la Requête
à Nous présentée par Nicolas- Denys Colinet, Marchand
de Bois, pour la provision de Paris, Adjudicataire des Ventes ordinaires &
extraordinaires de la Forêt de Crécy contenant que de tous tems,
pour la vuidange des bois & le transport sur les Ports, les Marchands
Adjudicataires dans les Forêts du Roi & Bois appartenant aux Eccléfiastiques
& Seigneurs, se font servis de Voituriers vulgairement nommés Thierachiens
; sans le secours desquels il seroit impossible de faire parvenir en la Ville
de Paris les Bois qui y font destinés. De tous tems aussi, sans aucune
contradiction, ces Voituriers ont fait paccager leurs Chevaux & Bœufs
dans les Pâtures, Chaumes, Prez fauchés, & Bruyeres, après
la récolte des grains, ce qui, à ce moyen les met à portée
de n'exiger les salaires de leurs Voitures qu'à des Prix qui puissent
cadrer avec la valeur des Marchandises, eu égard à la taxe qui
en est par Nous faite en cette Ville. En l'année dernière, quelques
Particuliers des environs de la Ville de Château-Thierry, ayant voulu
interrompre cet usage, le Bureau, toujours attentif à maintenir ce
qui facilite & procure l'approvisionnement de la Ville de Paris, a rendu,
sur les Conclusions du Procureur du Roy & de la Ville, le vingt deux Juillet
mil sept cent cinquante-deux, Sentence, par laquelle en faisant main- levée
de saisies que quelques Particuliers avoient fait faire des Harnois &
Chevaux appartenant à des Voituriers, a ordonné que lesdits
Voituriers continueroient de voiturer des Ventes au Port les Bois & Charbons
qui y étoient destinés, & pareillement qu'ils continueroient
de faire paccager leurs Chevaux & Bœufs dans les Pâtures, Chaumes,
Prez fauchés & Terres, après la Récolte, conformément
à l'ancien usage ; fait deffenses à tous Particuliers de troubler
les Voituriers dans lesdits Paturages; & ausdits Voituriers de causer
dommage dans les héritages en valeur. Quoique ces Sentences ayant été
rendues publiques par les Affiches qui en ont été faites, le
Suppliant vient de recevoir avis qu'à l'instigation de quelques Particuliers
qui ne se manifestent point, l'on a entrepris d'empêcher les Voituriers
occupés au transport des Bois du Roi, qu'exploite le Suppliant en la
Forêt de Crecy, de manière que ces Voituriers veulent abandonner
l'ouvrage, ce qui serait constamment un tort des plus marqué au Suppliant
, mais de plus priverait la provision de Paris d'une quantité considérable
de Bois & Charbons qui, surtout dans la circonstance de l'extrême
bassesse d'eau en Riviere, fait une ressource pour cette provision, eu égard
à la proximité. Ce procédé est d'autant plus irrégulier,
qu'il paroît que l'on agit par voix d'autorité, voix inconnue
en France, & d'ailleurs contraire aux Jugemens en forme de Règlement
rendus par le Bureau en de pareilles circonstances. Le Suppliant intéressé
à prévenir la désertion de ces Voituriers a recours à
notre autorité pour lui être sur ce pourvu; Pour quoi requeroit
qu'il nous plût ordonner que nos Sentences des vingt-deux Juillet, premier
Août mil sept cent cinquante-deux, & vingt- trois Juillet dernier
seront exécutées selon leur forme & teneur; en conséquence
maintenir provisoirement les Voituriers occupés au transport des Bois
& Charbons pour la provision de Paris, dans l'usage ancien de faire paccager
leurs Chevaux & Bœufs dans les Pâtures, Prez fauchés,
Bruyeres & Chaumieres; faire défenses à toutes personnes
de quelque état & condition qu'elles soient de les troubler dans
ledit Pâturage, sous quelque prétexte & occasion que ce puisse
être; & pareillement défenses ausdits Voituriers de causer
dommage dans les Prez non fauchés & Terres emblavées; &
en cas de contravention à nos Sentences & Ordonnances, & où
il seroit fait arrêt des Chevaux, Bœufs & Harnois appartenans
ausdits Voituriers; ordonner provisoirement & à la première
signification des présentes, que lesdits Chevaux, Bœufs &
Harnois seront rendus ausdits Voituriers, à quoi faire les Saisissans
& tous autres dépositaires contraints par corps; mander aux sieurs
Officiers de Maréchaussées de donner main-forte & tenir
la main à l'exécution de nos Sentences & Ordonnances, &
que ces présentes feront imprimées, lûes, publiées
& affichées partout où besoin sera, & lui permettre
de faire assigner les Contrevenans pardevant Nous en condamnation de dommages
& intérêts, & autres Conclusions qui feront avisées.
Ladite Requête signée, COLINET, & CHARON, Procureur en ce
Bureau … etc.
Code rural, ou Maximes et réglements
concernant les biens de campagne ...
De Antoine Gaspard Boucher d'Argis pp 698 à 701
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