Origines du nom...
Au jeu du téléphone arabe, un premier enfant chuchote une phrase à un second qui transmet ce qu'il a cru comprendre à un troisième et ainsi de suite.
Pour peu que la phrase d'origine soit un peu obscure, il est certain que ce qu'aura compris le dernier n'aura qu'un lointain rapport avec ce qu'avait proposé le premier. Il en est de même pour les noms inconnus; s'ils ne sont transmis qu'oralement, il y a de fortes chances pour qu'ils le soient mal. Alors même qu'ils sont écrits, il arrive d'y faire des fautes. Combien de lettres a-t'on reçues à la Chappelle Rabelais avec un E comme l'auteur de Gargantua et deux P à Chapelle?
Au moment de la création du village,
l'usage de l'écriture était très rare, réservé
aux actes officiels: les Terriers qui recensaient les possessions des seigneurs
et les obligations de leurs vassaux; les minutes de procès, le plus
souvent à cause d'une contestation concernant les limites d'un territoire
ou les droits qui s'y rapportaient.
C'est pourquoi la première mention écrite d'un village ne correspond
pas forcément à la date de sa création, comme le nom
qui est inscrit pour la première fois est peut-être fort éloigné
de celui qui avait été donné à l'origine; d'autant
plus que les habitants du village ne parlaient pas la langue servant aux traces
écrites: le latin. Il fallut attendre l'Edit de Villers Cotterêts,
sous François I° pour que le français d'alors devienne la
langue des actes judiciaires et notariés. Pensez aux traductions de
noms chinois: faut-il transcrire Pékin ou Bei-Jing pour désigner
la capitale? Alors, qu'en était- il au Moyen Age pour les noms de lieux
et de familles?
Le premier texte citant notre commune
date de 1175 et concerne l'abbaye de St Germain des Prés. Déjà,
au siècle de Charlemagne, le polyptique d'Irminon décrit les
possessions de St Germain: Trente à trente cinq
mille hectares sont attribués à cette abbaye en vingt cinq domaines
éparpillés de la Bretagne à la Lorraine, subdivisés
en milliers de petites tenures.
Pierre Gaxotte Histoire des Français
L'abbé Denis, dans ses Lectures sur l'histoire de l'agriculture, décrit les possessions de St Germain dans la Brie, dont des domaines autour d'Esmans. L'abbaye de St Germain possédait des bois sur Echou-Boulains qui en ont gardé le nom; ils forment la limite Sud de la commune.
La première citation de la Chapelle en 1175 est: Foresta de Herablen. Il ne s'agit donc que d'un bois, à la limite de la forêt de St Germain. A noter que le mot Foresta, s'il désigne, évidemment, une forêt a un autre sens: Les rois mérovingiens, grands chasseurs, avaient constitué des réserves non loin de leurs résidences. Il se peut que le mot Foresta qui apparaît au VII° siècle, désigne des districts réservés aux chasses royales. Les princes avaient le privilège d'abattre les bêtes fauves, aurochs, ours, sangliers.. Duby
1175 | Foresta de Herablen |
1275 | Capella de Erableyo |
1296 | la Chapeille d'Aarabloi |
1309 | la Chapelle Darblay |
1373 | la Chapelle de Erabloy |
1385 | la Chappelle de Arobloy |
XIV° s | Prior de Roableyo |
1443 | la Chappelle de Rablay |
1560 | la Chapelle Lablay |
1563 | la Chappelle de Rabellays |
1570 | Capella Erablei |
1574 | la Chappelle d'Errablay |
1673 | la Chapelle de Rablet |
1725 | la Chapelle Rablaye |
1770 | Capellam de Rabelais |
Noms proches... |
Arblay, commune de Cudot, Yonne |
Arblay, commune de Neuilly |
Herblay, Seine et Oise |
Rablay, Maine et Loire |
Arrablay, Loiret |
Autres noms du village au travers des siècles...
La première fois que ce qui deviendra
Rablais est cité, c'est sous la forme Herablen, puis Erableyo, ensuite
Aarabloi, Erableii, Darblay, Roableyo... Laquelle de ces formes correspond
au nom primitif, celui qui a eu un sens?
Il faudrait être capable de remonter à l'envers la chaîne
du téléphone arabe!
Six cents après la première
mention écrite d'un nom du village, le 15 fructidor de l'an X de la
République, le décès de la mère de Denis
Toussaint Félix (dont nous essayons de retrouver les traces
au fil des dossiers) est retranscrit sur le Registre d'Etat Civil.
Le nom que vous lisez est bien la chapelle arablay. Cette
famille vivait depuis plusieurs générations au village, Denis
Toussaint Félix en sera le maire comme l'avait été son
père, Denis Félix, qui signait aussi bien Félix
que Fely.
Dans la recherche de l'origine du nom,
le rapprochement avec les mots arable et érable ont été
proposés, sans qu'une justification en soit donnée:
arable parce que la terre serait fertile, ce qui est la moindre
des choses, étant sur le plateau de Brie, à noter cependant
que, vers l'Est, la forêt a été entièrement défrichée,
preuve d'une terre de meilleure qualité que celle de la Chapelle Rablais.
érable a été proposé: un endroit de la forêt où l'érable pousserait bien. D'après l'ancien responsable ONF de la forêt de Villefermoy, l'érable est une espèce solitaire, dans nos régions, au contraire du Canada, et un bois composé de cette essence n'est pas envisageable. Autre idée: la Chapelle aurait été construite en bois d'érable... Là encore, aucune preuve n'a été fournie.