Les passeports
formalités, suite...
Aux termes de l'article premier du titre III du décret du 10 vendémiaire, an IV, nul ne peut quitter le territoire de son canton, ni voyager, sans être porteur d'un passeport que tout agent de la force publique a le droit de se faire représenter.
Grande Encyclopédie 1893
Denis Toussaint Félix, maire de la Chapelle Rablais en 1828 a longtemps hésité sur la profession de Véronique Cumont.
Le vingt six juillet, Véronique demande un passeport pour se rendre à Mormant avec ses trois enfants. Comme profession, Félix indique "mendiante" qu'il rature et remplace par "indigente" et complète l'état civil de Véronique Cumont, femme de Jacques Denis Soleil, marchand de sangsues, en indiquant qu'elle est "marchande de balais". En 1836, on la retrouve dans une affaire de délit rural avec Nicolas Fourrey avec une amende impayée de 17,90 francs.
Véronique Cumont, pauvre parmi les pauvres a dû demander un passeport pour le bourg de Mormant distant d'une dizaine de kilomètres, car elle quittait le canton de Nangis. La carte d'identité n'existait pas, l'obligation du livret ouvrier viendra plus tard, en 1854; aucun papier n'était nécessaire tant que l'on restait dans le petit monde où l'on était connu. Mais gare aux contrôles dès qu'on le quittait.
“ Mais, Monsieur, qui me répondra
de vous ? Est-ce que personne vous connaît? Connaissez-vous quelqu'un
à Besançon?
- Non, personne; mon dessein était d'aller à Vesoul, d'où
j'aurais eu des lettres ; mais j'ai changé de route à cause
de ces tumultes.
- Monsieur, je ne vous connais pas, et si vous êtes inconnu à
Besançon, vous ne pouvez avoir de passeport.
- Mais voici mes lettres ; j'en ai plusieurs d'autres villes de France ; il
y en a même d'adressées à Vesoul et à Arbois :
ouvrez-les et lisez-les, et vous trouverez que je ne suis pas inconnu ailleurs,
bien que je le sois à Besançon.
- N'importe, je ne vous connais pas ; il n'y a personne ici qui vous connaisse,
ainsi vous n'aurez point de passeport."
Voyages d'Arthur
Young, texte intégral sur Internet chez ABU:
Asociation des Bibliophiles Universels
Arthur Young était à Nangis, chef lieu du canton dont fait partie la commune de la Chapelle Rablais, chez le marquis de Guerchy, en juin 1789. Ce voyageur anglais poursuivit son périple au travers de la France jusqu'à ce que les événements de Paris l'incitent à demander un passeport pour l'intérieur qu'il ne détenait pas encore, étant anglais!
Ses ennuis à Besançon montrent que pour obtenir un passeport, il fallait, soit en déposer un plus ancien et le faire renouveler, soit être bien connu du maire du village ou du préfet de Police à Paris, soit encore présenter deux témoins connus qui répondent du demandeur. Passant de château en belle demeure, Arthur Young comptait sur ses lettres de recommandation pour se voir ouvrir les portes.
Un passeport coûtait deux francs, soit une journée entière du salaire d'un manouvrier.
Peut- être Véronique Cumont, mendiante, indigente, marchande de balais a-t'elle eu droit à un passeport gratuit réservé aux prisonniers libérés et aux personnes véritablement indigentes ? Au bas du passeport de Véronique est indiqué: Prix du Passe- port: Deux Francs, valable un an. Certains arrivaient à circuler avec un passeport périmé et ne le faisaient renouveler que tous les deux ans, comme Anne Sylvie Fourrey en 1830, 1832, 1834 et 1836.
Le lieu de destination était indiqué. Arrivé sur place, le voyageur devait faire viser son papier que le maire paraphait au dos du passeport. Denis Toussaint Félix a signé au verso le passeport d'un maçon de la Creuse qui retournait chez lui.