Saint Hubert

Saint Hubert, patron des Ardennes, qui avez eu l'avantage de voir l'image d'un Dieu crucifié entre les bois d'un cerf et qui avez reçu une sainte étole miraculeuse par le ministère d'un ange, nous vous supplions de nous appliquer charitablement la vertu de ce présent divin et de nous préserver par vos mérites de tout danger,
de rage, du malin esprit, fièvre,
tonnerre et autres malheurs.
Priez pour nous, ô grand saint Hubert ! afin qu'il plaise à Dieu nous octroyer un jour la grâce de nous voir
dans le ciel.
Ainsi soit-il!

extrait de trésors des images d'Epinal ed jean pierre Gyss

Chasseur de fauves, chasseur d'âmes, visage d'apôtre et grand évêque, Hubert est entouré d'un halo de légendes. Né dans une famille noble en Gascogne, à douze ans voyant son père attaqué par un ours, il se serait jeté sur l'animal, sauvant son père. Introduit à la cour deThierry III, il deviendra grand maître de la maison royale.

Il est passionné de chasse, et voici la fameuse légende où, forçant un cerf un Vendredi saint, il voit la bête faire front et, dans sa ramure, briller une croix lumineuse. Une voix lui demande:
"Jusqu'à quand chasseras-tu les bêtes dans les forêts?"
Hubert s'est écrié: "Seigneur, que voulez-vous que je fasse?"

Le lendemain il se met sous la direction de saint Lambert, évêque de Maestricht. Il porte cilice, se nourrit de racines, étudie les Livres sacrés. Saint Lambert l'envoie péleriner à Rome où il apprend que son maître a été assassiné. Sacré évêque à son retour, il va fonder l'évêché de Liège qui n'était alors qu'un village. Il établit des règlements, on lui doit une assemblée communale et un système de poids et mesures, dont l'usage persiste encore. Hubert apporte aux Ardennes, qui pratiquent le culte des divinités païennes, la civilisation chrétienne. Toujours par monts et par vaux, il évangélise la Germanie. Un jour où il aide des ouvriers à planter des pieux, un coup da massue lui écrase une main. Il domine sa souffrance pour trouver la force de faire transférer de Maestricht à Liège la dépouille de saint Lambert et de consacrer l'église Saint-Pierre dédiée à son maître. Il faut le soutenir pour son retour au monastère où il meurt.

Le souvenir de saint Hubert vit toujours dans le cœur des ouvriers, des bûcherons, dont il partagea le labeur. Les chasseurs et les veneurs l'ont élu pour patron.

Article St Hubert dans "Dictionnaire des Saints"   éditions le Livre de Poche Chrétien

Les bagues de Saint Hubert
Un petit résumé

" Parmi les saints venaient en tête sainte Anne, saint Joseph, les évangélistes, les apôtres, puis tous les saints protecteurs : saint Nicolas, patron de la Lorraine, des enfants et des marins ; saint Hubert (...); saint Donat, saint Blaise ou saint Cornely, protecteurs des bestiaux. Également tous les saints patrons des métiers et des corporations : saint Fiacre pour les jardiniers, saint Éloi pour les forgerons, saint Honoré pour les pâtissiers, saints Crépin et Crépinien pour les cordonniers, saints Corne et Damien pour les pharmaciens et médecins, sainte Agathe pour les dentistes, saint Vincent pour les vignerons, saint Yves pour les avocats..."

Dans: "La belle histoire des images d'Epinal"    Cherche Midi ed Henri Georges

Le nombre de versions pour chaque saint est un bon indice de l'importance populaire de tel ou tel d'entre eux: au palmarès des bois gravés figurent Saint Hubert, six versions, Saint Jean Baptiste, 6 versions; Saint Eloi, patron des forgerons, 5 versions, Saint Nicolas, patron des jeunes gens, 5 versions; Saint Honoré, 4 versions etc...

Patron des chasseurs, Saint Hubert protégeait des bêtes fauves qui peuplaient encore les forêts aux siècles passés.
Qui se mettait sous sa protection ne craignait plus les loups, leurs morsures et la rage qu'ils transmettaient.

Une statue de Saint Hubert figure dans l'église de la Chapelle Rablais. Le patron des chasseurs trouve sa place dans un village où les riches châtelains ne résidaient que pour les plaisirs de la chasse.

Mais sa renommée dépasse les limites des contrées giboyeuses. Se placer sous la protection d'un tel saint préservait de bien des dangers.

extrait de Histoire naturelle, générale et particulière
avec la description du cabinet du roi, tome septième, par M. de Buffon, MDCCLVIII: le loup

" Selon la légende, tandis que saint Hubert célébrait la messe à Rome, saint Pierre lui apparut et lui remit une clef d'or "comme signe de sa puissance de lier et de délier, ainsi que de guérir les fous et les furieux".  La clef de St Hubert, petite clef de plomb, guérit de la rage. "

Extrait de "Croyances Populaires"

La clef originale, faisant partie du trésor de la collégiale de la Saint Croix de Liège, aurait été donnée à Saint Hubert par le pape Grégoire II, en 722. Ouvrant la porte du tombeau de St Pierre, la clef contiendrait des fragments de la chaîne du premier pape... Il en fut fait des copies servant à de curieuses cérémonies de "maraboutage":

" Du lointain pèlerinage de Saint Hubert, Ardennes belges, ou de St Hubert des Marêts, Provinois, où l'on guérit la rage par la vertu de l'eau de la fontaine et l'apposition de la clef de la chapelle chauffée au rouge et appuyée sur les morsures, le colporteur apporte au village l'image naïve du saint qui fixe les yeux sur les bois d'un cerf entre lesquels apparaît une croix lumineuse.. "

Pierre Louis Menon et Roger Lecotté: "Au village de France" 
éditions Bourrelier; rééedition Amatteis

Aux Marêts, près de Provins, à une trentaine de kilomètres de notre village, on limitait l'apposition de la clef chauffée au rouge aux animaux et non aux humains:
L'eau puisée à cette source avait, en effet (du moins le croyait-on) la vertu de prévenir et de guérir la rage, tant chez les hommes que chez les animaux. En ce qui concerne ces derniers, l'effet de l'eau était renforcé, pour plus de sûreté, par un traitement quelque peu barbare, consistant à appliquer, sur le museau de la bête, ou, si elle avait été mordue, sur la blessure, un instrument en fer, la "clé de Saint-Hubert" préalablement chauffée au rouge. Pour le cas où le patient n'aurait pas touvé le remède à son goût, on prenait la précaution d'introduire son museau dans une grande pierre plate, posée verticalement, tandis que par deux autres trous, plus petits, on faisait passer des licous qui le maintenaient immobile.

Un village en Brie provinoise: les Marêts par B. Delahaye
dans Monuments et sites de Seine et Marne n°23     1999

Si ces pratiques n'avaient pas suffi, il fallait se rendre dans l'abbaye de St Hubert, Andange, en Belgique, où le prêtre détachait de la précieuse étole du saint un fil introduit dans le front du patient, ce qu'on appelait "la taille".

   http://www.sparealites.com/fo090002.html. Le loup dans les traditions wallonnes

La "taille" remonterait à 950. Elle consistait à faire au front de la personne mordue une incision qu'on mettait ensuite en contact avec un morceau de l'étole de saint Hubert. Cette coutume était appelée à une longue vie et à un certain succès, puisqu'en mai 1811 on enregistra le record de trois cent trente tailles. Il est à espérer que certaines n'étaient que préventives, car on s'effraie de penser que trois cent trente personnes pourraient avoir été mordues en un mois! Précisons que la taille devait être suivie d'une neuvaine.

   http://juillot.home.cern.ch/juillot/hubert.html

" On entendit parler de chiens enragés qui parcouraient le pays, et on s'aperçut que le chien de chasse, détaché depuis quelques jours, avait des allures étranges. Je conseillais à Félix de le renfermer dans son chenil et nous allâmes ensemble pour éviter tout accident. Mais l'animal déjà atteint de la maladie, ne reconnaissant plus son maître et se jetant sur lui, le mordit fortement au bras; Félix eut pourtant l'énergie de le renfermer, puis il courut à la cuisine et là, à notre grand effroi, se cautérisa si profondément avec le tison rougi au feu que l'on sentait la chair roussie. Quelques jours après, le chien qui l'avait mordu mourait avec des symptômes alarmants. M. le Curé conseilla à Félix de faire le pèlerinage à St Hubert dans les Ardennes, jamais aucun malheur n'est arrivé à ceux qui ont fait ce pèlerinage avec confiance, et quand bien même ce ne serait pas nécessaire puisque la cautérisation avait été immédiate, cet acte de foi calmerait sa surexcitation et son inquiétude bien fondées. Il partit donc, commença une neuvaine à St Hubert et revint la terminer ici, portant au front un bandeau noir qui cachait l'incision faite pour insérer une parcelle de la sainte étole de St Hubert sous la peau. "

http://perso.wanadoo.fr/paroisse.emmanuel/
Archives_hist/Bulletin/ChapellesBouvines.htm

Ce n'est qu'à la fin du XIX° siècle que la rage fut guérie pour la première fois.
" Pasteur administre son vaccin pour la première fois le 6 juillet 1885 au jeune Joseph Meister, mordu 14 fois par un chien 60 heures auparavant. Le vaccin administré par voie sous-cutanée consiste en des extraits de moelle épinière de lapin conservé dans un bocal d'air sec pendant 15 jours. Douze autres inoculations sont pratiquées au cours des 10 jours suivants avec des extraits de virulence accrue. Au total, 2.500 personnes mordues reçoivent ce vaccin dans les 15 mois qui suivent."

Si le pélerinage à Saint Hubert confine à la barbarie, le colportage des objets de piété consacrés au Saint relève d'un marketing où rien n'était laissé au hasard pour attirer le gogo superstitieux, comme nous l'allons voir à la page suivante...

La curiosité
dessin de Chardin