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Etienne Fare Charles
Huvier/23 |
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Etienne Fare Charles Huvier ne laissa pas de commentaires à propos de Charles Bureau, son prédécesseur, du moins, pas dans le registre paroissial qu'il émailla de ses nombreuses "nottes", mais susceptible d'être lu par un autre curé, son possible successeur (et par nul autre). Certains indices laissent à penser que les relations entre les deux prêtres ne furent pas très cordiales... Que s'était-il passé, pendant les premiers
mois de cohabitation, entre la prise de fonction d'Etienne Huvier, fin mai
1752 et l'achat du presbytère, en octobre? |
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"a esté observé par
les distes partyes qu'outre les meubles meublans que ledit sieur Bureau a
rétiré de laditte maison, il y avoit laissé ceux cy après,
sçavoir, dans la cuisine, touttes les planches qui servent de dressoir,
le tournebroche et ce qui le concerne, dans la salle, le buffet, l'armoire,
le miroir entre deux croisées qui tient dans la menuiserie avec des
visses, la porte verte, dans le fourny, les planches qui sont soutenuées
par des bois et lesdits bois, les portes manteaux, dans un petit endroit joignant
le fourny touttes les planches et les suppports, dans la fruiterie touttes
les planches, dans la cave, les fruitiers touttes les tringles de fer qui
se trouvent tant aux croisées qu'aux portes et alcoves dans les caves
touttes du parterre, touttes les planches et les chevrons qui les portent,
ensemble, les tuilles briques bois de charpente, chaux et autres matériaux
non employés et qui ne font point partyes des biens cy dessus vendus
lesquels cependant resteront et appartiendront audit sieur Huvier comme en
ayant payé le prix audit sieur Bureau ainsy qu'il le reconnoît."
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Tout ceci fut proprement raturé. Charles Bureau ne laissait absolument rien à son successeur; plus de buffet, d'armoire, de tournebroche, plus la moindre petite planche... a-t'il seulement laissé la porte verte? Est-ce ainsi que l'on traite quelqu'un qu'on apprécie, ou cette mesquinerie serait-elle révélatrice des tensions entre les deux prêtres? Notons qu'Etienne Huvier prit sa revanche,
quelques années plus tard, en 1755, quand, au sujet du presbytère,
il se fit écho d'une rumeur concernant son prédécesseur,
ce qui l'obligea à verser 72 livres: "...
Le sieur Bureau ancien curé dudit lieu présent à laditte
assemblée comme propriétaire de biens dans laditte parroisse
a observé qu'il a appris que plusieurs desdits habitans prétendant
qu'il s'estoit autrefois servy des pierres et de vieux bois conssumés
provenans de laditte mazure... cependant ledit sieur Bureau a offert de donner
à laditte église une somme de soixante douze livres pour engager
lesdits sieurs propriétaires et habitans à se désister
de laditte prétention quoiqu'elle ne soit aucunement fondée..."
Charles Bureau, quittant la Chapelle Rablais, s'installa à Nangis, la petite ville proche, mais continua à fréquenter son ancienne paroisse: le 16 novembre 1752, il était procureur général & spécial du propriétaire, bourgeois de Paris, pour le bail de la ferme des Montils; le 9 mai 1753, il fut parrain du fils du châtelain des Moyeux, baptisé par le curé Huvier; en 1753, 1754 et 1755, il loua à bail des terres sur la Chapelle Rablais; en 1754, il était présent lors de l'assemblée des habitants "tant pour luy que pour le sieur Le Semetier" etc... L'ancien curé était encore fort présent dans son ancienne paroisse et peut-être encore influent. Charles Bureau fut témoin des premières
actions du curé Huvier dans sa paroisse, qui ne tardèrent pas.
Le jeune curé donna quelques coups de pied dans la fourmilière.
Quelques semaines après son arrivée, il fit rappeler à
l'ordre un manouvrier, locataire de "deux arpens
de bled froment et trois arpens d'avoine" auprès de la
Fabrique de l'église ayant omis depuis deux ans d'en régler
les "loÿers échus" "il promet
et s'oblige et même par corps de mener conduite et charrier tous les
grains de bled et d'avoine ... dans la grange apartenante au sieur Huvier
prestre curé audit lieu de la Chapelle fidellement et sans en obmettre
aucune chose, pour y être battus et ensuite conduits au marché
d'icelle ville de Nangis..."
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Dès le mois de juillet 1752, puis
en septembre et octobre, il convoqua des assemblées d'habitants en
vue d'installer un maître d'école. Ce qui était tout à
fait louable. Ce qui l'était un peu moins fut de déclarer qu'avant
son arrivée, il n'y en avait point: "Les
habitans de cette paroisse qui depuis un temps très considérable
étoient privés d'education faute d'avoir maître d'ecolles..."
Ce qui n'est pas vrai : en janvier 1752, quelques mois avant l'arrivée
d'Etienne Huvier, figure la mention "Nicolas Legé, maître
des petites" que l'on complète facilement grâce à
un acte du 13 avril 1752 "Nicolas Légé, maître des
petites écoles" et probablement clerc paroissial. Etienne Huvier
mit en doute les capacités dudit Nicolas Légé, ce qui
provoqua quelques heurts avec Jean Sonnette, candidat au poste d'instituteur:
"ayant eté insulté avec brutalité par un nommé
Nicolas Légé chartier de profession qui aspiroit à remplir
la place et qui pour une infinité de causes n'en étoit pas capable"
Notes du curé Huvier
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"Ce jourd'hui quatorzieme jour de janvier mil sept cent cinquante
trois, Margueritte Bectard femme d'antoine Rondinet manouvrier demeurant
en cette paroisse ayant obtenu de Mr Le lieutenant des chirurgiens de Melun
des p(rov)isions en bonne forme à l'effet de pouvoir exerçer
dans l'étendue de notre paroisse les fonctions de sage-femme après
luy avoir fait subir un examen suffisant sur la matiere et (la) forme du
Sacrement de baptême, et luy avoir donné les avertissemens
nécessaires pour s'acquitter chrétiennement desdites fonctions,
nous avons lesdits jour et an que dessus reçeu d'elle en la maniere
accoutuméé la prestation de serment."
Etienne Huvier nota la prestation de serment d'une sage femme dans le registre paroissial. On pourrait croire qu'avant janvier 1753, la paroisse en aurait été dépourvue, ce qui n'est pas exact: Marguerite Bectard, âgée de 59 ans en 1752, officiait avant la venue du nouveau curé, tant pour mettre les enfants au monde que pour "ondoyer" les nourrissons en danger de mort. |
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Dans une marge du registre de 1752, Etienne Huvier mentionne: "C’est moy qui ai commencé dans cette paroisse à faire sonner L’angélus à midy, à faire chanter les commandemens de Dieu et de l’église à la fin du prône, et à faire la prière après complies." Plus tard, il initiera des travaux à l'église, renouvellera les vases sacrés et les habits sacerdotaux. Il essaiera de donner un peu de dynamisme à l'église que son prédécesseur vieillissant avait peut être négligée. L'angélus n'était plus sonné, l'office ne se déroulait plus comme il aurait dû, la sage femme n'avait pas été nommée suivant les règles, le maître d'école ayant officié sous Charles Bureau n'était pas digne de ses fonctions, les dettes n'étaient pas couvertes (plus tard, on découvrira que le curé Bureau, intime du châtelain puisqu'il fut le parrain de l'un de ses fils, n'avait pas exigé l'ensemble des dîmes qu'il devait) ... autant de petits faits notés par Etienne Huvier qui devaient refléter ses opinions et qui ne devaient pas être du goût de Charles Bureau, pour peu que le nouveau curé ait exprimé publiquement ces remarques. En quelques mois, les relations entre les deux curés avaient dû s'envenimer, et Charles Bureau n'était plus enclin à faire le moindre cadeau à son successeur. D'où ces longues ratures sur l'acte de vente.
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« Les constructions, entretien
et réparations des presbytères étaient à la charge
des paroissiens. Ce point, autrefois contesté, ne l'était plus
au XVII° siècle et notamment depuis l'édit de 1695, tout
à fait formel à cet égard. Il obligeait les paroissiens
à fournir au curé un logement convenable et un arrêt du
conseil spécifiait ce qu'il fallait entendre par logement convenable:
deux chambres à feu, cabinet, cuisine, grenier, cave, cellier et écurie
s'il y avait des écarts dans la paroisse. Il ne parlait pas des meubles,
ni de grange aux dîmes... S'il n'y avait pas de presbytère, les
paroissiens devaient fournir des sommes suffisantes pour que le curé
pût se loger." Dictionnaire de l'ancien
régime PUF
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Connaissant le caractère bien trempé d'Etienne
Fare Charles Huvier, il est fort étonnant qu'il ait accepté
de se laisser plumer par l'ancien curé, depuis
plus de cinquante ans, les curés achètent leur presbytère...
et par les paroissiens, dont la Fabrique dépensait en impôts,
cierges et entretien presque l'intégralité des recettes
et n'avait pas proposé de dédommagement pour l'absence
de presbytère. |
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La question du presbytère
ressurgit trois ans plus tard quand Etienne Huvier envoya ce placet à
l'intendant de la généralité de Paris: "...
prend la liberté de réprésenter à vôtre
Grandeur qu'il ne demande point les réparations d'un presbitaire
puisqu'il n'y en a point dans laditte paroisse et que de mémoire
d'homme il n'y en à jamais eu où les curés ayent
habité. Comme le suppliant est obligé faute de presbitaire,
de se loger à ses dépens, il suppli très instament
vôtre Grandeur de vouloir bien ordonner, où qu'il en soit
construit un, où qu'il luy soit donné annuelement une somme
qui luy tienne lieu de logement."
Feuille volante annexée aux minutes du notaire Vaudremer 188 E 63 |
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A la fin de sa supplique, Etienne
Huvier essaya de jouer de ses relations, enl'occurence la position de
son frère Jean, bailli et maire de la ville de Coulommiers : Ci-contre: portrait de Jean Huvier conservé
aux Archives départementales de Seine et Marne, de même que son
costume: veste et culotte bordeaux foncé, gilet blanc brodé,
2 noeuds noirs
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Le moment était fort mal choisi pour
mettre à l'ordre du jour le dossier du presbytère, Etienne
Huvier n'en fut certainement pas à l'initiative, se contentant
de répondre à une enquête de Berthier de Sauvigny,
'intendant de la généralité de Paris sur l'éventualité
de réparations au presbytère. Mais la réponse de
l'intendant l'incita (ou l'obligea) à poursuivre: "Vu
la présente requete nous ordonnons qu'icelle sera communiquée
aux principaux propriétaire et habitans de ladite paroisse générallement
assemblés à la diligence du sindic au son de la cloche
a la maniere accoutumëe pour par eux déliberer sur le contenu
d'hycelle pour leur délibération à nous rapportëe
avec l'avis du Sr Desverneys notre subdélégué à
Montereau être ordonné ce qu'il appartiendra. Fait à
Paris le vingt quatre janvier mil sept cent cinquante cinq."
"...Et à l'instant est comparu ledit
sieur Huvier curé lequel ayant égard aux réparations
que lesdits propriétaires et habitans viennent de faire faire à
laditte église dudit lieu de la Chapelle et à l'indigence
desdits habitans, voulant d'ailleurs prouver d'une manière sensible
aux uns et aux autres son affection sincère pour eux, s'est desisté
autant qu'il est en luy estant qu'il sera curé dudit lieu à
touttes prétentions audit presbitère... Dans l'une de ses notes, il ajoute : l'acte "est avantageux pour les propriétaires et habitans et ne lie point mes successeurs. des circonstances n'ont engagé de céder mon droit; mais je ne l'ai fait que par bonté et bienveillance sans néamoins donner la moindre atteinte au droit certain et incontestable de mes successeurs." Après onze mois de démarches,
"après avoir vu plusieurs
fois Mr le Comte de Guerchy Seigneur de nangis et de cette paroisse.."
avoir convoqué plusieurs assemblées "j'ai
fait convoquer par le Sindic une assemblée trois dimanches de
suitte et ai écri à tous les principaux propriétaires
pour les inviter à s'y trouver",
Etienne Huvier n'aura gagné, comme compensation du manque de
presbytère, que l'octroi d'un terrain de 15 perches carrées,
soit entre environ 600 et 700 mètres carrés (suivant les
mesures au petit ou au grand arpent car les deux valeurs avaient cours
à la Chapelle Rablais.)
Les quatre dernières pages ont été
consacrées à l'arrivée du curé Huvier dans
la paroisse de la Chapelle Rablais. Les faits que j'y ai exposés
m'avaient fort étonnés au moment où je les ai découverts.
En débutant les recherches, je n'avais pas imaginé que
des curés avaient pu être obligés "d'acheter"
leur cure ou leur presbytère.
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