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Etienne Fare Charles Huvier/22
curé de la Chapelle Rablais 1752/1759
Le presbytère /1

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"Lorsque je suis entré icy le 12° juin 1752 ayant pris po ... 24° may audit an je n'ai point trouvé de presbitaire... d'entendre toujours repeter qu'anciennement il y en avoit ... deux petittes travéés couvertes en chaume qui depuis p ... n'existent plus" Note du curé Huvier en 1755, registre paroissial en mairie

 

La masure aurait-elle encore existé que le nouveau curé n'en aurait pas voulu : les dîmes à percevoir nécessaient un grand espace de stockage : "mener conduite et charrier tous les grains de bled et d'avoine qu'il a ensemencé... dans la grange apartenante au sieur Huvier prestre curé audit lieu de la Chapelle fidellement et sans en obmettre aucune chose, pour y être battus et ensuite conduits au marché d'icelle ville de Nangis..." Acte du 25 juin 1752 Minutes du notaire Vaudremer AD 77 108 C 56
Mais, surtout, le curé avait un rang de notable à tenir, il ne pouvait se permettre de vivre misérablement : "n'étant pas de la bienséance que ceux qui sont entrés au service de Dieu soient, à la honte de leur profession, réduits à la mendicité..." Concile de Trente

Arrivé dans sa première cure, Etienne Fare Charles Huvier se trouvait donc sans domicile ! La petite masure couverte de chaume destinée au prêtre avait disparu depuis longtemps... Pourtant, le curé Bureau demeurait dans un vaste presbytère aux allures de grosse ferme à cour carrée, typique de la Brie.

 

Plan établi sous Louis Philippe, Deroussel maire, en vue de remettre en état l'ancien presbytère, ou d'en construire un nouveau.

a. Mur à construire par Mr Derousselle prop.
b. Corps de Logis
c. Cuisine salle à manger et fournil
d. Mur d'entrée du jardin
e. Bûcher ou resserre au dessus de la cave
f. Colombier et passage de l'enclos
g. Lieux d'aisance
h. Grange Ecurie et petite grange
i. Mur mitoyen avec le sr Delille
j. Mur de Clôture sur la Rue
k. Cour
 
Nota : Les granges et Ecurie (au levant) sont en vétusté. La façade du nord; Bûcher Colombier et Lieux d'aisance sont en très mauvais état.

 

On connaît avec précision la disposition desdits bâtiments à l'époque du curé Huvier : "une maison couverte de thuilles assise en la Grande rüe de la Chapelle d'arrablay consistant en cuisine par bas, fournil, salle, cabinet attenant laditte salle, une chambre haute cabinet attenant laditte chambre, greniers au dessus, cour devant fermée de murs et par les Batimens porte Cochère et une petite porte, dans laquelle cour est une Grange à Bled, volière au dessus du portail de laditte Grange, à un des costés de laditte Grange, est un Batiment qui conciste en cave, cabinet, grenier au dessus, et un autre petit batiment, qui consiste en un toist à porc et un poulailler au dessus, de l'autre coté en une petitte Grange à avoine, bucher, et Ecurie, des lieux communs en un coté de laditte cour, une place dans laditte cour ou il y avoit autrefois un hangard, tous lesdits lieux couverts de thuille... Item un batiment contenant trois travées couvert de paille et de jonc, l'une desquelles sert de cave et grenier au dessus et les deux autres de granges, ou il y avoit autrefois cinq travées de maison, sçis en la grande rue de la Chapelle Rablay proche l'Eglise..." sans compter les jardins. Acte du 10 octobre 1752 Minutes du notaire Vaudremer AD 77 188 E 60

Ci-dessous, un essai de représentation du centre du village de la Chapelle Rablais, en 1859, quand le clocher fut rénové, à l'occasion d'une classe patrimoine avec les Archives départementales, en 1997. La maquette du presbytère que l'on mettra en évidence en passant la souris sur l'image, comporte bien des erreurs : le colombier est mal placé, les bâtiments couverts de paille ne sont pas les bons etc... A ma décharge, il faut dire que j'avais essayé d'extrapoler le plan cadastral car je n'avais pas encore découvert le plan ci-dessus...

Le texte du livret d'archives publié à l'occasion de la classe patrimoine

 

 

Les cartes représentant "la Chapelle Arablay" au XVIII° siècle ne permettent pas de bien visualiser le presbytère, ses vergers et jardins. On pourra avoir une idée des possessions d'un curé de la Chapelle Rablais après l'établissement du cadastre, en 1832.

Doc : les propriétés du curé Ozouf 1770/1841

 

 

Le curé Bureau disposait d'un vaste presbytère, d'une "une maison couverte de thuilles" où il put loger son frère et sa soeur (ils décédèrent à la Chapelle Rablais où ils furent inhumés dans l'église), d'une "Grange à Bled", d'une "petitte Grange à avoine" et bien d'autres bâtiments. Pourtant, la paroisse ne disposait d'aucun bâtiment, ni pour se réunir, ni pour le maître d'école, ni, donc, pour le curé. Au premier cadastre, 1832, la commune ne possédait que l'église, le cimetière et la mare !

En fait, Charles Bureau était propriétaire de son presbytère. Il l'avait acquis en 1717 à son arrivée à la Chapelle Rablais, d'un précédent curé, Lazare Baillot qui lui-même le tenait de son prédécesseur, Etienne Buillat qui, en 1696, qui semble avoir été le premier à acquérir ce bâtiment. Ce que confirmerait un document de 1755: "il n'y en a point dans laditte paroisse et que de mémoire d'homme il n'y en à jamais eu où les curés ayent habité" ... "il y avoit jadis deux petittes travées de logis couvertes de chaumes qui servoient avant que feu monsieur Bulliat fut curé de laditte parroisse à loger le curé ou desservant."
Supplique du curé Huvier 1755 / Minutes du notaire Vaudremer AD 77 188 E 63

 


Seul manque, dans la liste des propriétaires du presbytère, le curé Cadiou qui desservit la paroisse de la Chapelle Rablais entre 1711 (départ du curé Lazare Baillot pour Noisiel où il termina ses jours en 1721) et 1716 (arrivée du curé Bureau).
A Nangis, ville proche de la Chapelle Rablais, "le presbytère, qui était à cette époque le même que celui actuel, appartenait aux curés de Nangis, par suite du don que leur en avait fait un ancien curé de cette paroisse." Il n'était pas question de le vendre, contrairement à celui de la Chapelle Rablais !
Ernest Chauvet, Nangis notes historiques 1910

Doc : succession des curés, vicaires & maîtres d'école à la Chapelle Rablais 1669/1785


Charles Bureau n'acheta pas le presbytère au comptant, mais reprit, dans un premier temps, les rentes que le curé Baillot avait contractées; une cession de bail comme l'indique le répertoire du notaire Charpentier à Nangis : dix livres de rente aux héritiers Pigeastre, cent livres de rente aux héritiers d'Etienne Buillat. La rente de dix livres fut rachetée en 1742 auprès de Charlotte Mercier, veuve de Louis Pigeastre, acte chez le notaire Tribou à Fontainebleau; celle de cent livres, couverte le 21 janvier 1723 chez Legris, notaire à Sens par une rente viagère de 150 livres par an, éteinte par le décès de "Damoiselles Colombe et Margueritte Baillot" et une somme de 1.000 livres chez le même notaire le 13 décembre 1740. Passablement complexe, et j'ai résumé!
Ceci ne concernait que le bâtiment principal. Il acquit aussi contre une rente de vingt cinq livres, le "batiment contenant trois travées couvert de paille et de jonc" à Charles Roux et sa femme chez Charpentier à Nangis, le 13 mai 1717; à la même date, un clos au même Charles Roux, rente de trois livres due à Louise Cochin, veuve d'Henry Laserve. La rente de vingt cinq livres fut rachetée le 18 septembre 1720 chez Montcourt notaire à Sens (encore un nouveau notaire !), celle de trois livres fut remboursée le 28 septembre 1741 chez LeSeurre de Chantemerle, notaire à Nangis (j'ai parlé trop vite : encore un notaire !) Il avait aussi acheté une portion de jardin le 28 février 1717 à Agnès Millet, veuve de Simon Pion, le prix manque.


Pour résumer : Charles Bureau avait acquis bâtiments et jardins à crédit, à chaque fois sous forme d'une rente, alors à 5% de la valeur du capital, qu'il jugea judicieux de racheter au fil des ans. Les sommes déboursées sont difficiles à évaluer. En 1717, les rentes qu'il devait payer s'élevaient à 10 £ aux héritiers Pigeastre, 100 £ aux héritiers Buiilat pour le bâtiment principal, 25 £ pour le second bâtiment et 3 livres pour le clos, plus une somme inconnue pour la portion de jardin, soit un total d'au moins 138 livres par an. S'il avait poursuivi ces versements pendant les trente six ans qu'il passa à la Chapelle Rablais, il aurait déboursé près de cinq mille livres. Certainement moins, grâce aux conversions qu'il opéra.

 

Pour avoir un logis digne de son rang, Etienne Huvier dut faire comme ses prédécesseurs : acheter le presbytère "moyennant le prix et somme de Quatre mille trois cens livres franc denier audit sieur Bureau laquelle somme a esté payée comptée nombrée et réellement délivrée en loüïs d'or d'argent et monnaye ayant cours présence et a la vue du notaire et témoins soussignés par ledit sieur Huvier audit sieur Bureau qui a pris et serré laditte somme..."
Minutes du notaire Vaudremer AD77 188 E 60

 

Le curé Bureau évita la rente. Avançant en âge (merci à qui me signalera son décès, probablement à Nangis, après 1760), il n'était pas certain de percevoir cette forme de viager pendant de nombreuses années; il préféra une somme conséquente, au comptant, dès l'acte d'achat signé, ce qui fut fait le 10 octobre 1752, quelques mois après l'arrivée d'Etienne Huvier à la Chapelle Rablais, fin mai de cette année. On ignore, d'ailleurs, où il put loger pendant ces quelques mois.

Etienne Fare Charles Huvier n'était pas au bout de ses dépenses. A cause de la mutation immobilière, il dut payer le "centième denier" en contrepartie de " l'insinuation", l'enregistrement de l'acte sur les registres du greffe du bailliage afin que quiconque puisse le consulter. Lexique Wiki Soit un centième du prix d'achat : "Du quatorze octobre 1752 Vente par Mre Charles Bureau ancien curé de la Chapelle Rablay demt à Nangis à Mre Estienne Charles Fare Huvier curé dudit lieu de la Chaplle Rablay y demeurant d'une grande maison et dépendances et un clos le tout situé à la Chapelle Rablay moyennant quatre mille trois cent livres passé devant Vaudremer Notaire à Nangis le dix octobre 1752. Reçu pour le centième denier quarante trois livres." Centième denier Nangis 1752/56 AD 77 108 C 56

 

 

Ajoutons les frais d'installation dans cette nouvelle demeure que le curé Bureau avait laissée vide de meubles : "les meubles meublans que ledit sieur Bureau a rétiré de laditte maison Note du curé Huvier / Acte de vente du 10 octobre 1752".
Il lui fallut donc acheter un mobilier suffisant pour son installation et celle de son domestique, avec la possibilité de recevoir des proches, comme son beau frère, mousquetaire résidant à Coulommiers, dont la présence est attestée le 8 octobre 1754, puisque témoin au mariage d'un berger (les autres témoins ayant été le maître d'école, l'aubergiste et un enfant de choeur, il est probable que le curé fit signer des proches de la cure 5 Mi 2828 p 175)

 

Vicaire pendant trois ans, Etienne Huvier n'aurait pas pu économiser les sommes conséquentes nécessaires pour sa prise de fonction et son intallation dans sa première cure. Le soutien de sa famille lui fut nécessaire.
Nous verrons, à la page suivante, que le curé Bureau ne s'était pas contenté de retirer les "meubles meublants" du presbytère qu'il vendait à son successeur et que le passage de relais entre les deux prêtres ne sembla pas s'opérer avec le bienveillance que l'on aurait attendue d'hommes de Dieu...