Texte du livret d'archives
La Chapelle Rablais 1997
Introduction
La Chapelle Rablais n'a jamais attiré l'attention, à l'abri de sa forêt. Dans les livres d'histoire, on ne trouve pas de fameuse bataille de la Chapelle Rablais ou de traité de paix des Montils. Ses célébrités se comptent sur les doigts d'une main: un chanteur yéyé qui avait pris le nom du hameau, une ex-concubine de Napoléon III devenue châtelaine, un cheval de course... Ses rues ne portent que des noms de fermes, de bois, de Chemin Blanc, de Vieux Prés, de mares... Pas de héros, de grand savant, d'être exceptionnel; tant mieux; ainsi, l'étude de la vie d'une seule personne, devenue célèbre ne prendra-t'elle pas une importance exagérée, par rapport aux centaines, aux milliers d'hommes anonymes qui ont créé le village, y ont vécu et, peu à peu, l'ont transformé.
Dans cette seconde publication des documents sur la commune
de la Chapelle-Rablais, j'ai essayé d'exposer les plus significatives
des archives qu'il m'a été possible de rassembler; j'ai découvert
quelques documents nouveaux, d'autres ont pris une signification inattendue.
Il est certain que je n'ai pas tout vu, ni tout compris. Si vous remarquez
des erreurs, n'hésitez pas à m'en informer. J'ai aussi tenté
de résoudre quelques énigmes: pourquoi des hommes ont-ils choisi
de s'installer à cet endroit, pourquoi ont-ils donné ces noms
aux lieux qu'ils fréquentaient: les champs, les bois, mais aussi les
villages, l'église; comment se sont-ils adaptés aux contraintes
naturelles puis ont-ils longuement modifié le paysage?
Les noms de la plupart de ces hommes ont été oubliés,
leurs traces le plus souvent effacées: les papiers perdus, les maisons
détruites, les tombes déplacées; mais il me semble bon
de garder leur souvenir en mémoire comme d'autres évoqueront
peut-être notre bref passage en ces lieux.
JB Duval école de la Chapelle Rablais 1997
La Chapelle Rablais est bornée
au Nord par les territoires de Fontains et de Fontenailles, à l'est
par le territoire de Villeneuve- les- Bordes au sud par celui de Coutençon
et à l'ouest par les territoires d' Echou- Boulains et des Ecrennes.
On trouve au sud- ouest l'ancien manoir des Moyeux accompagné aujourd'hui
d'un joli parc. A l'ouest, le hameau du grand Montils qui compte aujourd'hui
263 habitants.
Dans la plaine qui se développe au sud se trouve la ferme de Tourneboeuf,
le hameau de Frévent, les Farons et Putemuse. Au nord, on rencontre
la ferme des Moulineaux et l'ancien château du Mai. Le village renferme
523 habitants, son territoire consiste en terres labourables et bois et en
prés; il est situé à 6 kilomètres de Nangis à
24 kilomètres de Provins à 24 kilomètres de Melun. Il
est placé au milieu d'une plaine basse sans cours d'eau ce qui le rend
humide.
Extrait du cahier de roulement de l'école octobre
1877
La préhistoire, le Moyen Age, la Haye de Brie, la création des villages... ont été repris dans des pages Internet assez anciennes, du temps des vieux modems et des lignes poussives, d'où des pages très courtes par rapport à celles que je propose aujourd'hui.
Préhistoire, Moyen Age, création des villages...
Les origines
L'histoire de la Chapelle Rablais peut se confondre avec celle de ses forêts. Déboisements, cultures, friches, taillis, grands arbres ont dû se succéder au fil des siècles. Chaque expansion des bois recouvrant les traces des anciens agriculteurs. Plusieurs vagues de reboisement ont peut être eu lieu: aux temps barbares après un défrichement possible aux temps gallo-romains; pendant la guerre de Cent Ans, si la population de notre village a été touchée par les désastres de la guerre comme les communes voisines. Ces deux premières évolutions ne sont pas attestées. La troisième vague qui eut lieu au XIX° siècle, favorisée par les gros propriétaires terriens, est mesurable et sera étudiée un peu plus loin. Les friches actuelles laissent présager une nouvelle expansion des bois sur les terrains les moins rentables.
"Jusqu'au cours du X° siècle, le large plateau de la Brie française était resté couvert de sa forêt que la hache avait à peine entamée sur les bords: elle s'appelait la forêt de Bièvre; elle couronnait les hauteurs du bassin de la Seine de Melun à Montereau, et joignait la forêt de Fontainebleau à celle de Chenoise, laquelle se prolongeait jusqu'à la Traconne...,Les forêts de Barbeau, de St Germain- Laval, de Valence, des Montils, les bois de Montigny- Lencoup, de Gurcy, de Villeneuve les Bordes, de Villefermoy, de Châtillon la Borde, la garenne de la Croix en Brie, les bois de Louan et de Montaiguillon, pour ne citer que les plus importants, sont des parties non défrichées de cette forêt de Bièvre." Ernest Chauvet, Nangis Notes historiques
Les cartes archéologiques portent, en blanc, la marque
de la grande forêt de Bièvre dont fait partie Villefermoy: pas
de découvertes; certainement pas d'hommes préhistoriques. Les
hommes de ces temps reculés avaient choisi de se regrouper le long
des voies de communication dans la vallée de la Seine ou près
de ce chemin très ancien que les Romains ont ensuite aménagé:
le Chemin Perré, la voie qui passait par Châteaubleau. Si quelques
haches préhistoriques ont été retrouvées dans
les champs, elles peuvent être la trace d'un chasseur de passage ou
les rares témoins d'un peuplement oublié.
L'étude de Pierre Geslin consacrée à la Brie antique
laisse aussi en blanc le massif de Villefermoy dans la carte qu'il a tracée
des "fermes à une lieue" supposant par là que ce territoire
n'était pas en culture aux temps gallo-romains.
Mais, un jour, peut-être, la charrue d'un agriculteur ou la pelle d'un
promoteur révéleront-elles des vestiges oubliés. Alors,
certains lieux-dits pourraient prendre une signification nouvelle: le chemin
Perré, au nord des Montils, la Pierre du Compas, la Haute Borne...
La forêt a longtemps été peuplée
de nomades: des charbonniers, meules de charbon de bois et forges, des cendriers
pour le verre et le savon, des bigres chasseurs d'abeilles, cueilleurs de
cire et de miel sauvage. Sur ses lisières, les paysans faisaient pâturer
les animaux domestiques, surtout des porcs qui ressemblaient encore à
des sangliers. L'épaisseur de ses sous-bois a donné refuge à
des loups, des braconniers, des voleurs, des ermites... Peut être l'un
d'entre eux a- t'il construit la chapelle qui a donné son nom au village.
Les forêts étaient mystérieuses, elles faisaient peur.
La plupart des contes de notre enfance les peuplent d'ogres, de sorcières
et de magiciens. Les noms de lieux gardent le souvenir des temps oubliés
et nous révèlent la vision que les paysans avaient pu avoir
des terres qu'ils cultivaient, des hameaux qu'ils habitaient au moment où
se créaient la plupart des noms propres de famille comme de lieux:
le Moyen Age. A défaut de posséder une carte de la région
de cette époque, (les voyageurs du Moyen Age ne dessinaient pas de
cartes mais traçaient de simples itinéraires: des villes ou
des carrefours reliés par des traits droits) nous retrouverons les
noms des lieux- dits sur la belle carte de Cassini, milieu du XVIII° siècle.
On y découvre des noms peu rassurants disposés sur un large
cercle centré sur notre village: Maupas, la Malnoue, Maupertuis (mauvais
passage), Malassise, la rue Chaude, la Diablesse, les Rôtis, le Plessis...
On sent la peur, la malédiction qui pouvait planer autour de ce lieu,
car cette forêt était plus dangereuse encore que les autres bois
de la région.
La Haye de Brie
La région a été dangereuse comme le
sont toutes les frontières: les territoires de la Chapelle et de Fontenailles
ont fait partie, pendant une longue période du Moyen Age d'une zone
tampon entre le puissant Comté de Champagne et l'Ile de France royale.
La Chapelle Rablais était juste dans la Marche séparante comme
le suggère la carte. Depuis le XI° siècle, la puissance
des Comtes pouvait rivaliser avec celle du Roi. Ils s'étaient permis
de reculer la frontière qui était auparavant à la limite
de l'ancienne voie romaine: le Chemin Perré. Les conflits devaient
être fréquents; on garde le souvenir du
roi Louis VII qui, pour se venger de la résistance des Champenois,
brûla Vitry et ses 1300 habitants qui s'étaient réfugiés
dans l'église. Louis Leboeuf, précis
d'histoire de Seine et Marne
Gardée ça et là par des châteaux de bois, les Plessis,
cette frontière aurait été trop perméable si elle
n'avait pas été fortifiée de façon naturelle.
Une forêt touffue de 5 à 15 kms de largeur gênait le passage
des gens d'armes et des cavaliers; on l'appelait la Haye de Brie. Elle devait
rappeler la haie entretenue par les Nerviens qui avait embarrassé les
légions de Jules César qu'il décrit dans la Guerre des
Gaules: ils taillaient et courbaient de jeunes arbres;
ceux-ci poussaient en largeur de nombreuses branches; des ronces et des buissons
épineux croissaient entre leurs intervalles: si bien que ces haies
semblables à des murs offraient une protection que le regard même
ne pouvait violer.
On peut retrouver les limites exactes de la Haie en 1270 grâce à
une sentence rendue au Parlement concernant les commenchemens et les bonnes
(bornes) de terrouirs del roaime et du comté de Champagne. Ce bois-frontière
a été défriché aux 12° et 13° siècles,
cependant des lambeaux de ses franges se sont conservés jusqu'à
nos jours. Le seigneur de Nangis avait choisi de délimiter ainsi clairement
son territoire qui est depuis le Grand Chemin Paré,
qui passe par Châteaubleau, et de là tenant à Pécy,
et depuis Pécy jusqu'à Courpalay, et dudit lieu par devers Grandpuits
et le hameau du Feuillet... de là, suivant le long de la Haye de Brie,
jusqu'à la Pierre du Compas et dudit lieu,suivant toujours la Haye
de Brie, jusqu'à Valjouan. Ernest Chauvet
Un chemin de la commune conserve le souvenir de cette haie.
Après s'être copieusement bataillés,
entre comte Eudes 1°, roi Robert II, Comtes Thibaut, rois Louis, vint
le temps de la réconciliation. En 1255, Thibaut VII, dit le Jeune,
comte de Champagne et roi de Navarre épousa Isabelle de France, fille
de St Louis au château royal de Melun. En 1284,
Jehanne de Navarre, fille du comte Henri III le Large épousait son
cousin Philippe, le second fils du roi de France et en 1285, par la mort de
son père et de son frère, l'époux de Jehanne devenait
roi de France sous le nom de Philippe le Bel. La Champagne et la Brie étaient
réunies à la Couronne. Louis
Leboeuf
La frontière n'avait plus raison d'être; la Haye de Brie subsista,
très réduite en taille car Pierre Britaud, seigneur de Nangis
au XII° siècle d'accord avec le seigneur du Châtel, avec
l'abbé, seigneur de Donnemarie, et les autres riverains, conserva une
lisière de bois, large d'environ deux cents mètres, qui enveloppait
les deux seigneuries nangissiennes et les séparait du Montois et des
fiefs voisins. Ernest Chauvet
Si le conflit cessa à la fin du XIII° siècle, il est probable
que le défrichement de la plus grande partie de la Haie de Brie eut
lieu au cours du siècle précédent; non que les frictions
entre les deux grands féodaux aient cessé, plutôt parce
que bien des choses avaient évolué. En premier lieu, les techniques
de fortification: au XI° siècle, les forteresses étaient
encore pour la plupart en bois, comme la grosse tour de Montereau qui, bâtie
à cette époque ne sera remplacée par un château
de pierre qu'en 1227. Des maisons fortes rendaient moins nécessaire
la protection d'une vaste forêt. Comte et Roi avaient entouré
la zone frontière de Villes Neuves dont les habitants, en plus d'apporter
de nouveaux revenus à leur seigneur, pouvaient servir de réserves
de soldats, proches de la région à défendre. L'extension
des domaines cultivables avait été rendue nécessaire
par un fort accroissement de la population; il fallait trouver de nouvelles
terres puisque l'agriculture ne permettait pas d'améliorer les rendements.
Certains seigneurs laïcs ou religieux devinrent entrepreneurs en défrichement.
Le défrichement
"Moins répandus en France
qu'en Allemagne, les entrepreneurs de défrichements, cependant, n'y
ont pas été un type social inconnu. Beaucoup d'entre eux furent
des hommes d'Eglise: dans la première moitié du XIII° siècle,
deux frères, Aubri et Gautier Cornu, prirent ainsi à l'entreprise
-quitte à distribuer ensuite des lots à des sous entrepreneurs-
l'essartage de nombreux terrains, découpés dans les forêts
de la Brie.'"Deux des frères Cornu
ont été cités dans l'extrait des "Caractères
originaux de l'histoire rurale française de Marc Bloch.
Elargissons le cercle de famille: Vers 1180, vivait
à Villeneuve- Cornut, aujourd'hui Salins, près Montereau, une
veuve nommée Elisabeth. Cette veuve avait quatre fils qu'elle éleva
dans la crainte de Dieu; le premier, Gauthier Cornut devint archevêque
de Sens, le deuxième Albéric Cornut fut évêque
de Chartres; le troisième, Gilon Cornut fut archidiacre, puis archevêque
de Sens et succéda à Gauthier, son frère aîné;
le quatrième resta avec sa mère à Villeneuve.
dans Congrès Archéologique de France
Dijon 1852
Ce texte peu rigoureux (Simon 1 ° eut cinq fils et une fille, l'aîné
n'en étant pas Gauthier, mais Simon II qui reprit la châtellenie
ainsi que le montre Paul Quesvers, l'historien de la famille Cornu), montre
en peu de mots l'importance des futurs seigneurs de la Chapelle Rablais et
Fontenailles. Elisabeth (ou Isabelle) Clément, épouse de Simon
1° était elle- même fille de Robert Clément, régent
du royaume sous Philippe Auguste.
La base du défrichement de la forêt et de la création
de la Chapelle Rablais et Fontenailles est le petit village de Salins. Voici
comment il fut attribué à cette dynamique famille: "L'abbaye
de Faremoutiers était bénéficiaire, au IX° siècle,
du fief dit de la Tombe. Elle en céda une part au XII° siècle,
au sire Hilduin qui la donna aux abbayes de St Denis et de St Germain des
Prés. Le roi reprit des terres pour en gratifier le vicomte de Thiange
qui créa la seigneurie de Marolles, fit bâtir en 1203 le village
de Villeneuve en Brie, donna ce fief à Gilles le Cornu qui lui donna
son nom." Pignard Peguet, monographie
de Châtenay
Bel exemple de pyramide féodale que l'on verra se prolonger
sur les lieux du défrichement. Mon collègue du siècle
passé ajoute: par suite des débauches
et des désordres de ce couvent royal, les terres furent détachées
de leur unique suzerain et passèrent aux Seigneurs des environs.
M. Boisvieux, instituteur, monographie de Salins 1889
Marc Bloch ne cite que deux des frères Cornu: Albéric
et Gautier II. Il passe sous silence Simon II que je soupçonne d'être
à la base du défrichement de la forêt qui donnera naissance
à nos villages. Gautier II, fils des déjà nommés
Simon 1° et Isabelle Clément était chanoine de Paris; il
devint archevêque de Sens en 1240. Entre temps, il avait mené
à bien un défrichement dans la région de Rosay en Brie,
plus précisément à Voinsles, pour la Comtesse de Champagne
en 1216. Son frère, Albéric ou Aubry, lui aussi chanoine de
Paris qui deviendra évêque de Chartres en 1236, aura défriché
la région de Vernou pour le compte de Notre Dame de Paris à
partir de 1225 jusqu'en 1240.
Quant à Simon II, fils aîné et pour cela seigneur laïc
de Villeneuve la Cornue alors que ses frères ont dû choisir la
carrière ecclésiastique, serait-il resté les bras croisés
à côté d'un bel espace vierge qui a certainement été
défriché à cette époque? Je pense qu'il a suivi
l'exemple de ses frères, ou même, qu'ils travaillaient ensemble.
Mais aucun document n'existe qui prouverait l'action de Simon, comme on peut
authentifier celle de ses frères.
Après sa mort, en 1266, le fief de Simon sera partagé entre
deux de ses neuf fils: Pierre gardera la seigneurie de Villeneuve la Cornue,
Gautier deviendra le premier seigneur de la Chapelle Rablais et Fontenailles
en Brie; les autres enfants occupant de hautes fonctions dans le clergé,
pour éviter le morcellement du territoire.
En 1292, Gautier fait établir un rôle des vassaux, première
réfection des Terriers. Le rôle en question
est un mince cahier, en parchemin, de 13 feuillets dont le dernier, quoique
coupé par la moitié, est cependant complet. L'écriture
est de la fin du XIV° siècle, ainsi que le fragment de missel qui
lui servait de couverture; c'est vraisemblablement la copie d'un manuscrit
plus ancien dont la date est donnée dans notre manuscrit. Les abréviations
sont bonnes et l'écriture est très claire, sauf deux ou trois
mots que je n'ai pu déchiffrer. Très modestement, je
n'aurais pas pu lire ce manuscrit; il a heureusement été retranscrit
par Paul Quesvers, à la fin du siècle dernier.
Les fiefs
Ce sunt li fieu que len tient de mon
seignor Gautier le Cornu a la Chapelle Erabloy. C'est lefey Agnès,
de la Chapelle de Erabloy: sa meson ou elle maint et sa granche et IIIJ arpens
de terre meson et tout, et li doit XVd.o. de cens a la Saint Remi de lotise
qui fut Gilet le Forestier, et le lendemain de Noël, les IIII pars de
1 chapon de ce meismes, et si tient IIII arpenz et demi de terre vers la haie,
et arpent et demi a la Flatoire, et XV quartiers au Trembles et doiuent XLV
d. de cens a la S. Remj.
En 1292 commence à s'écrire l'histoire des habitants de la Chapelle
Rablais. Sept cents ans, trente générations de paysans... Les
"grands parents" s'appelaient Ysabeau la Picarde, Jacquet Cordier,
Loré le Charbonnier, Jaquet Marié et la Borue, Milon le Suor,
Gilot Forcul, Theuenot des Molins... Cent dix ménages sont comptés
sur les paroisses de la Chapelle et de Fontenailles. Quelle population, à
une époque où plus de 40% des ménages avaient entre 8
et 15 enfants?
Le fief des Cornu était morcelé en petites seigneuries. Henri
de Beau Marches, Guillaume de Vernou, Guiot dou Pré, Jehen Déniant,
eux-mêmes vassaux de Gautier Cornu étaient suzerains de paysans
qui leur devaient, à leur tour, l'impôt; et même recevaient
l'hommage de petits seigneurs comme Jehans de Montrimble, seigneur de Malnoe.
On y rencontre même des arrière-arrière vassaux: à
Montceaux, Gautier Cornu a pour vassal Jehen Demant qui a pour vassal Henri,
maire de Montceaux (il faut entendre par là qu'il percevait les impôts
dûs à son seigneur et non qu'il était premier magistrat
de la commune qui ne fut fondée qu'en 1560). Cet Henri a pour vassal
Jehen li Queuz, Gautier et Pierre de Felimain. C'est, sur un tout petit territoire,
un bel exemple de la pyramide féodale où chacun était
vassal de quelqu'un.
Il est dommage que les arpenteurs du Moyen Age aient si peu aimé les
cartes. Ils auraient fait figurer les maisons fortes, sièges des seigneuries
à la Chapelle- Rablais, Fontenailles, le Mée, le Rû .
On y aurait retrouvé le château: La fame
feu Adam dou Val tient de Guillaume IIII arpanz de terre delez les boys dou
chasteau, les moulins à eau: item, le
molin de Lepoisse et le sauçoi delez le ru de leitanpar deuers Fontins;
item,enuiron XII arpenz do terre de sus le moulin par deuers Fontins... les
vignes, heureusement situées uniquement sur les coteaux de Fontenailles.
Parenthèse: j'espère qu'il n'y en a jamais eu sur le terrain
argileux de la Chapelle où le vin aurait été pire encore
que celui redouté par Boileau:
Je consens de bon coeur pour punir ma folie
Que tous les vins pour moi deviennent vins de Brie.
(La carte essaie de situer les lieux cités dans le rôle des vassaux et d'en trouver une signification possible. Restent quelques noms sans localisation: les Trembles, Queuelevée qui a un rapport avec l'extrémité d'un champ, Terreachat qu'on peut rapprocher de la Rachée ou terre à chaux; d'autres encore: Saleri, Felimain, la Puisière, la Troigne.. qui sont peut-être les villages d'origine des paysans.)
Lien vers la carte des lieux-dits au Moyen Age
C'est lefey que monsor Henri de Beau marches tient de monsor Gautier le Cornu: c'est assavoir en viron IIII XX arpens de boys au grand arpent qui tient au bois devant Le Mes et au haies de Brie, et XIII arpen: au grant arpent delez le chemin de Brie, et LVII arpem et III quartiers delez les haies de Brie, et delez le boys Saint Germain a larpent de Champeigne, et des haies de Brie XXV arpenz au grand arpent; item la moitié du fief de la Charmée.
Les colons qui défrichèrent la forêt
étaient attirés par des conditions particulières. Les
impôts étaient moins lourds que sur des terres déjà
mises en culture: environ 4 deniers par arpent, pour des superficies moyennes
de 4 arpents, sans compter la dîme de la dixième ou onzième
gerbe. Les contraintes, pour créer une hôtise, étaient
multiples: obligation de défricher, interdiction de rétrocéder
des terres à des chevaliers ou à des églises, obligation
de demeurer pour celui qui héritait... Cochet
Cochet C'est ce qu'imposait le chapitre de Notre Dame de Paris pour
ses défrichements sur Vemou, organisés par Aubry Cornu; il est
probable que les conditions ont été semblables pour notre forêt.
Un chemin fut tracé, le long duquel les hôtes commençaient
à couper les arbres, installaient l'herbagium: maison, cour, bâtiments,
jardins, dépendances, d'une superficie inférieure à un
arpent, puis continuaient le défrichement, créant de longues
clairières à l'arrière de leurs maisons. Ces étroites
parcelles se retrouvaient encore sur le cadastre, au début du XIX°
siècle.
Etaient-ils tous des hommes libres? Le servage existait encore: en
1239, Simon II vend à Simon, abbé de St Germain des Prés,
plusieurs hommes de corps à St Germain Laval pour 40 livres
Maurice Lecomte C'est une belle somme: les
impôts sur la Chapelle Rablais payés à la St Rémi
ne rapportant au seigneur comme Summe de tôt:
IXlib. VIII s.o Plus tard, encore, Aubry , le 12 juin 1283 transigea avec
le Chapitre de Sens sur le partage de leurs hommes et femmes respectifs mariés
ensemble Paul Quesvers
Les colons venaient de Montigny, Rubelles, Machault, Melun, Provins... puisque
c'est le surnom qu'on leur donne. Les noms de famille ne sont pas encore fixés;
on accole au prénom la provenance Aaliz, fame
de feu Jehan de Rosoi, un défaut ou une qualité: Forcul,
Platpié, le Plusbeau, Houdin le Roi -il n'était Roi que
du tir à l'arc- ou le métier. On peut donc connaître les
activités pratiquées dans les premiers temps du village: le
Cerclier, le Charbonnier, des Boys, le Forestier, le Cendrier, le Cordier,
le Monier, des Molins, le Coutelier, Lefebvre (forgeron), le Suor (cordonnier),
le Prestre.
La forêt ayant été pendant quelques siècles la
frontière imprécise entre le Comté de Champagne et l'Ile
de France royale, la clairière de défrichement emprunta des
deux territoires. La superficie de certaines parcelles du rôle des vassaux
de 1292, sur Coutençon, est mesurée à l'arpent
de Champeigne, correspondant à une perche carrée de 20
pieds, soit 42,21 ares, mesure qui figurait encore sur le cadastre en 1831.
Plus au nord, on employait le grand arpent de 22 pieds carrés, soit
51,07 ares, comme l'indique la citation.
Loin des quelques perches carrées attribuées
aux hôtes, quatre grands vassaux ont des domaines d'environ 200 arpents.
Ce ne sont pas de simples paysans.
Jehen Demant était intendant d'un domaine à Monceaux, peut être
la Brosse Montceaux proche de Marolles, puisqu'il existe aussi un Miles de
la Brouce. Guiot dou Pré compte, parmi ses vingt vassaux Jehans de
Montrimble, seigneur de Malnoe et plusieurs escuiers: des chevaliers non encore
adoubés. Deux vassaux de Gautier Cornu, ont attiré mon attention:
Henri de Beau Marches, dont les domaines sont décrits dans la citation
et Guillaume de Vernou. Leur provenance est Vernou et Beaumarchais, de la
commune des Chapelles Bourbon près de Rosay. Exactement les lieux des
défrichements des oncles de Gautier III: Gautier II qui essarta Rosay
en 1216 et Albéric qui défricha Vernou en 1225. La coïncidence
est trop grande! Je pense que trois frères Cornu sont devenus entrepreneurs
en défrichements, Simon ayant créé nos villages.
Les origines du nom
Au jeu du téléphone arabe, un premier enfant
chuchote une phrase à un second qui transmet ce qu'il a cru comprendre
à un troisième et ainsi de suite. Pour peu que la phrase d'origine
soit un peu obscure, il est certain que ce qu'aura compris le dernier n'aura
qu'un lointain rapport avec ce qu'avait proposé le premier. Il en est
de même pour les noms inconnus; s'ils ne sont transmis qu'oralement,
il y a de fortes chances pour qu'ils le soient mal. Alors même qu'ils
sont écrits, il arrive d'y faire des fautes. Combien de lettres a-t'on
reçu à la Chappelle Rabelais avec un E comme l'auteur de Gargantua
et deux P à Chapelle?
Au moment de la création du village, l'usage de l'écriture était
très rare, réservé aux actes officiels: les Terriers
qui recensaient les possessions des seigneurs et les obligations de leurs
vassaux; les minutes de procès, le plus souvent à cause d'une
contestation concernant les limites d'un territoire ou les droits qui s'y
rapportaient.
C'est pourquoi la première mention écrite d'un village ne correspond
pas forcément à la date de sa création, comme le nom
qui est inscrit pour la première fois est peut-être fort éloigné
de celui qui avait été donné à l'origine.
Le premier texte citant notre commune date de 1175 et concerne l'abbaye de
St Germain des Prés. Déjà, au siècle de Charlemagne,
le polyptique d'Irminon décrit les possessions de St Germain: Trente
à trente cinq mille hectares sont attribué à cette abbaye
en vingt cinq domaines éparpillés de la Bretagne à la
Lorraine, subdivisés en milliers de petites tenures. Pierre
Gaxotte Histoire des Français L'abbé Denis, dans ses
Lectures sur l'histoire de l'agriculture, décrit les possessions de
St Germain dans la Brie, dont des domaines autour d'Esmans. L'abbaye de St
Germain possédait des bois sur Echou-Boulains qui en ont gardé
le nom. La première citation de la Chapelle en 1175 est: Foresta
de Herablen. Il ne s'agit donc que d'un bois, à la limite de
la forêt de St Germain. A noter que le mot Foresta, s'il désigne,
évidemment, une forêt a un autre sens: Les
rois mérovingiens, grands chasseurs, avaient constitué des réserves
non loin de leurs résidences. Il se peut que le mot Foresta qui apparaît
au VII° siècle, désigne des districts réservés
aux chasses royales. Les princes avaient le privilège d'abattre les
bêtes fauves, aurochs, ours, sangliers... Duby
La première fois que ce qui deviendra Rablais est cité, c'est
sous la forme Herablen, puis Erableyo, ensuite Aarabloi, Erableii, Darblay,
Roableyo... Laquelle de ces formes correspond au nom primitif, celui qui a
eu un sens? Il faudrait être capable de remonter à l'envers la
chaîne du téléphone arabe!
Terres proches appartenant à des établissements
religieux:
la Chapelle Gauthier: collégiale de Champeaux
Coutençon, Clos Fontaine, la Croix en Brie: Notre Dame de la Charité,
Cluny, puis ordre de Malte, comme Rampillon qui appartint aux Templiers.
Echou et Boulains: religieux de Preuilly, ordre cistercien et St Germain des
Prés
Les Bordes: religieux de Ste Colombe de Sens comme Putemuse, sur le territoire
de la Chapelle Rablais
Grand Puits: abbaye de St Denis comme St Ouen en Brie
Les Ecrennes: abbaye de Barbeau, proche de Fontaine le Port comme Villefermoy
dont la forêt est nommée Forest de Barbeau, sur cette carte.
Laval: abbaye de St Germain des Prés.
Sur le territoire de la Chapelle Rablais, des terres étaient destinées
aux boursiers du collège du Cardinal Lemoine, lieu-dit les Cardinaux.
La Chapelle
Afin que les ouvriers qui se livraient
à l'agriculture ne fussent pas privés d'assister au sacrifice
de la messe, lorsque leurs travaux les retenaient loin de leurs habitations,
nos pieux ancêtres fondèrent dans la campagne une infinité
d'oratoires auxquels ils attachèrent des revenus pour l'entretien de
l'ecclésiastique chargé de les desservir. Ainsi, au début
du XIX° siècle, M. Pascal justifie-t'il la dénomination
de la Chapelle pour notre village, signalant qu'il existait en France 212
communes portant ce nom.
Une chapelle: Capella de Erableyo est citée pour la première
fois en 1275, cent ans après Foresta de Herablen. A cette époque,
les colons qui ont défriché la Haye de Brie sont installés
depuis au moins une génération: en 1292, on compte cent dix
familles, combien d'habitants? N'aurait-on érigé qu'une simple
chapelle pour une communauté villageoise aussi importante ou bien la
chapelle existait-elle avant le village, avant même que la forêt
ne soit défrichée et peuplée puis, sur le même
emplacement, remplacée par un bâtiment plus important?
Le saint patron auquel l'église est dédiée est St Bon
ou St Bonnet. Clercs et moines se disputent les restes
d'un Bonet de Clermont (mort en 706), d'un Léger d'Autun (mort en 680)
Georges Duby Pourquoi se mettre sous la protection
d'un tel personnage, presqu'inconnu? Je penche pour un autre religieux, plus
proche de nous sinon dans le temps, du moins dans l'espace: St Bond, ermite
dans l'archevêché de Sens vers 620 auquel fut dédié
un prieuré non loin de cette ville. Inscriptions
de l'ancien diocèse de Sens La Chapelle Rablais fit partie de
ce diocèse jusqu'en 1790; la famille Cornu, ses seigneurs, donna plusieurs
archevêques à cette ville qui fut l'un des centres religieux
et politiques de la Gaule puis de la France (la ferme du Mée s'appelait
d'ailleurs le Mée l'Archevêque).
Peut- être les premiers habitants du village ont-ils dédié
la chapelle à ce St Bond local. Peut être était-ce là
l'emplacement de son ermitage? Pour l'instant, ce ne sont que des suppositions.
L'implantation des Montils suit une crête de grès
presqu' imperceptible mettant les maisons au sec sur un terrain jugé
"chaud et sablonneux" alors qu'il est autre part "froid et
argileux"; ainsi le décrivait mon prédécesseur,
chargé de la monographie de la commune en 1889, pour le centenaire
de la Révolution Française.
Le seigneur a dû faire tracer un chemin de chaque côté
duquel il a donné des concessions. Le paysan était chargé
de construire sa maison, le plus souvent le long du chemin, puis de défricher
perpendiculairement à la route, élargissant peu à peu
la clairière. On retrouve ce schéma de petites parcelles en
arêtes de poisson sur le cadastre ancien, avant l'exode rural puis le
remembrement. Les Montils sont cités par les professeurs d'histoire
de Seine et Marne comme village typique du défrichement moyen-âgeux.
Le plan du chef-lieu est différent: il a un centre autour duquel rayonnent les rues. C'est l'église, certainement reconstruite à l'emplacement d'un monument plus ancien dont elle a réutilisé des matériaux puisque on y retrouve quelques pierres taillées en visages humains et signes mystérieux à des emplacements sans gloire: sous le toit, près de la chapelle, le long du contrefort droit où on distingue deux visages et une gravure qu'on pourrait interpréter comme un poisson surmontant une boule, signe de reconnaissance des débuts de la chrétienté, le poisson ayant précédé la croix comme symbole chrétien; ce pourrait être aussi la marque, cachée à l'origine, d'un ouvrier tailleur de pierres.
Cartulaire du Paraclet
Le village est cité pour la première fois dans
le Cartulaire du Paraclet, c'est à dire, dans le registre où
les religieuses de cette abbaye transcrivaient les dons reçus et notaient
les titres de propriété de cette abbaye fondée en 1130.
Dès 1147, le légat du Pape en dresse une longue liste pour confirmer
les droits des nonnes: des bois à Courgiveaux,
aux Brosses, à Marcilly, à Pouy, à Charmoy. Des terres
à Fontenay le Pierreux, à Bossenay, à Pommereaux. Des
dîmes en nature sur les propriétés de nombreux seigneurs
de la région qui contribuaient au ravitaillement du monastère
en blé, seigle, volailles, viandes ou poissons. S'y ajoutaient de nombreux
biens immobiliers, maisons, moulins, vignes, près ou champs.
Albert Willocx Ces noms évoquent des
terres proches du monastère situé dans l'Aube, dans l'arrondissement
de Nogent sur Seine. Son extension, due à sa renommée, exigea
la création de prieurés dépendant de la maison mère,
dont l'un St Thomas de Laval, prieuré du diocèse de Sens soumis
à l'abbaye du Paraclet établi à Donnemarie en Brie histoire
de la Ville et du Diocèse de Paris
La pratique des dotations aux ordres charitables se prolongera jusqu'à
la fin de l'Ancien Régime, comme l'atteste celle que fit le Marquis
de Guerchy, seigneur de Nangis et de la Chapelle, le 9 mai 1745 à l'Hôtel
Dieu, entre autres: 200 livres de rente foncière
non rachetable à prendre par chacun an sur la terre et la ferme des
Farons, située finage de la Chapelle Rablais, consistant en 120 arpents
de terre et 17 arpents de Blé.
Trouver, dans le dictionnaire topographique du département de Seine et Marne de Hubert et Stein, après Foresta de Herablen, vers 1175 (Poupardin, St Germain des Prés, I, p291), la mention: Capella de Erableyo, 1275, (Cart.Paraclet) pouvait laisser entrevoir un rapport avec un personnage, ou plutôt avec le couple le plus célèbre de l'histoire du Moyen Age.
Il s'agit bien du très scandaleux Abélard et de son épouse Héloïse, chanté par Georges Brassens sur un poème de François Villon:
Dictes moy ou, n'en quel pays
Est Flora la Belle Rommaine,
Archipiades, ne Thaïs,
Qui fut sa cousine germaine,
Echo parlant quand bruyt on maine
Dessus rivière ou sus estan,
Qui beaulté ot trop plus qu'humaine.
Mais ou sont les neiges d'antan?
Ou est la tres sage Helloïs,
Pour qui chastré fut et puis moyne
Pierre Esbaillart à Saint Denis?
Pour son amour ot ceste essoyne...
Mais ou sont les neiges d'antan?
Pour résumer l'épisode célèbre
voici un extrait de l'Encyclopédia Universalis: Après
quelques années de succès paisible, il séduit Héloïse,
fille fort lettrée, nièce du chanoine Fulbert; un fils leur
naît, qu'Héloïse nomme Astralabe; Fulbert les contraint
à un mariage qu'ils veulent garder secret. Héloïse s'étant
retirée au monastère d'Argenteuil, Fulbert la croit répudiée
et fait émasculer Abélard. Les deux époux entrent en
religion, elle à Argenteuil, lui à St Denis.
De sa désagréable mésaventure, Abélard lui même
écrira "Conformément à la
justice, l'organe qui avait pêché est celui qui a été
frappé et qui a expié, dans la douleur, le crime de ses plaisirs."
Hélas, pas d'Abélard à la Chapelle Rablais qui n'a jamais
fait partie des biens du Paraclet, l'abbaye que fonda le mari puis que reprit
sa femme. Notre village n'est cité qu'à cause d'une simple dispute
entre religieux au sujet du droit à percevoir les impôts, comme
le confirme l'extrait provenant de la bibliothèque de Troyes:
Lettre d'ung discord avec le chappitre de Sens:
Girardus, decanus, totumque capitulum Senonense.. Notum facimus, quod, cum
contentio sive discordia verteretur inter nos et sanctimoniales de Paraclito
de decimaria in territorio de Monte Bruleti, de Nangis, et de Monte Dei...
Une traduction rendra plus clair le sens, les lieux cités gardant leur
mystère...
Girard, sizenier, et tout le chapitre de Sens faisons
connaître qu'alors qu'une tension ou un désaccord s'est élevé
entre nous et les religieuses du Paraclet au sujet d'une décision fixant
la dîme sur le territoire du Mont Brûlé, de Nangis et du
Mont de Die.., Les religieuses, par ailleurs, percevront en toute paix et
quiétude la dîme de toutes les terres qui sont par devers le
Mont Brulé comme se réunissent le rû du Bourguignon et
le rû de Spissia Lumbardi continûment et en droite ligne jusqu'à
Plantehart et jusqu'à Charmenta en suivant le chemin jusqu'à
la masure du défunt Tyon et de la masure du défunt Tyon en suivant
le chemin jusqu'à Bordeta et de Bordeta jusqu'à Frantaillia,
aux limites concernant la dîme de la Chapelle Rablais ... seu confinia
decimarie de Capella de Erableyo. Datum anno Domini M° CC° LXXV°,
mense julio. traduction: Mme Antil
L'histoire de la commune
L'histoire de notre commune a été publiée à plusieurs reprises par des érudits comme Michelin en 1829, réédité canton par canton chez Amatteis, Lecomte dans l'Almanach de Seine et Marne de 1909, ou Pignard-Pegnet en 1911. Leur propos était de rédiger, commune par commune, l'histoire de la Seine et Marne. Ils se sont attachés à donner la succession des seigneurs telle qu'on peut la reconstituer à partir des archives antérieures à la Révolution déposées aux Archives Départementales à Dammarie. D'une écriture difficile à déchiffrer, surtout au XVII° siècle, nombre d'entre elles sont heureusement résumées, imprimées, et disponibles en salle de lecture.
Lien vers les documents sur la commune
On peut ainsi y lire, cote B 506-1636: ..La Chapelle
Rablais où existaient deux fiefs, l'un appelé les Moyeux appartenant
à Pierre Lefèvre, l'autre, le Mée l'Archevêque
appartenait à Antoine Saive, consistant en maison manable, grange,
étable, jardin avec cent arpents de terres, bois et prés, droit
de haute, moyenne et basse justice, le tout affermé IX vingt livres
par an... Sur la carte de Cassini ne figure pas de gibet, comme à
St Ouen, près de la Tuillerie ou la Justice de Nangis.
N'ayant pas fait de réelles recherches sur les siècles qui séparent le rôle des vassaux du premier cadastre, permettez- moi de recopier en partie l'article de Maurice Pignard-Pegnet:
...Après cette famille (les
Cornu), les seigneurs de la Chapelle- Arabloy ont eu à enregistrer
les dégâts de la Guerre de Cent Ans accompagnés de l'émigration
et de la ruine. Au XVI° siècle, en vertu du droit du premier possédant,
chacun s'empara de ce qu'il pouvait: celui-ci des Moyeux, celui-là
des Montils, un autre de Tourneboeuf, un quatrième du Mée l'Archevêque,
créant ainsi autant de seigneuries partielles et de fiefs distincts.
Pierre Lefèvre Desclos devint ainsi seigneur des Clos de Fontains et
seigneur des Moyeux où il éleva un château et une chapelle;
un sieur de la Brière occupa les Ménils* avec son château
seigneurial; le Mée l'Archevêque devint la propriété
d'Antoine de Saive, Tourneboeuf celle d'Etienne d'Avran. La famille de la
Brière prospéra aux Montils qu'on appelait la Borde lez Montils.
Cyprien de la Brière réunit en 1747, aux Montils, les fiefs
de Tourneboeuf et des Moyeux.. Le fief de Putemuse, qui appartenait aux religieux
de Sainte Colombe, fut annexé en 1633 par François le Rahier,
seigneur des Bordes l'Abbé. Son fils acheta en 1686 le Mée qu'il
revendit en 1721 à François des Roches-Herpin, seigneur de Bois
Boudran. Le marquisat de Nangis, qui s'était formé en 1612 au
profit d'Antoine de Brichanteau, s'annexa plus tard la seigneurie principale...
Est-ce que cette suite de noms et de dates révèle la transition
entre le temps des seigneurs et celui des bourgeois?
Les réfections des Terriers (1555, 1627, 1650, 1724...), les divers
procès doivent-ils être considérés comme de simples
anecdotes ou des repères? Je n'ai pas découvert les documents
qui permettraient d'éclairer un peu mieux cette période -ou
peut-être n'ai-je pas su les interpréter correctement.
Par exemple, j'aimerais découvrir, un jour, les recherches effectuées
sur le château des Moyeux commandées par l'un de ses anciens
propriétaires, monsieur Vannier.
* Ménil signifiait Moulin. Il en existait trois à l'époque: le moulin à eau de l'abbaye de Villefermoy, un moulin à vent situé sur une petite butte, au bout de l'allée face au château de Villefermoy et un à l'entrée des Montils.
Quelques documents sur l'histoire de la commune consultables aux Archives Départementales, Dammarie :
Terriers dans la section E (E 208 etc..). Almanach de Sens, 1789 pages 34-35. Michelin notes historiques 1829 tome V, pages 1556-1557 réédité chez Amatteis en 1982. Almanach de Seine et Marne 1909. Paroisses et communes de France p 245. Maurice Pignard Peguet, Histoire générale illustrée des départements, la Seine et Marne 1911. Ernest Chauvet Nangis, notes historiques 1910, réédition Amatteis.
Les maux arrivoient tant par les gens mêmes
du Roy que par les Anglois, et estoit la pillerie par toute la Champagne et
la Brie, en telle manière qu'un hommme n'y pouvoit metttre remède.
XV° siècle
Les laboureurs hors d'espérance de pouvoir semer les bleds, les vignerons
de faire leur vendange. XVI° siècle
Toutes les femmes et les filles en fuite, et les habitans restez sans meubles,
ustanciles, vivres et destituez de tout secours spirituel et temporel. Mais,
sur tout les malades languissans, moribons et mourans, sans pain, sans viande,
remèdes, feu, lit, linge, couverts. XVII° siècle
L'Histoire, de la guerre de Cent Ans à la Fronde,
semble être en constante répétition pour le paysan. Il
semble que le cultivateur cherchait à subsister, à survivre,
entre deux catastrophes.
Son exploitation a été rançonnée par les guerriers
de tous les aveux, par des compagnies de soldats ou de brigands. Une année
sur trois, pendant cette période, a été année
de guerre. Les paysans briards ont vite appris à fuir ceux qui les
pillaient et dont le combat les concernait si peu.
La forêt a dû être leur meilleure protection, après
même que la construction des remparts de Nangis en 1544, sous François
1° à cause de plusieurs larcins, vols, pilleries,
rançonnements, violences de filles et autres efforts et violences qui
se commettaient chaque jour audit bourg de Nangis. Nangis,
notes historiques
La Chapelle Rablais n'est pas citée parmi les nombreux villages touchés
par les pillages. Sa situation éloignée des grands chemins,
l'isolement procuré par la Grande Haye (ou l'absence de documents)
peuvent l'expliquer.
La situation des paysans de cet âge classique rappelle étrangement celle des populations des pays d'Afrique, d'Asie... poussés à la limite de la survie par faits de guerre ou de climat. Si la guerre s'est éloignée, si le climat s'est adouci, si les invasions de rats, de loups, la peste et autres épidémies, la famine ont cessé de préoccuper le paysan briard, essayons d'imaginer avec quelle angoisse ont dû être vécus les mois de "soudure" entre deux récoltes. Comme elle offrait la sécurité contre les pillards, la forêt a dû permettre la survie pendant les périodes de disette, quitte à manger racines et glands au risque de mourir du "Trousse Galant".
Un exemple de changement de propriété pendant la guerre de Cent Ans: l'inventaire des Clos établi, peut-être, pour payer la rançon de Tristan de Maignelay, capturé à la bataille de Poitiers en 1356, alors qu'il portait la bannière du fils de Jean le Bon, duc de Normandie. Souvenez-vous: "Père, gardez-vous à droite, Père; gardez- vous à gauche..."
"L'Ostel appelé des CLOZ, c'est assavoir une grant sale contenant trois chambres dessus et deux dessoubz. Item, un grand grenier et étables dessoubz, une chapelle, cuisinne et despence dessus joignant ausdictes chambres et sale. Item, une granche à dix travées couverte en tuille. Item, le colombier tournant à eschiele à roue bien peuplé de coulombs. Item, une maison contenant deux chambres et une cave dessoubz à dix pas de degrez, un gelinier et dessoubz une estable à mettre pourceaux, cloz à murs tout entour le pourpris et trois jardins emprès. "
La Révolution
On se souvient des tableaux d'histoire Rossignol, dans leur
cadre en bois, que l'instituteur montrait à chaque nouvelle leçon
d'histoire. Celui de la Révolution française présentait
la Prise de la Bastille: canons, fumée, et têtes au bout de piques.
La situation semble avoir été plus calme dans notre région.
Si, à Echouboulains, le curé se plaignit des tracasseries de
certains bûcherons, il n'a pas pour cela connu l'échafaud, ce
qui fut le cas du curé de St Barthélémy, vers la Ferté-
Gaucher; pas plus que n'eut à souffrir le marquis de Nangis, M. de
Guerchy qui, malgré quelques procès et dons forcés, aurait
conservé château et fortune si sa manufacture de coton n'avait
pas périclité. Les habitants de Nangis et peut-être de
la Chapelle Rablais qui avait fait partie du marquisat de Nangis, allèrent
même en délégation le sortir des prisons républicaines
de Melun où il avait eu à répondre de l'émigration
de sa famille. Personne ne songea à effacer les armes des anciens seigneurs
de Nangis gravées dans la cour de ce qui est aujourd'hui le café
du village: "d'azur à six bezans d'or". Elles y sont toujours.
Quant au curé, sa présence fut toujours souhaitée: "...Les habitants de la Chapelle Rablais surent bien, au mois de mai 1793, manifester leur volonté à l'égard du culte catholique. Ils consentirent à la répartition, entre eux, d'une somme de 60 livres pour le loyer de la maison occupée par le curé, mais ils refusèrent d'accepter la réunion de leur paroisse à une autre paroisse 2." Ils demandèrent, en termes menaçants, au Directoire du Département, la construction d'un presbytère à leur profit..."3 En 1787, Ponce Péchenard, après avoir racheté 1000 livres sa cure à Nicolas Pailla, son prédécesseur, ne dut pas être dérangé, ayant prêté serment à la Constitution.
Des propriétés changèrent de mains. Les émigrés et le clergé se firent confisquer leurs biens: la famille Sigy perdit un peu moins de 35 hectares; les fabriques 4 des églises de la Chapelle et Fontains se trouvèrent ruinées. La cure gérait environ 60 arpents à la Chapelle. Bien qu'ayant été vendue 9.000 livres tournois à François le Rahier, la ferme de Putemuse, 240 arpents se vit confisquée parce qu' appartenant à Sainte Colombe de Sens.
De cette époque date aussi la nationalisation des "bois de la ci-devant abbaye de Barbeau appelés forêt de Villefermoy" 5 d'une contenance de 2650 arpents, 83 perches soit 1344 hectares; ainsi que ceux de la "ci-devant abbaye de Preuilly appelés bois d'Echoux, situés commune d'Echouboulains" dont le bois d'Echou de 218 hectares et celui de l'Etançon de 49 ha.
1 dans Essais historiques et statistiques sur le Département de Seine et Marne, Michelin 1829, réédition Amattéis 1982
2 Fontains
3 M. Lecomte dans l'Almanach de Seine et Marne 1909 pp 189 à 207
4 la Fabrique d'une église était “Tout ce qui appartient à une église paroissiale, les fonds et les revenus affectés à l'entretien de l'église.../... les marguiliers chargés de l'administration des revenus et des dépenses d'une église” Littré 1863
5 L'abbaye de Villefermoy était une "grange", une annexe, de l'abbaye de Barbeau, sur les bords de la Seine.
Les champs et les bois
Plus de cinq cents ans séparent les deux périodes
que je développe plus longuement dans ce livret grâce à
des documents originaux: le défrichement moyen-âgeux et le XIX°
siècle. Le saut dans le temps est moins brutal qu'il peut y paraître.
Les rapports entre les hommes ont évolué, les techniques de
même; pourtant il me semble que le dessin des champs des petits propriétaires
du XIX° siècle était déjà tracé au
Moyen Age: on retrouve dans le cadastre napoléonien les parcelles longues
et étroites dues au défrichement puis au mode d'exploitation
des terres:
...Suivons des yeux un laboureur. Ses boeufs avancent
lentement, ses chevaux, s'il est un peu plus riche pour en avoir, vont un
peu plus vite. Mais on dirait que le sillon qu'il trace n'en finit pas. C'est
seulement lorsqu'il arrive à la limite de son territoire mis en culture,
après avoir avancé sur cent mètres ou même plus,
que nous le voyons accomplir, non sans difficulté, un demi-tour...
Son champ est très long mais très étroit; et puisqu'il
n'est bordé par aucune clôture, il n'en connaît guère
la largeur que par le nombre de sillons qu'il a le droit d'y tracer.
Cet extrait de "la vie quotidienne en l'an mille" ne pourrait-il
s'appliquer au travail du petit paysan neuf siècles plus tard? Notons
que le nom de la ferme de Tourneboeuf peut avoir un rapport avec ce mode de
culture.
Un archéologue pourrait certainement, au vu du parcellaire ancien,
retrouver les trois soles correspondant à la rotation des cultures
sur trois ans pratiquée depuis le Moyen Age jusqu'au siècle
dernier: saison des bled: blés d'hiver, Mars: céréales
de printemps et jachères: années où on laissait reposer
la terre.
La plupart des petites parcelles a disparu bien avant le remembrement de 1966/69
comme sont en train de disparaître les arbres à cidre, pommiers,
poiriers, qui bordaient les chemins. Mais on peut encore découvrir
çà et là les traces d'une autre habitude de culture:
"En la Brie, où sont les
terres gloizes * et humides, on laboure en talut comme en dos d'âne;
et tient- on entre cinq rayons un scillon plus large, dressé aussi
en talut pour recevoir les eaux, tant de pluye de du dessous du guéret
qui est toujours humide. Et pour ce mesme effet sont au bout des terres certaines
levées assez hautes, où il y a entre ladite levée et
pièce de terre, une fosse faite au propre comme une longue cuve pour
recevoir les eaux qui s'escoulent des grandes pluyes; autrement, elles pourriraient
et suffoqueraient le grain; cela nuyt aux passants par ce pays: c'est pourquoy
l'on nomme les Sautereaux de Brie" XVII° siècle.
Abbé Denis, lectures sur l'histoire de l'agriculture
* terre gloize, glaise ou glatte: autres noms de
l'argile, d'où dérive le nom de Glatigny qui est sur un banc
de marne.
Parmi les quelque 200 mares qui figurent sur le cadastre ancien, quelques unes avaient encore cette forme allongée à l'extrémité des champs. Il en subsiste encore.
Les archives communales conservent un Registre des renseignements statistiques concernant les productions agricoles de 1857 à 1865. Sa reproduction intégrale serait très intéressante car on y détaille, pour chaque type de produit, le nombre d'hectares cultivés, le rendement, le prix moyen et un jugement sur la qualité de la récolte. Il est dommage que ce registre ne fasse pas la part des productions destinées à la vente et celles réservées à la consommation courante. Nous aurions pu y voir si les petits propriétaires d'alors pouvaient avoir des productions autres que vivrières. Si on écarte les cultures de peu d'extension, les bois et les 48 hectares de prés naturels situés dans les parties basses inondables et donc hors des rotations de cultures, on peut diviser le territoire de la commune en quatre parties d'environ 150 hectares. 140 hectares étaient occupés par les prés artificiels, deux parties étaient réservées aux blés dont l'une de 180 hectares au froment, la dernière partie était en jachère morte, autrement dit la terre reposait sans culture pendant une année ou plus. Le sarrasin n'est pas signalé, alors qu'en 1889, l'instituteur notera qu'il sert d'aliment pour l'élevage de faisans.
Le Registre signale 151 bovins et 970 ovins. A cette époque, 700.000 moutons parcouraient la Brie. Les recensements de conscrits notent 9 bergers sur 140 jeunes gens de la commune. On ne compte, bizarrement, que 25 cochons alors que, traditionnellement, chaque famille engraissait un goret. Le gros bétail devait pâturer dans les près et les moutons, regroupés sous la garde de bergers rétribués par la collectivité, devaient brouter les jachères. Peut- être avait- on encore l'autorisation de pratiquer la "vaine pâture", le droit de faire paître les bêtes sur toute l'étendue du territoire après les récoltes. Le registre signale qu'elle est abolie. En 1840, la pâture fut à l'origine de la révocation du garde champêtre, Simon Petit ...qui, contrairement à ses devoirs avait compromis plusieurs par ses faux rapports en les excitant lui même de faire paître leurs bestiaux dans des lieux non communs ... et avait ensuite verbalisé contre ces personnes. Registre des délibérations
A noter que la betterave à sucre n'est pas cultivée;
la sucrerie de Nangis ne fonctionnera qu'à partir de 1873. Il est possible
que la traction bovine et les labours profonds nécessités par
la culture des betteraves soient étroitement liés ainsi que
le suggérait le suggérait monsieur Giboux, ancien maréchal-ferrant
de Rampillon. Le Registre Statitique ne mentionne aucun boeuf de même
qu'aucun bouvier n'est cité à cette époque.
L'inventaire en 1918 de la ferme des Montils ignore les boeufs alors que le
catalogue pour la vente des Moyeux vers 1920 montre l'existence d'une “bouverie
pour douze boeufs charolais, et une vacherie où se trouvent 50 vaches
normandes”.
D'où l'interrogation sur la date de construction du
"travail" de maréchal ferrant, destiné au ferrage
des chevaux, mais surtout des boeufs: il suffit de noter à quelle hauteur
se trouve le joug de tête pour se rendre compte qu'il aurait été
inutile au maintien d'un cheval qui n'a pas besoin d'être entravé,
à la différence du bovin qui doit être maintenu par des
sangles. Les plans anciens n'en portent pas la trace évidente. Il n'est
pas mentionné dans les documents, n'étant à l'époque
qu'un outil.
Sa mise en valeur le révèle comme un rare objet du patrimoine
puisqu'il semblerait qu'il n'en subsiste que deux sur le territoire de la
Seine et Marne.
La forêt
Deux villages au centre de deux clairières. Nous sommes revenus, sept cents ans après, à la situation initiale du Moyen Age. Et pourtant, il a été possible de se rendre de la Chapelle à Nangis sans traverser de bois. Leur nouvelle extension est récente et mesurable comme l'indique le graphique des pourcentages par rapport à la superficie totale de la commune, à l'inverse de l'évolution de la superficie du territoire boisé pour la France. ( 80% du territoire était boisé en 3000 avant JC, au 1° siècle: 50%, 17°s: 25%, début 19°s: 15%, actuellement: 26%. dans Duby, histoire de la France)
Il faut se rappeler que, pendant longtemps, le bois a été
le matériau le plus utilisé: pour le chauffage, évidemment,
mais aussi pour la construction de charpentes et des murs à pans de
bois que l'on appelle aussi colombages, murs fréquemment construits
dans les parties les moins nobles de la maison traditionnelle; on l'utilisait
aussi pour les charrettes, outils, chaussures, bateaux...
Dès la période de la guerre de Cent Ans, des mesures ont été
prises pour l'exploitation rationnelle des futaies; plus tard, Colbert obligera
les communes à réserver intact le quart des bois, entre autres
mesures de protection. Nous en avons la trace pour la forêt maintenant
domaniale sur Coutençon. Ces mesures de protection avaient pour but
de réserver de grands fûts pour la construction navale: un chêne
ne doit être coupé qu'au bout de 150 ans.
Peut être ces mesures servaient- elles à prévenir des abus: le paysan ne se contentait pas de ramasser des bourrées et son bois d'oeuvre, il y faisait souvent pâturer ses bêtes et coupait des baliveaux qui servaient de fourrage. Cette pratique est attestée par l'autorisation donnée aux paysans en 1893, année de grande sécheresse, de faire pâturer leurs vaches dans la forêt domaniale. En 1860, une demande de Renseignements sur les Redevables du Trésor ne relève pas moins de dix délits dans la forêt de l'Etat.
La comparaison entre la carte de Cassini datant du milieu
du 18° siècle et la carte d'Etat Major de 1889 montre l'extension
des bois entre la Chapelle et Fontains, entre notre commune et celle de Fontenailles.
Sous l'Ancien Régime, on pouvait se rendre dans ces villages sans traverser
de forêts, ce qui n'est bien sûr plus le cas maintenant, ni à
la fin du siècle passé.
Si, de nos jours, les forêts sont sources de loisirs, il y a cent ans,
leur extension a été ressentie tout autrement par la grande
majorité de la population, encore très agricole qui voyait,
dans la réduction progressive des terres labourables, la perspective
du manque d'emplois dans la commune et l'obligation d'aller chercher un travail
d'ouvrier dans une ville.
L'exode rural au cours du XIX° siècle s'est traduit par une baisse
de la population qui est passée de 563 en 1856 à un minimum
de 292 avant la récente création des lotissements.
Le 31 octobre 1789 Les principaux habitants
de la Chapelle Arablay, près de Nangis en Brie, élection de
Montereau, supplient très humblement Messieurs les vénérables
membres de l'assemblée nationale d'écouter favorablement leur
supplique.
Depuis plusieurs années, différents propriétaires de
biens dépendant de notre paroisse laissent volontairement la plus grande
partie de leurs terres en friches et d'autres propriétaires font planter
une grande partie en bois. Comme une telle conduite est très répréhensible,
vu qu'elle est très préjudiciable au bien général
et qu'elle fait éprouver des torts réels et des pertes sensibles
à notre paroisse, les-dits habitants osent supplier très instamment
vos augustes personnes d'interposer leur authorité et ordonner aux
propriétaires des biens dépendant de la Chapelle Arablay, de
les faire valoir où de les louer à un prix raisonnable et de
leur défendre expressément de faire planter leurs terres en
bois, et vous ferez justice.
Rousseau, sindic; Cavillieu, Denis Toussaint Félix, Vourrel, Henri
Denis Félix, Lémaignan.
Malgré l'opposition des petits exploitants, les terres cultivées ont été replantées en bois par les gros propriétaires. Les châteaux (les Moyeux, Champ Brûlé, Bois Boudran..) n'étaient que les résidences campagnardes de ces riches aristocrates. Elles étaient destinées au plaisir de la chasse .
Malgré l'opposition des petits exploitants, les terres cultivées ont été replantées en bois par les gros propriétaires. Les châteaux (les Moyeux, Champ Brûlé, Bois Boudran..) n'étaient que les résidences campagnardes de ces riches aristocrates. Elles étaient destinées au plaisir de la chasse . Ils ont préféré étendre leur domaine giboyeux plutôt que de cultiver des terres d'une rentabilité moyenne: elles sont trop humides et nécessitent de gros frais de drainage; de plus, avant la myxomatose, les invasions de lapins réduisaient encore les rendements.
Situé au centre d'une région
de grandes et belles chasses giboyeuses, les Moyeux est une des plus remarquables
entre toutes. On tuait et on tue chaque année: 4.000 lapins de garenne,
1.000 faisans, 250 lièvres, 600 perdreaux, 50 chevreuils, des cerfs
et des sangliers.
Le domaine est doté à cet effet d'une organisation bien comprise:
centres d'élevage de gibier, de repeuplement et postes de garde. Le
principal élevage, la faisanderie, est située à proximité
du château, juste à la limite du parc...
Un des avantages de la chasse des Moyeux réside dans le fait qu'elle
n'est pas isolée. Le domaine s'encastre en effet au milieu d'autres
domaines giboyeux. Voulez-vous connaître ces voisinages, en partant
du nord pour faire le vaste tour du propriétaire? La propriété
de Mme Chennevières; les Brûlis à M. Berseon, le domaine
des Bordes à M. Dutey Harispe, le domaine de Cotanson à M. de
Cernay, la forêt domaniale de St Germain Laval, les terres de la ferme
des Gargots à M. Touchart, la forêt domaniale de Villefermoy,
la propriété de M. Emile Tancelin, la propriété
de M. Le baron Hottinger. Non loin aussi est la célèbre chasse
de Bois Boudran.
Ainsi était décrite la chasse des Moyeux dans le catalogue d'une
vingtaine de pages pour sa vente, vers 1920.
(Sur la carte de la page précédente, on devine
la part qui restait aux paysans du village. Le plan des petites parcelles
qui ouvre le chapitre consacré aux temps modernes s'encastre presque
parfaitement dans les blancs.) Denis Toussaint Félix, maire de la commune
et figurant parmi les plus imposés ne possédait que les champs
disséminées qui figurent sur la carte. Les riches se partageaient
la plus grande partie des bonnes terres, tous les bois, négligeant
les fonds de rus trop humides. Ils avaient la possibilité d'utiliser
les machines modernes que le comte Greffulhe préconisait et dont il
organisait, à Bois Boudran, des expositions et démonstrations.
Les Moyeux, dont le domaine atteindra plus de 1.000 hectares possédaient
2 charrues butteuses,5 charrues araires, 5 brabants, 8 jeux de herses en fer,
2 croskill, 6 rouleaux, 2 distributeur d'engrais, 6 semoirs,6 faucheuses en
vert, 3 faneuses à râteaux, 5 moisson-neuses lieuses, 1 batteuse
botte- leuse électrique... 30 chevaux et 12 boeufs charolais...
"Considérant que plusieurs gardes de M. Greffulhe font journellement sur les chemins de la commune et auprès des habitations, au moyen de cors et de fouets, un tapage assourdissant de nature à nuire à la tranquillité publique... il est expressément interdit ... aux gardes de M. Greffulhe et à tous autres qui seraient tentés de les imiter, de faire, soit de jour soit de nuit ... aucun tapage qui soit de nature à occasionner des accidents ou à troubler le repos et la tranquillité publiques."
Dans la première édition des documents sur la commune, je n'avais pas donné d'importance à cet extrait du registre des arrêtés du maire de 1886, pensant qu'il ne s'agissait là que de joyeux fêtards. La découverte, grâce à une férue d'histoire locale, des articles du Père Gérôme, lève le voile sur ce texte administratif. Le comte Greffulhe, dont l'épouse, la princesse Caraman-Chimay servit de modèle à Marcel Proust pour Madame de Guermantes, partisan des méthodes d'exploitation agricoles modernes, député de Melun, se révèle étrangement féodal dans ses relations avec le menu peuple qui habite ses domaines et les alentours.
"Vous plairait-il, ce matin, de venir faire un tour de chasse? me demande-t'on. (Des paysans de Glatigny) On décroche les fusils, on siffle Duchesse, une jeune chienne, et l'on part... (sur une parcelle appartenant aux fermiers) Mais voici que tout à coup, sort d'une hutte et accourt au grand trot, un garçon de ferme armé d'un fouet et qui, bien avant que nous y soyons arrivés, fait le tour de notre pièce en claquant à coup répétés. Une volée de perdreaux se lève...Nous nous dirigeons vers une autre pièce et d'aussi loin que nous apparaissons, voilà le même manège qui recommence: un autre garçon sort d'une hutte et bien vite fait le tour de la pièce en claquant son fouet comme s'il conduisait un troupeau de deux cents vaches à l'abreuvoir.Et mes deux amis m'expliquèrent que chacune de leurs pièces de terre était ainsi gardée par un homme qui, de toute la sacro-sainte journée, n'avait que cette besogne: chasser le gibier des pièces où il se pose, aussitôt que le propriétaire arrive pour le tirer... Le bien des petits cultivateurs est fait pour être mangé par le gibier de monsieur le comte, mais le gibier de M. le comte ne doit être tué que par lui seul." Extraits d'articles du journal le Briard, 1892, signés le père Gérôme, de Glatigny
Le conseil municipal a essayé de s'opposer aux abus
du comte Greffulhe qui ne possédait que peu de terres sur le Chapelle.
Mais comment résister au châtelain des Moyeux?
Certains furent bienveillants comme M. Debrousse, fondateur de l'hospice qui
porte son nom ou Mme Rigaud qui dota les jeunes mariées, releva la
chapelle et les croix des carrefours; d'autres se révélèrent
bien mesquins comme celui qui consentit à payer une partie de la pompe
à incendie à la condition qu'elle reste au château...
Les chemins
..."Parmi les hautes et puissantes considérations
qui déterminent les membres du Conseil Municipal à voter la
confection prompte et urgente dudit chemin, c'est l'état affreux des
chemins qui conduisent à Nangis et à Fontainebleau et qui paralysent
l'industrie agricole et commerciale; une route de grande communication sortirait
de la misère et de la détresse un climat tout entier, un canton
de la Brie qui, jusqu'à présent a été oublié
et qui cependant mérite toute la protection de l'administration.
Les terres ne demandent que de bons chemins pour s'enrichir des engrais des
villes; la carrière de grès des Montils et de la Chapelle Rablais,
les superbes et précieuses forêts de Villefermoy appartenant
à la liste civile s'exploitent difficilement à défaut
de chemins praticables, celui projeté doit leur donner une nouvelle
vie et une double valeur; les vignobles de Machault et de Féricy et
du Gâtinais verront avec le plus grand intérêt s'ouvrir
un nouveau débouché pour leurs vins; en un mot, les pays traversés
par la route de grande communication verront s'accroître leur prospérité
et les villes de Nangis et de Fontainebleau gagneront considérablement
à cette nouvelle voie qui les alimentera de céréales,
de bois et des produits des autres climats.
Qu'il plaise à l'administration, au conseil d'arrondissement et au
conseil général de jeter un coup d'oeil sur la carte du département,
ils verront partout des routes départementales, des chemins de grandes
communications traverser de riches contrées et dont nous avons contribué
de nos centimes à leur confection; aujourd'hui, nous réclamons
à notre tour, il est temps de s'occuper d'une contrée du Département
qui ne demande que justice et protection pour sortir de cette triste position...
fait et arrêté en séance le 8 juillet 1838 et ont tous
les membres signé à l'exception du sieur Enguerrant qui a déclaré
le ne savoir.
La création de chemins praticables a été au centre des préoccupations de la Municipalité à partir de 1835. Des routes au tracé rectiligne ont été créées pour remplacer ces chemins qui laissaient les chartiers en souffrance par les obstacles qu'éprouve la libre circulation pendant les trois quarts de l'année. Essayez de suivre le trajet de l'époque pour vous rendre à Nangis; le chemin existe encore, il passe entre la ferme des Moulineaux et les premières maisons du village. Imaginez l'emprunter en hiver, parmi les ornières avec une charrette lourdement chargée! Une patache a peut- être desservi quelques villages avoisinants, mais aucune diligence n'a jamais dû s'aventurer sur ces chemins défoncés. Les relais de Poste sont bien connus et ne jalonnent que les grandes voies; sur la route Paris Bâle: Guignes, Mormant, Nangis, Maison Rouge, Provins....
Voir la page sur les chemins du dossier "Thiérachiens"
Les passeports pour l'intérieur
Quelques Passeports pour l'Intérieur sont conservés dans les archives de la mairie. Il s'agit de sortes de cartes d'identité que devaient présenter ceux qui avaient à voyager, du marchand de sangsues, au curé de la paroisse allant visiter son village natal ou au comte Just Faÿ Latour Maubourg se rendant à Paris.
Voir le chapitre sur les passeports
Les maisons
Le village, s'il était à la frontière de deux provinces au Moyen Age, l'une à l'Est, l'autre à l'Ouest, se trouve aussi à la limite entre deux styles de construction traditionnelle, la séparation étant Nord/Sud. Un peu plus au midi, vers Echouboulains, on trouve en grand nombre de petites maisons à nervures de briques 1. Plus au nord, les arêtes sont en grès. Une promenade dans le village permet de rencontrer autant de grès que de brique. Peut- être ce dernier mode de construction correspond-il plus au style de la fin du siècle passé: s'il fallait faire quelques kilomètres pour trouver des briqueteries 2, le grès s'extrayait directement dans la commune. Les constructeurs traditionnels, s'ils avaient pour eux le temps, évitaient les longs transports sur des chemins boueux.
Comme maintenant, les maisons étaient construites
en fonction des fortunes. Les plus pauvres devaient être les vieilles
gens; quelques toutes petites maisons ont dû être construites
à l'intention de ceux qui ne pouvaient plus habiter chez leurs enfants;
on les appelle des “maisons de vieux”.
L'ouvrier agricole habitait dans une "bricole", telle celle qui
fait l'angle, face à l'église prévue pour deux manouvriers.
Un peu plus riche, on faisait construire une maison à étage,
pignon sur rue ou sur cour, comme on trouve au centre du village où
les fermes à cour carrée ont peu à peu disparu avant
la guerre de 1914, comme celle qui a laissé la place au café
actuel.
La fin du siècle passé nous a laissé quelques "belles
maisons" dans un style que l'on retrouve aussi bien à Deauville
qu'à Arcachon, construites par l'ancêtre du maçon actuel.
Elles se distinguent d'autant mieux des maisons traditionnelles qui les entourent
qu'on les a le plus souvent couvertes d'ardoise. Le clocher de l'église,
reconstruit en 1859 a lui aussi droit à cette distinction.
Les écoles (1874 pour le chef- lieu, 1882 pour le hameau) ressemblent
à toutes les écoles construites à cette époque,
dans le même style fin du XIX°. Les habitants de Montils, certainement
jaloux de ceux du chef- lieu qui, bien que moins nombreux à l'époque,
avaient la mairie et une école en trois travées, ont dû
compenser ce manque d'honneur par l'érection d'un clocheton supplémentaire.
Non compris au devis, il en coûta 1.120,61 francs de plus.
Pour découvrir les plus belles demeures, il faut sortir du village...
1 c'est à dire que les lignes architecturales à renforcer: angles, ouvertures, étages, sont constituées de briques, les intervalles étant maçonnés avec la pierre locale, ici de la meulière jointoyée différemment suivant l'importance du pan de mur: recouverte de "plâtre gros" ou d'enduit chaulé lissé pour les façades, laissée à "pierres vues" pour les parties moins prestigieuses du bâtiment.
2 à St Ouen, lieu dit la Tuillerie en allant vers Lady; voir la carte de Cassini.
3 par exemple le café actuel est l'un des bâtiments d'une ferme transformée en 1914
Les Moyeux
Construite à l'écart des maisons paysannes,
on trouve toutes les lieues environ, une résidence campagnarde, un
château: Bois Boudran, Champ Brûlé, les Moyeux, la Vénerie,
les Bordes. Des rendez- vous de chasse sont aménagés, comme
aux Clos ou la villa Putois, la ferme des Moulineaux. La plupart des châteaux
ont été reconstruits au siècle dernier. Les Moyeux, au
milieu de la clairière, d'où son nom, doit son aspect actuel,
non au comte Latour Maubourg, mais à son successeur, M. Lemaire Marie
Claude qui fit abattre en 1849 la maison cadastrée C 17 taxée
à 200 francs de revenu pour faire édifier en 1852 un château
rapportant 450 francs de revenu à la Commune, matrice cadastrale
C'est maintenant un château tout blanc, du temps
de Louis Philippe, qui se dresse sur la douce inclinaison d'une pente boisée,
dans l'encadrement d'alignements de grands arbres et de futaies, précédé
de parterres à la française. De tous côtés s'ouvrent
de grandes échappées sur la plaine d'où le regard embrase
ici des paddocks, là les vastes champs où les attelages assurent
le productif labeur de la terre. A l'image des domaines des gentilshommes
du XVIII° siècle, prairies et cultures se joignent harmonieusement
jusqu'aux abords de la demeure, ajoutant l'intérêt, l'action
et la vie d'une exploitation de culture et d'élevage et d'une chasse
giboyeuse, à l'adorable tableau des architectures de verdures et de
fleurs. Ainsi s'ouvrait le livret d'une vingtaine de pages édité
pour la vente de la propriété vers 1920. Y sont longuement décrits
les vingt cinq hectares de parc, l'orangerie, les serres, le haras, la ferme
de Toumeboeuf et les belles et grandes chasses. A.
Maumené Les Moyeux, prêt Amatteis
Il existe peu de documents sur le château des Moyeux,
on pourrait retrouver la liste de ses occupants en dépouillant les
Pouillés où l'on trouve Les Moyeux, paroisse
de la Chapelle Rablais, chapelle domestique dans le château qui appartenait
à M. de la Brière inscriptions
du diocèse de Sens, ou les Terriers comme: Roole
des nobles demourant en dedans des terres dépendant du marquisat de
Nangis... le dixième jour defebvrier, l'an mil cinq cent soixante et
dix neuf: ...le sieur Damours demeurant en son fief, terre et seigneurie de
la Borde des Montilz, en la paroisse de la Chapelle d'Arablay. E.
Chauvet.
Les châtelains, depuis la Restauration, ont souvent été
maires: Just Fay Latour Maubourg, né à
la Motte Drôme le 8 juin 1774, officier et aide de camp, chevalier de
Malte, lieutenant des gardes du corps, campagne de Luxembourg... armes: de
gueules à bande d'or chargée d'une fouine d'azur, notes
biographiques, manuscrites, Archives 77 propriétaire à
Courpalay et la Chapelle Rablais fut nommé maire par le préfet
en 1830 jusqu'en 1835. Messieurs Lemaire, Debrousse, Rigaud, le furent aussi.
On trouvera plus facilement la trace des hommes que des bâtiments, cependant,
on peut avoir une petite idée de l'aspect du château d'après
le plan d'Intendance. Il existe, au château un immense plan des terres
qui avait été prêté pour l'exposition des archives
de la commune en 1984.
En 1823, l'instruction était
donnée aux enfants dans une maison particulière louée
à cet effet. Cette maison qui existe encore actuellement, mais qui
a subi des restaurations et des transformations assez importantes est située
derrière l'église; elle ne comprenait alors qu'une seule pièce
servant à la fois d'école, de cuisine, de salle à manger
et de chambre à coucher.
La seconde habitation affectée à l'enseignement se voit encore
aujourd'hui à peu près telle qu'elle existait autrefois, dans
la partie orientale du village. Elle était composée de deux
pièces, l'une, la chambre à coucher, l'autre, l'école,
la cuisine et la salle à manger. Ce bâtiment constituait aussi
une propriété particulière louée à la commune
pour y recevoir ensemble les garçons et les filles. Le troisième
local appartenait à monsieur Félix. Il s'élevait sur
l'emplacement de la maison commune actuelle. Cette fois, la classe et le logement
de l'instituteur étaient séparés. monographie
de l'instituteur, M. Martin, 1889
Les lois Guizot obligeaient les communes de plus de cinq cents habitants à
entretenir une maison d'école. Celle qui fut achetée était
une maison couverte de tuile, sise au lieu de la Chapelle-
Rablais, contenant deux travées de bas logis, l'une servant de chauffoir
où il y a four et cheminée, grenier au dessus, l'autre servant
de grange, une petite laiterie en appentis au couchant.. L'école
servit aussi de salle de réunion pour la mairie et de salle des ventes
pour le notaire. La propriété fut agrandie par l'achat de la
maison de l'instituteur Gasc qui partait en retraite
Composée de deux chambres à feu, une
autre chambre servait de boucherie, un cellier, une grange y attenant, un
cour, un puits, et la cour entourée de murs, le tout couvert de tuiles,
pour servir de maison d'école et de logement pour l'instituteur .
On peut imaginer la vie quotidienne dans cette petite “bricole”,
entre le four à pain niché dans la cheminée, les rares
pièces à feu et les appentis rajoutés ça et là.
Le salaire du maître d'école était en partie versé
par les familles par la contribution scolaire: un élève apprenant
à lire versait 0,75 francs par mois, calcul et lecture se payaient
un franc; 1,25 F pour les plus grands. La part des enfants de familles indigentes
et le complément pour un salaire presque décent était
versé par la commune qui trouvait là un moyen de pression considérable
sur les instituteurs. Deux au moins furent contraints de quitter la commune
parce qu'ils avaient cessé de plaire.
La nécessité d'une nouvelle construction se
fit sentir en 1866 . Des projets virent le jour qui ne purent être réalisés
à cause de la guerre de 1870; non que la commune ait connu d'autres
atrocités que la réquisition d'une vache et d'autres fournitures,
mais le paiement des indemnités de guerre mit à sec le budget
communal pendant au moins deux années. Le 16 octobre 1870, on discute
de la répartition à faire de la somme
de 164.737 francs qui tombe sur l'arrondissement de Provins, qui est engagé,
pour éviter des représailles, à payer sa portion dans
le délai de six jours. La commune paya alors 1.359,60 francs.
Le 8 janvier 1871, le département étant imposé pour un
million, la part de la commune s'élèvera à 3.134 francs.
Après avoir hésité entre la restauration des deux petites
maisons existantes et la construction sur le même emplacement d'un bâtiment
neuf, le projet se concrétisa enfin en 1874. Le mobilier fut acheté
en 1875; il s'agissait alors de six longues tables par classe, chacune mesurant
3,60 mètres. Le système de chauffage fut payé par le
comte Greffulhe de Bois Boudran, partisan de l'éducation populaire:
il avait fondé l'école d'enseignement mutuel de Nangis et possédait
du matériel agricole moderne de démonstration à la ferme
de son château. Garçons et filles occupaient des classes et des
cours de récréation différentes. La classe actuelle était
celle des garçons. Les fillettes avaient droit à des cours de
couture dispensés par des maîtresses spécialisées;
les petits garçons ont échappé en 1907 à une société
scolaire de tir, refusée par la Mairie. C'était l'époque
où les élèves maniaient des armes en bois et apprenaient
à nager sur des tabourets.
L'aspect probable de la classe des filles est donné par plusieurs textes
étrangement semblables, des rédactions du cours de "style"
conservées, avec d'autres devoirs, dans de gros cahiers appelés
cahiers de roulement. Quelques années avant les lois laïques de
Jules Ferry, voici comment était décrite la classe des filles
(actuellement, salle de réunions de la Mairie)
Georgina Michaut, école de filles
de la Chapelle Rablais, le 17 octobre 1877.
Nous entrons à l'école avant l'arrivée de notre maîtresse.
Faisons un petit voyage autour de l'école. Le premier objet qui frappe
la vue, c'est le Christ, au dessous, c'est le tableau noir muni des exemples
que nous aurons à suivre pendant la journée; il est déjà
rempli ce qui nous prouve qu'une main active l'a préparé dès
le matin. Au dessous, c'est le bureau de notre maîtresse; que de paroles
encourageantes elle nous dit en un jour! ... A gauche du bureau est le calendrier,
ensuite, le tableau de répartition trimestrielle des matières
de l'enseignement plus loin est l'emploi du temps. Sur la façade du
midi est l'horloge, dessous la carte de France. Que j'aime voyager à
l'aide de cette carte! Au dessous est le tableau noir. Pauvre tableau, que
de pleurs tu m'as fait verser! Dans l'angle se trouve le poêle... Sur
le mur du levant se trouve la carte de la mappemonde, au dessous le tableau
noir, plus loin est la carte de l'Europe. Sur la partie Nord est la carte
de la Palestine, puis la carte du département... Sur la partie du couchant
est la carte du canton de Nangis à côté est la statue
de la Sainte Vierge. Qui se met sous ton pieux asile ne faillira pas! Au dessous
de cette statue est le tableau d'honneur. Que mes parents sont heureux quand
ils savent que mon nom y est inscrit! Mais chut! Voilà notre maîtresse.
Silence!
La création au chef-lieu d'une école à
deux classes fut un mauvais calcul. Elles ne fonctionnèrent simultanément
que pendant huit ans. Dès 1881, les parents d'élèves
des Montils exigèrent une école pour leurs enfants qui étaient
obligés de faire plusieurs kilomètres à pieds pour se
rendre en classe. Une école leur fut construite en 1883. A cette date,
on ferma donc la deuxième classe de la Chapelle qui fut louée
ensuite, puis laissée à l'usage du garde- champêtre. La
mixité n'étant pas de coutume, la classe des Montils avait été
prévue pour que garçons et filles ne se côtoient pas:
une cloison à mi- niveau séparait la classe en deux, à
partir de l'estrade magistrale. Un bon- point doit être décerné
à la municipalité de la fin du siècle dernier. Bien que
le budget n'ait jamais été copieux, les conseillers décidèrent,
en opposition avec la préfecture, la gratuité scolaire dès
1877; Jules Ferry n'imposa cette obligation aux communes qu'à partir
de 1881. Les membres du Conseil s'engageaient même à en payer
les frais de leurs propres deniers si l'autorisation de s'imposer de cette
somme ne leur était pas donnée. Je pense qu'il faut comprendre
par là que M. Debrousse, maire et propriétaire des Moyeux, s'engageait
à assumer cette dépense; ce châtelain bienveillant légua
son château à l'Assistance Publique.
Comme dans toutes les écoles rurales, la fréquentation des classes
dépendait grandement des travaux des champs. Quelques cahiers d'appel
des années 1910 montrent la désertion progressive des enfants
jusqu'à ce que l'instituteur écrive que l'école a cessé,
faute d'élèves; en novembre, après les semailles, des
enfants doivent “garder les corbeaux”, avec des crécelles
ou des tic-toc-maillets, ils étaient chargés d' effrayer, pendant
tout le mois, les oiseaux picoreurs.
Considérant que les travaux de la moisson ne
commencent guère dans la commune que dans les premiers jours du mois
d'août et se continuent jusqu'à la fin de ce mois... les familles
seraient privées de leurs enfants au moment où elles en auraient
le plus besoin et où elles ne pourraient s'occuper de leur entretien.
Ouvertures et fermetures de classes se succédèrent
suivant les fluctuations de la population. Un accroissement du nombre d'élèves
et le désir de scolariser les enfants de quatre ans nécessita
la création d'une seconde classe aux Montils, dans la salle à
manger du logement de fonction; la classe des filles de la Chapelle- Rablais
ayant été louée. En 1959, on ouvrit à nouveau
la seconde classe de la Chapelle- Rablais qui fut encore fermée en
1963. Il n'y eut plus de classe ouverte au village à partir de 1970:
les élèves étaient conduits aux Montils par M. Beusart;
ils n'étaient plus que neuf !
La situation s'est inversée en 74/75 quand fut créé le
Syndicat Pédagogique de Villefermoy qui accueille actuellement (1997)
en douze classes les élèves de trois villages: la Chapelle,
Fontenailles et St Ouen. Cette création, due à une inversion
du mouvement démographique, permit entre autres améliorations,
la création d'une école maternelle. Mais les jeunes parents
qui acquirent une maison en lotissement envoient maintenant leurs enfants
au collège ou au lycée. Les effectifs scolaires baissent et
des classes commencent à se fermer.
L'église devait être au centre des préoccupations
d'une commune déclarant 556 catholiques romains sur 557 habitants au
recensement de 1851. L'exception étant un Anglais résidant au
château des Moyeux. Le Registre Paroissial tenu par le curé,
transcrivant baptêmes, bénédictions nuptiales et inhumations
est le calque presque parfait de l'Etat Civil enregistré à la
Mairie. Pourtant, les archives révèlent des moments de friction,
pour des motifs bassement matériels: la commune a toujours été
pauvre. Vers 1830, il lui est demandé de participer à la création
des nouvelles routes; les lois Guizot lui imposent l'entretien d'une école
qui existait peut-être déjà mais n'apparaissait pas au
budget. En mars 1841, le curé Ozouf décède. Il possédait
personnellement le presbytère (qu'il avait peut être racheté
à son prédécesseur Ponce Péchenard, lequel avait
repris le bénéfice de la Cure à Nicolas Pailla contre
1.000 livres de pension en 1787; le presbytère ne figure pas dans les
biens nationaux confisqués sous la Révolution). Ce devait être
la plus belle maison du village, la seule de première catégorie,
comportant dix neuf portes et fenêtres, dépendances, granges
et colombier; hélas, dans un triste état.
En mars, les membres du Conseil et les plus imposés de la commune avaient
voté: dix neuf voix contre huit se sont prononcées contre l'acquisition
du presbytère. Le dix sept avril, se présente le nouveau curé
desservant accompagné du Doyen de Nangis pour
exercer son ministère dans notre commune, et procéder à
son installation pour autant que la commune aura à lui présenter
un logement décent et convenable pour un prêtre. Le Conseil
Municipal et les membres du Conseil de la Fabrique
ont consenti à l'acquisition du dit ancien presbytère à
l'exception de la grange couverte en paille. Ce qui sera fait l'année
suivante pour la somme de 4.000 francs. Le maire d'alors s'était empressé,
sans autorisation du conseil municipal, et sans demander avis, à faire
faire les réparations les plus urgentes afin d'installer monsieur le
Curé. S'ensuivent quelques années où on sent l'animosité
et la mesquinerie, les menaces de procès, les chicaneries pour des
bouts de terrain, des réunions de conseil qui ne peuvent avoir lieu,
faute de quorum. Depuis que le presbytère était
en ruines, la commune était privée d'ecclésiastique;
pour ne pas priver la commune du secours de la religion, Monseigneur l'Evêque
avait donné des ordres à M. le Curé de Fontenailles pour
desservir la commune en attendant le rétablissement du presbytère
mais ces travaux n'ayant pu se terminer aussi promptement que l'on aurait
désiré, Monseigneur a retiré le pouvoir à M. le
Curé de Fontenailles ne l'autorisant qu'à y faire des inhumations
et autres simples cérémonies de la religion avec défense
de dire la messe le dimanche. En représailles, la commune décide
qu'il n'est pas non plus juste que M. le Curé profite des revenus du
jardin et des enclos du presbytère. On s'empresse donc de les
louer à un particulier. Du mois de septembre 1845 jusqu'au mois de
novembre 1850, il n'y a pas de curé.
Le presbytère fut rasé, quelques parcelles
vendues ou distraites sans droit par le sieur Lepanot, d'ailleurs mari de
la nièce du curé Ozouf, le bâtiment actuel fut construit
en 1883. Il ne fut jamais attribué à un prêtre, bien que
celui de Fontains l'ait demandé en 1902, mais loué puis revendu
à un particulier en 1934.
Après la mort de Jean Jacques Ozouf, dernier propriétaire du
presbytère, le curé desservant fut, entre 1841 et 1845 celui
de Fontenailles.
A la fin du XIX° siècle, les almanachs indiquent que la
paroisse est desservie par le curé de Fontains, comme binage, et fait
partie du doyenné de Nangis, diocèse de Meaux, depuis 1790.
elle était naguère une cure conférée par l'archevêque
de Sens, valant au XVIII° siècle 1.800 livres de revenu... Le curé
de cette paroisse, capella de Erableyo, était taxé à
105 sols, mais il ne put payer cette petite somme à cause de sa pauvreté
et on l'exempta. Almanach de Seine et Marne
1909
Le curé Emile Mavré accompagna les soldats durant la guerre
de 1914-18, retourna au village jusqu'en 1922. Le curé Gille est installé
à la Chapelle Rablais et reste jusqu'au mois de juillet 1928. Il aurait
occupé une petite maison sur la chemin de la mare à la Canne.
Ensuite, le curé Laurain de Fontenailles et ses successeurs s'occupent
de la Chapelle Rablais. liste établie par M.
le curé Juffermans de Fontenailles
Le Conseil Municipal de ladite commune
ayant reconnu l'urgente nécessité de faire réparer, le
clocher de l'église de cette commune, elle même dans sa voûte
et sa couverture et autres parties d'icelle, tant à l'intérieur
qu'à l'extérieur, comme aussi à la sacristie, après
avoir fait un devis estimatif des réparations à faire à
ladite église par un homme de l'art, lequel devis se monte à
la somme de deux cent quarante neuf francs. Procès
verbal des délibérations prises par le Conseil Municipal, session
de 1817 pour 1818
L'église ne fut réparée que quarante ans plus tard, le
devis s'éleva alors à 17.306,99 francs, rabaissé par
l'abandon d'une horloge. Entre temps, l'église était devenue
tellement dangereuse qu'elle fut délaissée en 1854: à
la fin du registre paroissial de cette année, on trouve: Liste
des enfants qui ont fait leur première communion dans l'Eglise de Fontains,
l'Eglise de le Chapelle Rablais étant dans un état de ruine;
depuis 45 ans cette cérémonie n'avait pas eu lieu à Fontains.
Il s'agit d'ailleurs de la seule annotation autre que baptêmes, bénédictions
nuptiales et inhumations en cinquante ans sur les registres tenus par le prêtre.
Même l'épidémie de choléra qui fit plus de trente
morts pendant l'été 1832 n'a pas provoqué de commentaires.
Le clocher fut rénové en 1859. On aurait pu penser que sa flèche
avait été ajoutée; et que le clocher aurait pu ressembler
à celui à quatre pignons de Saint Ouen, type fréquent
en Brie, mais plusieurs actes de 1754, concernant des travaux urgents à
l'église, montrent qu'il avait déjà sa forme actuelle,
en bien mauvais état. En 1911, l'érudit (constesté) Maurice
Pignard-Peguet note: la base du clocher forme porche,
à la façon des constructions du XII° et XIII° siècles.
L'entrée en est défendue par une grille. Les travaux
de 1754 notent, au contraire, l 'absence d'un tel porche où auraient
pu se tenir les assemblées des habitants, au sortir de la messe.
Il fallut rénover les vitraux et les boiseries du choeur, travaux non
prévus au devis, qui eurent lieu en 1862. Pour les financer, on vendit
un peu de tout: les anciens bois de charpente, les peupliers entourant les
croix, les fagots des chemins, même la boue de la mare ! Les travaux
à la sacristie commencèrent en 1877; la chapelle fut abattue
pour être relevée en 1904 par la châtelaine, Mme Rigaud.
Il est probable que la statuaire date de cette époque, relevant du
style Saint Sulpicien. Seuls un tableau, l'autel et une armoire en triste
état semblent plus anciens. La cloche, marquée Louise
bénite en 1789 est, en fait, la plus récente des cloches
du canton, ayant été refondue en 1953.
Si, vers le milieu du XIX° siècle, l'église
tombait en ruines, il en était de même du presbytère,
de la maison d'école qui nécessitait des travaux et même
du cimetière dont le mur était en piteux état: Je
suis informé de l'insalubrité du local affecté à
l'école de votre commune. La cause de cette insalubrité est
attribuée:
1/ aux eaux stagnantes et à la boue qui se trouvent devant la porte
de l'école.
2/ à la grande humidité des murs et du peu d'élévation
du solivage de l'école
3/ et à l'exhaussement du sol du cimetière par rapport à
celui de la maison d'école. On m'a signalé également
le mauvais état de la clôture du cimetière où s'introduisent,
sans difficultés, les bestiaux et le volailles. lettre
du préfet 1872
Car le cimetière était au centre du village, comme dans la plupart
des communes rurales. Dans la maquette réalisée par les élèves,
ils se sont empressés de coller, dans l'allée du cimetière,un
petit cochon poursuivi par un paysan en colère; on y voit aussi le
maréchal ferrant Guérin qui ne possédait que la petite
maison près du "travail à ferrer"; le charron Adrien
Toussaint Félix qui œuvrait près de la mare, le maître
Gasc qui attend ses élèves, la veuve Bony dans sa petite maison
derrière l'église. On aurait pu y mettre les trois cabarets
trop proches de l'école, au goût du préfet: Les
enfants qui fréquentent l'école communale ne peuvent arriver
en classe sans passer devant les cabarets qui avoisinent la maison d'école.
lettre du préfet 1851
La rue devait être encombrée de tas de fumier, de fagots, de
roues de charrons, peuplée de bestiaux allant pâturer, d'oies
en promenade puisque plusieurs arrêtés du Maire essaient d'y
mettre bon ordre. L'aspect de la place du village a dû bien changer
quand le cimetière fut transféré sur une parcelle donnée
par M. Lesourt, propriétaire des Moulineaux. Considérant
que la translation de l'ancien cimetière sur un autre point de la commune
s'est faite en 1868 et que la dernière inhumation dans l'ancien cimetière
date du premier juin 1868 et que dès lors il n'y a plus eu d'autres
sépultures,la première inhumation dans le nouveau datant du
4 août 1868 et que dès lors il y a lieu de pourvoir à
destination de l'ancien terrain; arrête: article 1: A partir du jour
de la publication du présent arrêté, les propriétaires
de monuments funèbres existant sur l'ancien cimetière .. sont
invités à les retirer de leurs places respectives avant le premier
juin 1873. registre des arrêtés
du Maire 1872
Les métiers au XIX° siècle
Les archives font découvrir les transformations du village: les maisons, les routes, les terres, les bois... Elles permettent aussi d'approcher les habitants de la commune, les hommes et les femmes qui y sont nés puis morts. A compulser ces vieux papiers, on acquiert une certaine familiarité avec quelques uns de ces personnages: ceux qui ont été assez influents pour siéger au Conseil municipal, ceux qui ont été assez malchanceux pour entrer en litige avec l'administration... leur nom peut revenir fréquemment. Ceux qui possédaient leur maison ou des terres figurent aussi sur les matrices cadastrales. Les autres auraient pu traverser le siècle sans laisser d'autre trace que sur les registres d'état civil. Avec les élèves, nous avons retrouvé les nombreuses traces de l'un des anciens maires, Denis Toussaint Félix propriétaire de la petite maison qui a servi d'école.
Tous les jeunes gens de vingt ans figurent sur les listes
de conscrits; certains malchanceux partiront à l'armée pour
six ans parce qu'ils auront tiré le mauvais numéro et que leurs
parents n'auront pas été assez riches pour leur payer un remplaçant.
On peut connaître leurs noms, familles, défauts physiques, degré
d'instruction, à partir des lois Guizot et leurs métiers ainsi
que ceux de leurs pères. Sur 140 inscrits, de la classe de l'an 7 de
la République à celle de 1832, il n'en est qu'un seul qui ne
travaille pas de ses mains: il était clerc de notaire chez son père,
il attendait encore, en 1857, les honoraires que la Commune, souvent mauvaise
payeuse, devait à son père depuis 1839.
Quel était le métier d'un jeune homme de vingt
ans à la Chapelle Rablais, voici maintenant 150 ans? Bijoutier, voiturier,
garçon épicier ou cordonnier: un seul.; cinq charrons, deux
maréchaux ferrants. Des apprentis ont dû se succéder,
année après année dans les ateliers près de la
place du village. Puis ils prenaient la route pour terminer leur apprentissage,
nous avons ainsi retrouvé les traces de l'un des fils de Félix:
Louis Ferdinand qui fut dispensé de service militaire pour avoir tiré
au sort un bon numéro, mais aussi du fait de sa taille trop réduite:
1,55 mètre. Plusieurs années successives, il a sollicité
un passeport pour l'intérieur afin de se rendre dans différentes
villes de la région avant d'exercer sa profession de maréchal
ferrant à Coulommiers.
A part ces artisans, tous les autres conscrits, soit 9 sur 10, vivaient directement
de la terre: nous trouvons 3 terrassiers et un carrier qui devait exploiter
les carrières des Montils dont les grès ont servi à renforcer
les chaînages d'angles des bâtiments et à paver la route
Paris- Bâle, actuellement RN19.
89 jeunes gens vivaient de la culture: un vigneron, 3 marneurs, 2 gardes,
6 batteurs en grange, 9 bergers, 34 bûcherons, un scieur de long...
Les agriculteurs sont: cultivateurs:4, chartiers:45, manouvriers:11, domestiques:6,
journaliers:2, classés, dès vingt ans par ordre de prestige,
ou plutôt de fortune, tels étaient les métiers des jeunes
gens de vingt ans dans la première moitié du XIX° siècle.
Le recensement nominatif de 1851 indique la profession de tous les actifs
de la commune: propriétaires cultivateurs:10, fermiers:3, journaliers:
218 dont 89 femmes, journaliers- propriétaires: 45, domestiques d'exploitation:14,
bûcherons charbonniers:1. Pour ce dernier métier, il est probable
que la plupart des bûcherons et cuiseurs de charbon devait être
itinérant et ne figure donc pas dans les statistiques de la commune.
Le bâtiment occupait sept maîtres, on trouvait trois ouvriers
dans l'habillement: il y avait une fabrique de schalls (châles), 9 maîtres
et 10 domestiques dans les cafés, onze rentiers, un instituteur et
un curé, six professions libérales: des voituriers. 116 femmes
vivaient du revenu de leur mari.
Les talons des passeports pour l'intérieur révèlent quelques
professions itinérantes, comme le chasseur de sangsues. Cent un enfants
en bas âge ne sont pas comptés parmi les travailleurs puisqu'ils
ont moins de sept ans!
Les nourrices
Denis Toussaint Félix dont nous avons recherché
les traces avec les élèves nous a donné l'occasion de
fouiller dans bien des documents. Ils sont présentés dans un
programme sur ordinateur "Félix, maire", mis en forme par
les élèves dans le cadre du Club Informatique. Dans les registres
paroissiaux prêtés par M. le Curé avant qu'ils ne soient
archivés au diocèse et dans les registres d'état civil,
nous avons retrouvé ses actes de naissance, de mariage, son décès.
La naissance de ses onze enfants, leur mariage, les petits enfants... Parmi
ceux-ci, Céline Brigitte ne vivra que 11 mois, Alexandre Hyppolyte
un mois et demi, Louise Victorine sera ondoyée, c'est à dire
baptisée par la sage-femme car morte en naissant, d'autres encore mourront
en bas âge. Le destin le plus triste a été celui de sa
fille Anne Rose qui s'est mariée avec Louis François Picard
et eut 6 enfants. Trois moururent avant l'âge de deux ans, dont Pierre
Joseph pendant l'épidémie de choléra de 1832. Anne Rose,
elle même, décédera avant son père. A l'époque,
le taux de mortalité était de 28 pour mille, presque trois fois
plus que maintenant. La mortalité infantile
est particulièrement élevée; en 1827, sur 9.961 naissances,
1.541 enfants sont morts avant l'âge de trois mois. La plupart de ces
nourrissons meurent à la fin de l'été, en août,
septembre. dossier des Archives Départementales,
Vivre sous les Bourbons
Notre Félix était parrain de nombreux enfants. Au hasard des
pages, car je n'ai pas tout lu, l'oeil cherchant à tomber sur le nom
Félix ou Rondinet, j'ai découvert le décès d'un
petit parisien: Pierre Louis Henry Flamant, âgé de 19 jours,
mort le 19 frimaire de l'an 11. La déclaration portait le nom de Denis
Toussaint Félix, manouvrier et père nourricier qui a signé
et de Marie Anne Rondinet, nourrice, qui a déclaré ne savoir
signer.
Marie Anne était l'une de ces nombreuses nourrices de la campagne qui
élevait des "Petits Paris" du sein gauche pendant qu'elle
nourrissait ses propres enfants du sein droit. S'il faut en croire le lieutenant
général de police en 1780, sur 21.000
enfants nés à Paris, à peine 1.000 sont allaités
par leur mère, 1.000 par des nourrices qui viennent au domicile des
parents de l'enfant et 19.000 sont envoyés chez des nourrices à
l'extérieur de la ville où ils étaient apportés
à la campagne dans des paniers à ânes ou par chariots
entiers. "Je n'ai jamais rencontré, sans
éprouver une vive émotion, ces larges voitures de meneurs dans
lesquelles sont entassés pèle mêle comme des animaux nourrices
et nourrissons" s'attriste encore Un auteur en 1866.
L'épopée des bébés, éd.
de la Martinière
Pendant des siècles, la majorité
des nourrissons sont trimballés par leur mère paysanne qui les
amène avec elle aux champs, dans des paniers d'osier. Il sont aussi
laissés sous la garde de quelque grand-mère ou d'une grande
soeur parfois âgée de moins de dix ans. Dans ce cas, lorsque
le bébé commence à marcher à quatre pattes, il
arrive qu'il finisse par se noyer dans la mare ou dans le puits de la ferme.
Pour toutes les femmes des villes qui doivent travailler, il est hors de question
d'élever au sein un bébé pendant une année ou
deux et de le surveiller à l'âge où il commence à
explorer la maison: la seule solution est la mise en nourrice... L'épopée
des bébés.
Ce n'étaient pas seulement les riches bourgeoises soucieuses de préserver
leur ligne qui faisaient nourrir par d'autres leurs bébés, mais
la plupart des femmes de modeste condition, obligées de travailler
pour moins de deux francs par jour (dans le Registre des renseignements statistiques
de la commune pour 1857/61, c'est le salaire d'un journalier agricole).
Il aurait été intéressant de poursuivre cette recherche:
quels étaient les tarifs, combien parmi la centaine de femmes de manouvriers,
déclarées vivre du revenu de leur mari aidaient à faire
bouillir la marmite en élevant des Petits Paris, quitte à accumuler
grossesse sur grossesse pour continuer à avoir du lait?
La réponse sera peut-être dans la prochaine édition des
documents sur le village, dans une dizaine d'années, si je continue
à ce rythme ou si quelqu'un veut bien reprendre les recherches et pousser
un peu plus loin l'enquête: aller aux Archives Nationales, recueillir
les témoignages des Anciens, trouver une meilleure interprétation
aux documents que je viens d'exposer... A suivre....
Pour terminer, deux personnages qui ont fait jaser dans les chaumières, bien oubliés depuis... Deux personnages ayant défrayé la chronique à leur époque vécurent à la Chapelle Rablais. La fortune ne leur sourit pas de la même manière: l'une eut la chance de devenir châtelaine, l'autre paya bien cher une rixe d'ivrognes.
Eléonore Vergeot
Eléonore Vergeot, 21 Champs Elysées, Paris, château des Moyeux, la Chapelle Rablais eut des débuts bien modestes. Elle s'appelait alors Alexandrine, était repasseuse, dans la Somme, dans la ville de Ham. Ce bourg tire sa célébrité d'une forteresse où furent détenus, entre autres prisonniers politiques, Louis de Condé, le prince de Polignac, le général Cavaignac et Louis Napoléon Bonaparte. Celui- ci était emprisonné pour avoir tenté de renverser Louis Philippe en 1836 à Strasbourg puis en 1840 à Boulogne. Il s'en évada en 1846 en endossant les habits de l'ouvrier Badinguet, d'où le surnom qui lui fut donné. Le caractère du prisonnier commençant à s'aigrir du fait d'une chasteté prolongée, il lui fut octroyé une maîtresse choisie administrativement. Une dizaine de jeunes filles furent présentées au prisonnier, pour s'occuper de son linge, par l'entremise d'un abbé qui devint plus tard second aumônier du château impérial des Tuileries et évêque d'Adras. Alexandrine- Eléonore fut choisie; on l'appelait la Belle Sabotière, surnom qu'elle garda quand Louis Napoléon devint célèbre. Mais, en décembre 1842, le commandant du fort de Ham écrit à son ministre: "Par ma lettre du 26 novembre dernier, j'ai eu l'honneur de vous rendre compte que la femme que vous avez autorisée à entrer dans la prison pour visiter et réparer le linge était enceinte..." Le bébé naquit le 25 février 1843 et reçut les prénoms de Eugène Alexandre Louis. Le père demanda à une amie intime, Mme Cornu (aucun rapport avec les seigneurs du XIII° siècle), de le prendre en pension. André Castelot note qu'en mars 1845, à force de repasser le linge du prisonnier, Eléonore met au monde un second fils, Louis. Vous pourrez suivre leur carrière dans les Histoires d'amour de l'histoire de France de Guy Breton. Eléonore ne devint pas impératrice, Napoléon III ayant épousé Eugénie de Montijo en 1853. Elle se maria en 1858 avec Pierre Jean François Bure, frère de lait de Napoléon III, trésorier général de l'Empire qui acquit les Moyeux en 1865. Il revendit le château en 1870, pour partager l'exil de la famille impériale en Angleterre après le désastre de Sedan et la capitulation devant les Prussiens. Eleonore Bure née Alexandrine Vergeot-Camus mourut en 1886.
sources: RC Plancke: Nangis et son canton à la belle époque / André Castelot: Napoléon Trois / Guy Breton: histoires d'amour de l'histoire de France tome 9
voir la page du site, mise à jour, qui lui est consacrée
Vincent Paré
En 1783, Vincent Paré, ancien serviteur de monsieur
Belin, curé de la Chapelle Rablais est accusé:
1° du vol de quatre chemises et de pièces de toile dérobées
chez le curé
2° d'avoir excédé de coups Pierre
Gardenet au sortir du cabaret de la Garde de Dieu
3° d'avoir violé la femme Gardenet dans un fossé et de l'avoir
dépouillée de ses vêtements pour les voler
4° d'avoir volé un fouet de postillon à Seguin, garçon
meunier plus un habit à un compagnon de chambre plus une bêche.
Il a été condamné à être pendu, exposé
pendant vingt quatre heures puis porté aux fourches patibulaires. De
plus, il devait payer une amende de cent livres et voir tous ses biens confisqués.
Ayant fait appel, la Cour de Cassation le condamne le 17 janvier 1783 à:
1° subir la question ordinaire et extraordinaire
2° avoir bras, jambes, cuisses et reins rompus
vifs par l'exécuteur puis, mis face tournée vers le ciel tant
et si longtemps qu'il plaise à Dieu de lui conserver la vie.
3° une amende de deux cents livres et confiscation des biens.
Dans la République de Seine et Marne du 8 décembre 1980, édition de Fontainebleau, page de Montereau.
Je reproduis ici le texte du second livret sur les archives de la Chapelle Rablais, publié en 1997 et vendu au profit de la coopérative scolaire. Il y manque toutes les illustrations, dont des cartes. On peut le consulter à la médiathèque de Nangis, cote 944.37 DUV, aux Archives départementales, cote 295EDT3S1 ou 100J630, ainsi qu'un premier livret de 1984, AZ14200, ou plus simplement en mairie de la Chapelle Rablais qui vient de le rééditer avec une nouvelle couverture et des photographies de Marcel Fontellio.