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Texte du livret d'archives |
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Je
reproduis ici le texte du second livret sur les archives de la Chapelle
Rablais, publié en 1997 et vendu au profit de la coopérative
scolaire. Il y manque toutes les illustrations, dont des cartes. On peut
le consulter à la médiathèque de Nangis, cote 944.37
DUV, aux Archives départementales, cote 295EDT3S1 ou 100J630, ainsi
qu'un premier livret de 1984, AZ14200, ou plus simplement en mairie de
la Chapelle Rablais qui vient de le rééditer avec une nouvelle
couverture et des photographies de Marcel Fontellio. |
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Introduction La Chapelle Rablais n'a jamais attiré l'attention, à l'abri de sa forêt. Dans les livres d'histoire, on ne trouve pas de fameuse bataille de la Chapelle Rablais ou de traité de paix des Montils. Ses célébrités se comptent sur les doigts d'une main: un chanteur yéyé qui avait pris le nom du hameau, une ex-concubine de Napoléon III devenue châtelaine, un cheval de course... Ses rues ne portent que des noms de fermes, de bois, de Chemin Blanc, de Vieux Prés, de mares... Pas de héros, de grand savant, d'être exceptionnel; tant mieux; ainsi, l'étude de la vie d'une seule personne, devenue célèbre ne prendra-t'elle pas une importance exagérée, par rapport aux centaines, aux milliers d'hommes anonymes qui ont créé le village, y ont vécu et, peu à peu, l'ont transformé. Dans cette seconde publication des documents
sur la commune de la Chapelle-Rablais, j'ai essayé d'exposer les
plus significatives des archives qu'il m'a été possible
de rassembler; j'ai découvert quelques documents nouveaux, d'autres
ont pris une signification inattendue. Il est certain que je n'ai pas
tout vu, ni tout compris. Si vous remarquez des erreurs, n'hésitez
pas à m'en informer. J'ai aussi tenté de résoudre
quelques énigmes: pourquoi des hommes ont-ils choisi de s'installer
à cet endroit, pourquoi ont-ils donné ces noms aux lieux
qu'ils fréquentaient: les champs, les bois, mais aussi les villages,
l'église; comment se sont-ils adaptés aux contraintes naturelles
puis ont-ils longuement modifié le paysage? JB Duval école de la Chapelle Rablais 1997 La Chapelle Rablais est bornée
au Nord par les territoires de Fontains et de Fontenailles, à l'est
par le territoire de Villeneuve- les- Bordes au sud par celui de Coutençon
et à l'ouest par les territoires d' Echou- Boulains et des Ecrennes.
On trouve au sud- ouest l'ancien manoir des Moyeux accompagné aujourd'hui
d'un joli parc. A l'ouest, le hameau du grand Montils qui compte aujourd'hui
263 habitants. La préhistoire, le Moyen Age, la Haye de Brie, la création des villages... ont été repris dans des pages Internet assez anciennes, du temps des vieux modems et des lignes poussives, d'où des pages très courtes par rapport à celles que je propose aujourd'hui.
Les origines L'histoire de la Chapelle Rablais peut se confondre avec celle de ses forêts. Déboisements, cultures, friches, taillis, grands arbres ont dû se succéder au fil des siècles. Chaque expansion des bois recouvrant les traces des anciens agriculteurs. Plusieurs vagues de reboisement ont peut être eu lieu: aux temps barbares après un défrichement possible aux temps gallo-romains; pendant la guerre de Cent Ans, si la population de notre village a été touchée par les désastres de la guerre comme les communes voisines. Ces deux premières évolutions ne sont pas attestées. La troisième vague qui eut lieu au XIX° siècle, favorisée par les gros propriétaires terriens, est mesurable et sera étudiée un peu plus loin. Les friches actuelles laissent présager une nouvelle expansion des bois sur les terrains les moins rentables. "Jusqu'au cours du X° siècle, le large plateau de la Brie française était resté couvert de sa forêt que la hache avait à peine entamée sur les bords: elle s'appelait la forêt de Bièvre; elle couronnait les hauteurs du bassin de la Seine de Melun à Montereau, et joignait la forêt de Fontainebleau à celle de Chenoise, laquelle se prolongeait jusqu'à la Traconne...,Les forêts de Barbeau, de St Germain- Laval, de Valence, des Montils, les bois de Montigny- Lencoup, de Gurcy, de Villeneuve les Bordes, de Villefermoy, de Châtillon la Borde, la garenne de la Croix en Brie, les bois de Louan et de Montaiguillon, pour ne citer que les plus importants, sont des parties non défrichées de cette forêt de Bièvre." Ernest Chauvet, Nangis Notes historiques Les cartes archéologiques portent,
en blanc, la marque de la grande forêt de Bièvre dont fait
partie Villefermoy: pas de découvertes; certainement pas d'hommes
préhistoriques. Les hommes de ces temps reculés avaient
choisi de se regrouper le long des voies de communication dans la vallée
de la Seine ou près de ce chemin très ancien que les Romains
ont ensuite aménagé: le Chemin Perré, la voie qui
passait par Châteaubleau. Si quelques haches préhistoriques
ont été retrouvées dans les champs, elles peuvent
être la trace d'un chasseur de passage ou les rares témoins
d'un peuplement oublié. La forêt a longtemps été
peuplée de nomades: des charbonniers, meules de charbon de bois
et forges, des cendriers pour le verre et le savon, des bigres chasseurs
d'abeilles, cueilleurs de cire et de miel sauvage. Sur ses lisières,
les paysans faisaient pâturer les animaux domestiques, surtout des
porcs qui ressemblaient encore à des sangliers. L'épaisseur
de ses sous-bois a donné refuge à des loups, des braconniers,
des voleurs, des ermites... Peut être l'un d'entre eux a- t'il construit
la chapelle qui a donné son nom au village. La Haye de Brie La région a été
dangereuse comme le sont toutes les frontières: les territoires
de la Chapelle et de Fontenailles ont fait partie, pendant une longue
période du Moyen Age d'une zone tampon entre le puissant Comté
de Champagne et l'Ile de France royale. La Chapelle Rablais était
juste dans la Marche séparante comme le suggère la carte.
Depuis le XI° siècle, la puissance des Comtes pouvait rivaliser
avec celle du Roi. Ils s'étaient permis de reculer la frontière
qui était auparavant à la limite de l'ancienne voie romaine:
le Chemin Perré. Les conflits devaient être fréquents;
on garde le souvenir du roi Louis VII qui,
pour se venger de la résistance des Champenois, brûla Vitry
et ses 1300 habitants qui s'étaient réfugiés dans
l'église. Louis Leboeuf, précis
d'histoire de Seine et Marne Après s'être copieusement
bataillés, entre comte Eudes 1°, roi Robert II, Comtes Thibaut,
rois Louis, vint le temps de la réconciliation. En 1255, Thibaut
VII, dit le Jeune, comte de Champagne et roi de Navarre épousa
Isabelle de France, fille de St Louis au château royal de Melun.
En 1284, Jehanne de Navarre, fille du comte Henri
III le Large épousait son cousin Philippe, le second fils du roi
de France et en 1285, par la mort de son père et de son frère,
l'époux de Jehanne devenait roi de France sous le nom de Philippe
le Bel. La Champagne et la Brie étaient réunies à
la Couronne. Louis Leboeuf Le défrichement "Moins répandus en France
qu'en Allemagne, les entrepreneurs de défrichements, cependant,
n'y ont pas été un type social inconnu. Beaucoup d'entre
eux furent des hommes d'Eglise: dans la première moitié
du XIII° siècle, deux frères, Aubri et Gautier Cornu,
prirent ainsi à l'entreprise -quitte à distribuer ensuite
des lots à des sous entrepreneurs- l'essartage de nombreux terrains,
découpés dans les forêts de la Brie.'"Deux
des frères Cornu ont été cités dans l'extrait
des "Caractères originaux de l'histoire rurale française
de Marc Bloch. Marc Bloch ne cite que deux des frères
Cornu: Albéric et Gautier II. Il passe sous silence Simon II que
je soupçonne d'être à la base du défrichement
de la forêt qui donnera naissance à nos villages. Gautier
II, fils des déjà nommés Simon 1° et Isabelle
Clément était chanoine de Paris; il devint archevêque
de Sens en 1240. Entre temps, il avait mené à bien un défrichement
dans la région de Rosay en Brie, plus précisément
à Voinsles, pour la Comtesse de Champagne en 1216. Son frère,
Albéric ou Aubry, lui aussi chanoine de Paris qui deviendra évêque
de Chartres en 1236, aura défriché la région de Vernou
pour le compte de Notre Dame de Paris à partir de 1225 jusqu'en
1240. Les fiefs Ce sunt li fieu que len tient
de mon seignor Gautier le Cornu a la Chapelle Erabloy. C'est lefey Agnès,
de la Chapelle de Erabloy: sa meson ou elle maint et sa granche et IIIJ
arpens de terre meson et tout, et li doit XVd.o. de cens a la Saint Remi
de lotise qui fut Gilet le Forestier, et le lendemain de Noël, les
IIII pars de 1 chapon de ce meismes, et si tient IIII arpenz et demi de
terre vers la haie, et arpent et demi a la Flatoire, et XV quartiers au
Trembles et doiuent XLV d. de cens a la S. Remj. (La carte essaie de situer les lieux cités dans le rôle des vassaux et d'en trouver une signification possible. Restent quelques noms sans localisation: les Trembles, Queuelevée qui a un rapport avec l'extrémité d'un champ, Terreachat qu'on peut rapprocher de la Rachée ou terre à chaux; d'autres encore: Saleri, Felimain, la Puisière, la Troigne.. qui sont peut-être les villages d'origine des paysans.)
C'est lefey que monsor Henri de Beau marches tient de monsor Gautier le Cornu: c'est assavoir en viron IIII XX arpens de boys au grand arpent qui tient au bois devant Le Mes et au haies de Brie, et XIII arpen: au grant arpent delez le chemin de Brie, et LVII arpem et III quartiers delez les haies de Brie, et delez le boys Saint Germain a larpent de Champeigne, et des haies de Brie XXV arpenz au grand arpent; item la moitié du fief de la Charmée. Les colons qui défrichèrent
la forêt étaient attirés par des conditions particulières.
Les impôts étaient moins lourds que sur des terres déjà
mises en culture: environ 4 deniers par arpent, pour des superficies moyennes
de 4 arpents, sans compter la dîme de la dixième ou onzième
gerbe. Les contraintes, pour créer une hôtise, étaient
multiples: obligation de défricher, interdiction de rétrocéder
des terres à des chevaliers ou à des églises, obligation
de demeurer pour celui qui héritait... Cochet Cochet C'est ce qu'imposait
le chapitre de Notre Dame de Paris pour ses défrichements sur Vemou,
organisés par Aubry Cornu; il est probable que les conditions ont
été semblables pour notre forêt. Un chemin fut tracé,
le long duquel les hôtes commençaient à couper les
arbres, installaient l'herbagium: maison, cour, bâtiments, jardins,
dépendances, d'une superficie inférieure à un arpent,
puis continuaient le défrichement, créant de longues clairières
à l'arrière de leurs maisons. Ces étroites parcelles
se retrouvaient encore sur le cadastre, au début du XIX° siècle. Loin des quelques perches carrées
attribuées aux hôtes, quatre grands vassaux ont des domaines
d'environ 200 arpents. Ce ne sont pas de simples paysans. Les origines du nom Au jeu du téléphone
arabe, un premier enfant chuchote une phrase à un second qui transmet
ce qu'il a cru comprendre à un troisième et ainsi de suite.
Pour peu que la phrase d'origine soit un peu obscure, il est certain que
ce qu'aura compris le dernier n'aura qu'un lointain rapport avec ce qu'avait
proposé le premier. Il en est de même pour les noms inconnus;
s'ils ne sont transmis qu'oralement, il y a de fortes chances pour qu'ils
le soient mal. Alors même qu'ils sont écrits, il arrive d'y
faire des fautes. Combien de lettres a-t'on reçu à la Chappelle
Rabelais avec un E comme l'auteur de Gargantua et deux P à Chapelle? Terres proches appartenant à
des établissements religieux: La Chapelle Afin que les ouvriers qui se livraient
à l'agriculture ne fussent pas privés d'assister au sacrifice
de la messe, lorsque leurs travaux les retenaient loin de leurs habitations,
nos pieux ancêtres fondèrent dans la campagne une infinité
d'oratoires auxquels ils attachèrent des revenus pour l'entretien
de l'ecclésiastique chargé de les desservir. Ainsi,
au début du XIX° siècle, M. Pascal justifie-t'il la
dénomination de la Chapelle pour notre village, signalant qu'il
existait en France 212 communes portant ce nom. L'implantation des Montils suit une
crête de grès presqu' imperceptible mettant les maisons au
sec sur un terrain jugé "chaud et sablonneux" alors qu'il
est autre part "froid et argileux"; ainsi le décrivait
mon prédécesseur, chargé de la monographie de la
commune en 1889, pour le centenaire de la Révolution Française. Le plan du chef-lieu est différent: il a un centre autour duquel rayonnent les rues. C'est l'église, certainement reconstruite à l'emplacement d'un monument plus ancien dont elle a réutilisé des matériaux puisque on y retrouve quelques pierres taillées en visages humains et signes mystérieux à des emplacements sans gloire: sous le toit, près de la chapelle, le long du contrefort droit où on distingue deux visages et une gravure qu'on pourrait interpréter comme un poisson surmontant une boule, signe de reconnaissance des débuts de la chrétienté, le poisson ayant précédé la croix comme symbole chrétien; ce pourrait être aussi la marque, cachée à l'origine, d'un ouvrier tailleur de pierres. Cartulaire du Paraclet Le village est cité pour
la première fois dans le Cartulaire du Paraclet, c'est à
dire, dans le registre où les religieuses de cette abbaye transcrivaient
les dons reçus et notaient les titres de propriété
de cette abbaye fondée en 1130. Dès 1147, le légat
du Pape en dresse une longue liste pour confirmer les droits des nonnes:
des bois à Courgiveaux, aux Brosses, à
Marcilly, à Pouy, à Charmoy. Des terres à Fontenay
le Pierreux, à Bossenay, à Pommereaux. Des dîmes en
nature sur les propriétés de nombreux seigneurs de la région
qui contribuaient au ravitaillement du monastère en blé,
seigle, volailles, viandes ou poissons. S'y ajoutaient de nombreux biens
immobiliers, maisons, moulins, vignes, près ou champs. Albert
Willocx Ces noms évoquent des terres
proches du monastère situé dans l'Aube, dans l'arrondissement
de Nogent sur Seine. Son extension, due à sa renommée, exigea
la création de prieurés dépendant de la maison mère,
dont l'un St Thomas de Laval, prieuré du diocèse de Sens
soumis à l'abbaye du Paraclet établi à Donnemarie
en Brie histoire de la Ville et du Diocèse de Paris Trouver, dans le dictionnaire topographique du département de Seine et Marne de Hubert et Stein, après Foresta de Herablen, vers 1175 (Poupardin, St Germain des Prés, I, p291), la mention: Capella de Erableyo, 1275, (Cart.Paraclet) pouvait laisser entrevoir un rapport avec un personnage, ou plutôt avec le couple le plus célèbre de l'histoire du Moyen Age. Il s'agit bien du très scandaleux Abélard et de son épouse Héloïse, chanté par Georges Brassens sur un poème de François Villon: Dictes moy ou, n'en quel pays Ou est la tres sage Helloïs, Pour résumer l'épisode
célèbre voici un extrait de l'Encyclopédia Universalis:
Après quelques années de succès
paisible, il séduit Héloïse, fille fort lettrée,
nièce du chanoine Fulbert; un fils leur naît, qu'Héloïse
nomme Astralabe; Fulbert les contraint à un mariage qu'ils veulent
garder secret. Héloïse s'étant retirée au monastère
d'Argenteuil, Fulbert la croit répudiée et fait émasculer
Abélard. Les deux époux entrent en religion, elle à
Argenteuil, lui à St Denis. L'histoire de la commune L'histoire de notre commune a été publiée à plusieurs reprises par des érudits comme Michelin en 1829, réédité canton par canton chez Amatteis, Lecomte dans l'Almanach de Seine et Marne de 1909, ou Pignard-Pegnet en 1911. Leur propos était de rédiger, commune par commune, l'histoire de la Seine et Marne. Ils se sont attachés à donner la succession des seigneurs telle qu'on peut la reconstituer à partir des archives antérieures à la Révolution déposées aux Archives Départementales à Dammarie. D'une écriture difficile à déchiffrer, surtout au XVII° siècle, nombre d'entre elles sont heureusement résumées, imprimées, et disponibles en salle de lecture.
N'ayant pas fait de réelles recherches sur les siècles qui séparent le rôle des vassaux du premier cadastre, permettez- moi de recopier en partie l'article de Maurice Pignard-Pegnet: ...Après cette famille
(les Cornu), les seigneurs de la Chapelle- Arabloy ont eu à enregistrer
les dégâts de la Guerre de Cent Ans accompagnés de
l'émigration et de la ruine. Au XVI° siècle, en vertu
du droit du premier possédant, chacun s'empara de ce qu'il pouvait:
celui-ci des Moyeux, celui-là des Montils, un autre de Tourneboeuf,
un quatrième du Mée l'Archevêque, créant ainsi
autant de seigneuries partielles et de fiefs distincts. Pierre Lefèvre
Desclos devint ainsi seigneur des Clos de Fontains et seigneur des Moyeux
où il éleva un château et une chapelle; un sieur de
la Brière occupa les Ménils* avec son château seigneurial;
le Mée l'Archevêque devint la propriété d'Antoine
de Saive, Tourneboeuf celle d'Etienne d'Avran. La famille de la Brière
prospéra aux Montils qu'on appelait la Borde lez Montils. Cyprien
de la Brière réunit en 1747, aux Montils, les fiefs de Tourneboeuf
et des Moyeux.. Le fief de Putemuse, qui appartenait aux religieux de
Sainte Colombe, fut annexé en 1633 par François le Rahier,
seigneur des Bordes l'Abbé. Son fils acheta en 1686 le Mée
qu'il revendit en 1721 à François des Roches-Herpin, seigneur
de Bois Boudran. Le marquisat de Nangis, qui s'était formé
en 1612 au profit d'Antoine de Brichanteau, s'annexa plus tard la seigneurie
principale...
Les maux arrivoient tant par les gens mêmes
du Roy que par les Anglois, et estoit la pillerie par toute la Champagne et
la Brie, en telle manière qu'un hommme n'y pouvoit metttre remède.
XV° siècle L'Histoire, de la guerre de Cent
Ans à la Fronde, semble être en constante répétition
pour le paysan. Il semble que le cultivateur cherchait à subsister,
à survivre, entre deux catastrophes. La situation des paysans de cet âge classique rappelle étrangement celle des populations des pays d'Afrique, d'Asie... poussés à la limite de la survie par faits de guerre ou de climat. Si la guerre s'est éloignée, si le climat s'est adouci, si les invasions de rats, de loups, la peste et autres épidémies, la famine ont cessé de préoccuper le paysan briard, essayons d'imaginer avec quelle angoisse ont dû être vécus les mois de "soudure" entre deux récoltes. Comme elle offrait la sécurité contre les pillards, la forêt a dû permettre la survie pendant les périodes de disette, quitte à manger racines et glands au risque de mourir du "Trousse Galant". Un exemple de changement de propriété pendant la guerre de Cent Ans: l'inventaire des Clos établi, peut-être, pour payer la rançon de Tristan de Maignelay, capturé à la bataille de Poitiers en 1356, alors qu'il portait la bannière du fils de Jean le Bon, duc de Normandie. Souvenez-vous: "Père, gardez-vous à droite, Père; gardez- vous à gauche..." "L'Ostel appelé des CLOZ, c'est assavoir une grant sale contenant trois chambres dessus et deux dessoubz. Item, un grand grenier et étables dessoubz, une chapelle, cuisinne et despence dessus joignant ausdictes chambres et sale. Item, une granche à dix travées couverte en tuille. Item, le colombier tournant à eschiele à roue bien peuplé de coulombs. Item, une maison contenant deux chambres et une cave dessoubz à dix pas de degrez, un gelinier et dessoubz une estable à mettre pourceaux, cloz à murs tout entour le pourpris et trois jardins emprès. " La Révolution On se souvient des tableaux d'histoire
Rossignol, dans leur cadre en bois, que l'instituteur montrait à
chaque nouvelle leçon d'histoire. Celui de la Révolution
française présentait la Prise de la Bastille: canons, fumée,
et têtes au bout de piques. La situation semble avoir été
plus calme dans notre région. Quant au curé, sa présence fut toujours souhaitée: "...Les habitants de la Chapelle Rablais surent bien, au mois de mai 1793, manifester leur volonté à l'égard du culte catholique. Ils consentirent à la répartition, entre eux, d'une somme de 60 livres pour le loyer de la maison occupée par le curé, mais ils refusèrent d'accepter la réunion de leur paroisse à une autre paroisse 2." Ils demandèrent, en termes menaçants, au Directoire du Département, la construction d'un presbytère à leur profit..."3 En 1787, Ponce Péchenard, après avoir racheté 1000 livres sa cure à Nicolas Pailla, son prédécesseur, ne dut pas être dérangé, ayant prêté serment à la Constitution. Des propriétés changèrent de mains. Les émigrés et le clergé se firent confisquer leurs biens: la famille Sigy perdit un peu moins de 35 hectares; les fabriques 4 des églises de la Chapelle et Fontains se trouvèrent ruinées. La cure gérait environ 60 arpents à la Chapelle. Bien qu'ayant été vendue 9.000 livres tournois à François le Rahier, la ferme de Putemuse, 240 arpents se vit confisquée parce qu' appartenant à Sainte Colombe de Sens. De cette époque date aussi la nationalisation des "bois de la ci-devant abbaye de Barbeau appelés forêt de Villefermoy" 5 d'une contenance de 2650 arpents, 83 perches soit 1344 hectares; ainsi que ceux de la "ci-devant abbaye de Preuilly appelés bois d'Echoux, situés commune d'Echouboulains" dont le bois d'Echou de 218 hectares et celui de l'Etançon de 49 ha.
Les champs et les bois Plus de cinq cents ans séparent
les deux périodes que je développe plus longuement dans
ce livret grâce à des documents originaux: le défrichement
moyen-âgeux et le XIX° siècle. Le saut dans le temps
est moins brutal qu'il peut y paraître. Les rapports entre les hommes
ont évolué, les techniques de même; pourtant il me
semble que le dessin des champs des petits propriétaires du XIX°
siècle était déjà tracé au Moyen Age:
on retrouve dans le cadastre napoléonien les parcelles longues
et étroites dues au défrichement puis au mode d'exploitation
des terres: "En la Brie, où sont les
terres gloizes * et humides, on laboure en talut comme en dos d'âne;
et tient- on entre cinq rayons un scillon plus large, dressé aussi
en talut pour recevoir les eaux, tant de pluye de du dessous du guéret
qui est toujours humide. Et pour ce mesme effet sont au bout des terres
certaines levées assez hautes, où il y a entre ladite levée
et pièce de terre, une fosse faite au propre comme une longue cuve
pour recevoir les eaux qui s'escoulent des grandes pluyes; autrement,
elles pourriraient et suffoqueraient le grain; cela nuyt aux passants
par ce pays: c'est pourquoy l'on nomme les Sautereaux de Brie"
XVII° siècle. Abbé Denis, lectures
sur l'histoire de l'agriculture Parmi les quelque 200 mares qui figurent sur le cadastre ancien, quelques unes avaient encore cette forme allongée à l'extrémité des champs. Il en subsiste encore. Les archives communales conservent un Registre des renseignements statistiques concernant les productions agricoles de 1857 à 1865. Sa reproduction intégrale serait très intéressante car on y détaille, pour chaque type de produit, le nombre d'hectares cultivés, le rendement, le prix moyen et un jugement sur la qualité de la récolte. Il est dommage que ce registre ne fasse pas la part des productions destinées à la vente et celles réservées à la consommation courante. Nous aurions pu y voir si les petits propriétaires d'alors pouvaient avoir des productions autres que vivrières. Si on écarte les cultures de peu d'extension, les bois et les 48 hectares de prés naturels situés dans les parties basses inondables et donc hors des rotations de cultures, on peut diviser le territoire de la commune en quatre parties d'environ 150 hectares. 140 hectares étaient occupés par les prés artificiels, deux parties étaient réservées aux blés dont l'une de 180 hectares au froment, la dernière partie était en jachère morte, autrement dit la terre reposait sans culture pendant une année ou plus. Le sarrasin n'est pas signalé, alors qu'en 1889, l'instituteur notera qu'il sert d'aliment pour l'élevage de faisans. Le Registre signale 151 bovins et 970 ovins. A cette époque, 700.000 moutons parcouraient la Brie. Les recensements de conscrits notent 9 bergers sur 140 jeunes gens de la commune. On ne compte, bizarrement, que 25 cochons alors que, traditionnellement, chaque famille engraissait un goret. Le gros bétail devait pâturer dans les près et les moutons, regroupés sous la garde de bergers rétribués par la collectivité, devaient brouter les jachères. Peut- être avait- on encore l'autorisation de pratiquer la "vaine pâture", le droit de faire paître les bêtes sur toute l'étendue du territoire après les récoltes. Le registre signale qu'elle est abolie. En 1840, la pâture fut à l'origine de la révocation du garde champêtre, Simon Petit ...qui, contrairement à ses devoirs avait compromis plusieurs par ses faux rapports en les excitant lui même de faire paître leurs bestiaux dans des lieux non communs ... et avait ensuite verbalisé contre ces personnes. Registre des délibérations A noter que la betterave à
sucre n'est pas cultivée; la sucrerie de Nangis ne fonctionnera
qu'à partir de 1873. Il est possible que la traction bovine et
les labours profonds nécessités par la culture des betteraves
soient étroitement liés ainsi que le suggérait le
suggérait monsieur Giboux, ancien maréchal-ferrant de Rampillon.
Le Registre Statitique ne mentionne aucun boeuf de même qu'aucun
bouvier n'est cité à cette époque. D'où l'interrogation sur la
date de construction du "travail" de maréchal ferrant,
destiné au ferrage des chevaux, mais surtout des boeufs: il suffit
de noter à quelle hauteur se trouve le joug de tête pour
se rendre compte qu'il aurait été inutile au maintien d'un
cheval qui n'a pas besoin d'être entravé, à la différence
du bovin qui doit être maintenu par des sangles. Les plans anciens
n'en portent pas la trace évidente. Il n'est pas mentionné
dans les documents, n'étant à l'époque qu'un outil. La forêt Deux villages au centre de deux clairières. Nous sommes revenus, sept cents ans après, à la situation initiale du Moyen Age. Et pourtant, il a été possible de se rendre de la Chapelle à Nangis sans traverser de bois. Leur nouvelle extension est récente et mesurable comme l'indique le graphique des pourcentages par rapport à la superficie totale de la commune, à l'inverse de l'évolution de la superficie du territoire boisé pour la France. ( 80% du territoire était boisé en 3000 avant JC, au 1° siècle: 50%, 17°s: 25%, début 19°s: 15%, actuellement: 26%. dans Duby, histoire de la France) Il faut se rappeler que, pendant longtemps,
le bois a été le matériau le plus utilisé:
pour le chauffage, évidemment, mais aussi pour la construction
de charpentes et des murs à pans de bois que l'on appelle aussi
colombages, murs fréquemment construits dans les parties les moins
nobles de la maison traditionnelle; on l'utilisait aussi pour les charrettes,
outils, chaussures, bateaux... Peut être ces mesures servaient- elles à prévenir des abus: le paysan ne se contentait pas de ramasser des bourrées et son bois d'oeuvre, il y faisait souvent pâturer ses bêtes et coupait des baliveaux qui servaient de fourrage. Cette pratique est attestée par l'autorisation donnée aux paysans en 1893, année de grande sécheresse, de faire pâturer leurs vaches dans la forêt domaniale. En 1860, une demande de Renseignements sur les Redevables du Trésor ne relève pas moins de dix délits dans la forêt de l'Etat. La comparaison entre la carte de Cassini
datant du milieu du 18° siècle et la carte d'Etat Major de
1889 montre l'extension des bois entre la Chapelle et Fontains, entre
notre commune et celle de Fontenailles. Le 31 octobre 1789 Les principaux habitants
de la Chapelle Arablay, près de Nangis en Brie, élection
de Montereau, supplient très humblement Messieurs les vénérables
membres de l'assemblée nationale d'écouter favorablement
leur supplique. Malgré l'opposition des petits exploitants, les terres cultivées ont été replantées en bois par les gros propriétaires. Les châteaux (les Moyeux, Champ Brûlé, Bois Boudran..) n'étaient que les résidences campagnardes de ces riches aristocrates. Elles étaient destinées au plaisir de la chasse . Malgré l'opposition des petits exploitants, les terres cultivées ont été replantées en bois par les gros propriétaires. Les châteaux (les Moyeux, Champ Brûlé, Bois Boudran..) n'étaient que les résidences campagnardes de ces riches aristocrates. Elles étaient destinées au plaisir de la chasse . Ils ont préféré étendre leur domaine giboyeux plutôt que de cultiver des terres d'une rentabilité moyenne: elles sont trop humides et nécessitent de gros frais de drainage; de plus, avant la myxomatose, les invasions de lapins réduisaient encore les rendements. Situé au centre d'une région
de grandes et belles chasses giboyeuses, les Moyeux est une des plus remarquables
entre toutes. On tuait et on tue chaque année: 4.000 lapins de
garenne, 1.000 faisans, 250 lièvres, 600 perdreaux, 50 chevreuils,
des cerfs et des sangliers. (Sur la carte de la page précédente,
on devine la part qui restait aux paysans du village. Le plan des petites
parcelles qui ouvre le chapitre consacré aux temps modernes s'encastre
presque parfaitement dans les blancs.) Denis Toussaint Félix, maire
de la commune et figurant parmi les plus imposés ne possédait
que les champs disséminées qui figurent sur la carte. Les
riches se partageaient la plus grande partie des bonnes terres, tous les
bois, négligeant les fonds de rus trop humides. Ils avaient la
possibilité d'utiliser les machines modernes que le comte Greffulhe
préconisait et dont il organisait, à Bois Boudran, des expositions
et démonstrations. "Considérant que plusieurs gardes de M. Greffulhe font journellement sur les chemins de la commune et auprès des habitations, au moyen de cors et de fouets, un tapage assourdissant de nature à nuire à la tranquillité publique... il est expressément interdit ... aux gardes de M. Greffulhe et à tous autres qui seraient tentés de les imiter, de faire, soit de jour soit de nuit ... aucun tapage qui soit de nature à occasionner des accidents ou à troubler le repos et la tranquillité publiques." Dans la première édition des documents sur la commune, je n'avais pas donné d'importance à cet extrait du registre des arrêtés du maire de 1886, pensant qu'il ne s'agissait là que de joyeux fêtards. La découverte, grâce à une férue d'histoire locale, des articles du Père Gérôme, lève le voile sur ce texte administratif. Le comte Greffulhe, dont l'épouse, la princesse Caraman-Chimay servit de modèle à Marcel Proust pour Madame de Guermantes, partisan des méthodes d'exploitation agricoles modernes, député de Melun, se révèle étrangement féodal dans ses relations avec le menu peuple qui habite ses domaines et les alentours. "Vous plairait-il, ce matin, de venir faire un tour de chasse? me demande-t'on. (Des paysans de Glatigny) On décroche les fusils, on siffle Duchesse, une jeune chienne, et l'on part... (sur une parcelle appartenant aux fermiers) Mais voici que tout à coup, sort d'une hutte et accourt au grand trot, un garçon de ferme armé d'un fouet et qui, bien avant que nous y soyons arrivés, fait le tour de notre pièce en claquant à coup répétés. Une volée de perdreaux se lève... Nous nous dirigeons vers une autre pièce et d'aussi loin que nous apparaissons, voilà le même manège qui recommence: un autre garçon sort d'une hutte et bien vite fait le tour de la pièce en claquant son fouet comme s'il conduisait un troupeau de deux cents vaches à l'abreuvoir. Et mes deux amis m'expliquèrent que chacune de leurs pièces de terre était ainsi gardée par un homme qui, de toute la sacro-sainte journée, n'avait que cette besogne: chasser le gibier des pièces où il se pose, aussitôt que le propriétaire arrive pour le tirer... Le bien des petits cultivateurs est fait pour être mangé par le gibier de monsieur le comte, mais le gibier de M. le comte ne doit être tué que par lui seul." Extraits d'articles du journal le Briard, 1892, signés le père Gérôme, de Glatigny Le conseil municipal a essayé
de s'opposer aux abus du comte Greffulhe qui ne possédait que peu
de terres sur le Chapelle. Mais comment résister au châtelain
des Moyeux?
Les chemins ..."Parmi les hautes et puissantes
considérations qui déterminent les membres du Conseil Municipal
à voter la confection prompte et urgente dudit chemin, c'est l'état
affreux des chemins qui conduisent à Nangis et à Fontainebleau
et qui paralysent l'industrie agricole et commerciale; une route de grande
communication sortirait de la misère et de la détresse un
climat tout entier, un canton de la Brie qui, jusqu'à présent
a été oublié et qui cependant mérite toute
la protection de l'administration. La création de chemins praticables a été au centre des préoccupations de la Municipalité à partir de 1835. Des routes au tracé rectiligne ont été créées pour remplacer ces chemins qui laissaient les chartiers en souffrance par les obstacles qu'éprouve la libre circulation pendant les trois quarts de l'année. Essayez de suivre le trajet de l'époque pour vous rendre à Nangis; le chemin existe encore, il passe entre la ferme des Moulineaux et les premières maisons du village. Imaginez l'emprunter en hiver, parmi les ornières avec une charrette lourdement chargée! Une patache a peut- être desservi quelques villages avoisinants, mais aucune diligence n'a jamais dû s'aventurer sur ces chemins défoncés. Les relais de Poste sont bien connus et ne jalonnent que les grandes voies; sur la route Paris Bâle: Guignes, Mormant, Nangis, Maison Rouge, Provins....
Les passeports pour l'intérieur Quelques Passeports pour l'Intérieur sont conservés dans les archives de la mairie. Il s'agit de sortes de cartes d'identité que devaient présenter ceux qui avaient à voyager, du marchand de sangsues, au curé de la paroisse allant visiter son village natal ou au comte Just Faÿ Latour Maubourg se rendant à Paris.
Les maisons Le village, s'il était à la frontière de deux provinces au Moyen Age, l'une à l'Est, l'autre à l'Ouest, se trouve aussi à la limite entre deux styles de construction traditionnelle, la séparation étant Nord/Sud. Un peu plus au midi, vers Echouboulains, on trouve en grand nombre de petites maisons à nervures de briques 1. Plus au nord, les arêtes sont en grès. Une promenade dans le village permet de rencontrer autant de grès que de brique. Peut- être ce dernier mode de construction correspond-il plus au style de la fin du siècle passé: s'il fallait faire quelques kilomètres pour trouver des briqueteries 2, le grès s'extrayait directement dans la commune. Les constructeurs traditionnels, s'ils avaient pour eux le temps, évitaient les longs transports sur des chemins boueux. Comme maintenant, les maisons étaient
construites en fonction des fortunes. Les plus pauvres devaient être
les vieilles gens; quelques toutes petites maisons ont dû être
construites à l'intention de ceux qui ne pouvaient plus habiter
chez leurs enfants; on les appelle des “maisons de vieux”.
Les Moyeux Construite à l'écart
des maisons paysannes, on trouve toutes les lieues environ, une résidence
campagnarde, un château: Bois Boudran, Champ Brûlé,
les Moyeux, la Vénerie, les Bordes. Des rendez- vous de chasse
sont aménagés, comme aux Clos ou la villa Putois, la ferme
des Moulineaux. La plupart des châteaux ont été reconstruits
au siècle dernier. Les Moyeux, au milieu de la clairière,
d'où son nom, doit son aspect actuel, non au comte Latour Maubourg,
mais à son successeur, M. Lemaire Marie Claude qui fit abattre
en 1849 la maison cadastrée C 17 taxée à 200 francs
de revenu pour faire édifier en 1852 un château rapportant
450 francs de revenu à la Commune, matrice cadastrale Il existe peu de documents sur
le château des Moyeux, on pourrait retrouver la liste de ses occupants
en dépouillant les Pouillés où l'on trouve
Les Moyeux, paroisse de la Chapelle Rablais, chapelle
domestique dans le château qui appartenait à M. de la Brière
inscriptions du diocèse de Sens,
ou les Terriers comme: Roole des nobles demourant
en dedans des terres dépendant du marquisat de Nangis... le dixième
jour defebvrier, l'an mil cinq cent soixante et dix neuf: ...le sieur
Damours demeurant en son fief, terre et seigneurie de la Borde des Montilz,
en la paroisse de la Chapelle d'Arablay. E.
Chauvet. En 1823, l'instruction était
donnée aux enfants dans une maison particulière louée
à cet effet. Cette maison qui existe encore actuellement, mais qui
a subi des restaurations et des transformations assez importantes est située
derrière l'église; elle ne comprenait alors qu'une seule pièce
servant à la fois d'école, de cuisine, de salle à manger
et de chambre à coucher. La nécessité d'une
nouvelle construction se fit sentir en 1866 . Des projets virent le jour
qui ne purent être réalisés à cause de la guerre
de 1870; non que la commune ait connu d'autres atrocités que la
réquisition d'une vache et d'autres fournitures, mais le paiement
des indemnités de guerre mit à sec le budget communal pendant
au moins deux années. Le 16 octobre 1870, on discute de la
répartition à faire de la somme de
164.737 francs qui tombe sur l'arrondissement de Provins, qui est engagé,
pour éviter des représailles, à payer sa portion
dans le délai de six jours. La commune
paya alors 1.359,60 francs. Le 8 janvier 1871, le département étant
imposé pour un million, la part de la commune s'élèvera
à 3.134 francs. Après avoir hésité entre la
restauration des deux petites maisons existantes et la construction sur
le même emplacement d'un bâtiment neuf, le projet se concrétisa
enfin en 1874. Le mobilier fut acheté en 1875; il s'agissait alors
de six longues tables par classe, chacune mesurant 3,60 mètres.
Le système de chauffage fut payé par le comte Greffulhe
de Bois Boudran, partisan de l'éducation populaire: il avait fondé
l'école d'enseignement mutuel de Nangis et possédait du
matériel agricole moderne de démonstration à la ferme
de son château. Garçons et filles occupaient des classes
et des cours de récréation différentes. La classe
actuelle était celle des garçons. Les fillettes avaient
droit à des cours de couture dispensés par des maîtresses
spécialisées; les petits garçons ont échappé
en 1907 à une société scolaire de tir, refusée
par la Mairie. C'était l'époque où les élèves
maniaient des armes en bois et apprenaient à nager sur des tabourets. Georgina Michaut, école de filles
de la Chapelle Rablais, le 17 octobre 1877. La création au chef-lieu
d'une école à deux classes fut un mauvais calcul. Elles
ne fonctionnèrent simultanément que pendant huit ans. Dès
1881, les parents d'élèves des Montils exigèrent
une école pour leurs enfants qui étaient obligés
de faire plusieurs kilomètres à pieds pour se rendre en
classe. Une école leur fut construite en 1883. A cette date, on
ferma donc la deuxième classe de la Chapelle qui fut louée
ensuite, puis laissée à l'usage du garde- champêtre.
La mixité n'étant pas de coutume, la classe des Montils
avait été prévue pour que garçons et filles
ne se côtoient pas: une cloison à mi- niveau séparait
la classe en deux, à partir de l'estrade magistrale. Un bon- point
doit être décerné à la municipalité
de la fin du siècle dernier. Bien que le budget n'ait jamais été
copieux, les conseillers décidèrent, en opposition avec
la préfecture, la gratuité scolaire dès 1877; Jules
Ferry n'imposa cette obligation aux communes qu'à partir de 1881.
Les membres du Conseil s'engageaient même à en payer les
frais de leurs propres deniers si l'autorisation de s'imposer de cette
somme ne leur était pas donnée. Je pense qu'il faut comprendre
par là que M. Debrousse, maire et propriétaire des Moyeux,
s'engageait à assumer cette dépense; ce châtelain
bienveillant légua son château à l'Assistance Publique.
Ouvertures et fermetures de classes
se succédèrent suivant les fluctuations de la population.
Un accroissement du nombre d'élèves et le désir de
scolariser les enfants de quatre ans nécessita la création
d'une seconde classe aux Montils, dans la salle à manger du logement
de fonction; la classe des filles de la Chapelle- Rablais ayant été
louée. En 1959, on ouvrit à nouveau la seconde classe de
la Chapelle- Rablais qui fut encore fermée en 1963. Il n'y eut
plus de classe ouverte au village à partir de 1970: les élèves
étaient conduits aux Montils par M. Beusart; ils n'étaient
plus que neuf ! L'église devait être
au centre des préoccupations d'une commune déclarant 556
catholiques romains sur 557 habitants au recensement de 1851. L'exception
étant un Anglais résidant au château des Moyeux. Le
Registre Paroissial tenu par le curé, transcrivant baptêmes,
bénédictions nuptiales et inhumations est le calque presque
parfait de l'Etat Civil enregistré à la Mairie. Pourtant,
les archives révèlent des moments de friction, pour des
motifs bassement matériels: la commune a toujours été
pauvre. Vers 1830, il lui est demandé de participer à la
création des nouvelles routes; les lois Guizot lui imposent l'entretien
d'une école qui existait peut-être déjà mais
n'apparaissait pas au budget. En mars 1841, le curé Ozouf décède.
Il possédait personnellement le presbytère (qu'il avait
peut être racheté à son prédécesseur
Ponce Péchenard, lequel avait repris le bénéfice
de la Cure à Nicolas Pailla contre 1.000 livres de pension en 1787;
le presbytère ne figure pas dans les biens nationaux confisqués
sous la Révolution). Ce devait être la plus belle maison
du village, la seule de première catégorie, comportant dix
neuf portes et fenêtres, dépendances, granges et colombier;
hélas, dans un triste état. Le presbytère fut rasé,
quelques parcelles vendues ou distraites sans droit par le sieur Lepanot,
d'ailleurs mari de la nièce du curé Ozouf, le bâtiment
actuel fut construit en 1883. Il ne fut jamais attribué à
un prêtre, bien que celui de Fontains l'ait demandé en 1902,
mais loué puis revendu à un particulier en 1934.
Le Conseil Municipal de ladite commune
ayant reconnu l'urgente nécessité de faire réparer, le
clocher de l'église de cette commune, elle même dans sa voûte
et sa couverture et autres parties d'icelle, tant à l'intérieur
qu'à l'extérieur, comme aussi à la sacristie, après
avoir fait un devis estimatif des réparations à faire à
ladite église par un homme de l'art, lequel devis se monte à
la somme de deux cent quarante neuf francs. Procès
verbal des délibérations prises par le Conseil Municipal, session
de 1817 pour 1818 Si, vers le milieu du XIX°
siècle, l'église tombait en ruines, il en était de
même du presbytère, de la maison d'école qui nécessitait
des travaux et même du cimetière dont le mur était
en piteux état: Je suis informé
de l'insalubrité du local affecté à l'école
de votre commune. La cause de cette insalubrité est attribuée:
Les métiers au XIX° siècle Les archives font découvrir les transformations du village: les maisons, les routes, les terres, les bois... Elles permettent aussi d'approcher les habitants de la commune, les hommes et les femmes qui y sont nés puis morts. A compulser ces vieux papiers, on acquiert une certaine familiarité avec quelques uns de ces personnages: ceux qui ont été assez influents pour siéger au Conseil municipal, ceux qui ont été assez malchanceux pour entrer en litige avec l'administration... leur nom peut revenir fréquemment. Ceux qui possédaient leur maison ou des terres figurent aussi sur les matrices cadastrales. Les autres auraient pu traverser le siècle sans laisser d'autre trace que sur les registres d'état civil. Avec les élèves, nous avons retrouvé les nombreuses traces de l'un des anciens maires, Denis Toussaint Félix propriétaire de la petite maison qui a servi d'école. Tous les jeunes gens de vingt ans figurent
sur les listes de conscrits; certains malchanceux partiront à l'armée
pour six ans parce qu'ils auront tiré le mauvais numéro
et que leurs parents n'auront pas été assez riches pour
leur payer un remplaçant. Quel était le métier
d'un jeune homme de vingt ans à la Chapelle Rablais, voici maintenant
150 ans? Bijoutier, voiturier, garçon épicier ou cordonnier:
un seul.; cinq charrons, deux maréchaux ferrants. Des apprentis
ont dû se succéder, année après année
dans les ateliers près de la place du village. Puis ils prenaient
la route pour terminer leur apprentissage, nous avons ainsi retrouvé
les traces de l'un des fils de Félix: Louis Ferdinand qui fut dispensé
de service militaire pour avoir tiré au sort un bon numéro,
mais aussi du fait de sa taille trop réduite: 1,55 mètre.
Plusieurs années successives, il a sollicité un passeport
pour l'intérieur afin de se rendre dans différentes villes
de la région avant d'exercer sa profession de maréchal ferrant
à Coulommiers. Les nourrices Denis Toussaint Félix
dont nous avons recherché les traces avec les élèves
nous a donné l'occasion de fouiller dans bien des documents. Ils
sont présentés dans un programme sur ordinateur "Félix,
maire", mis en forme par les élèves dans le cadre du
Club Informatique. Dans les registres paroissiaux prêtés
par M. le Curé avant qu'ils ne soient archivés au diocèse
et dans les registres d'état civil, nous avons retrouvé
ses actes de naissance, de mariage, son décès. La naissance
de ses onze enfants, leur mariage, les petits enfants... Parmi ceux-ci,
Céline Brigitte ne vivra que 11 mois, Alexandre Hyppolyte un mois
et demi, Louise Victorine sera ondoyée, c'est à dire baptisée
par la sage-femme car morte en naissant, d'autres encore mourront en bas
âge. Le destin le plus triste a été celui de sa fille
Anne Rose qui s'est mariée avec Louis François Picard et
eut 6 enfants. Trois moururent avant l'âge de deux ans, dont Pierre
Joseph pendant l'épidémie de choléra de 1832. Anne
Rose, elle même, décédera avant son père. A
l'époque, le taux de mortalité était de 28 pour mille,
presque trois fois plus que maintenant.
La mortalité infantile est particulièrement élevée;
en 1827, sur 9.961 naissances, 1.541 enfants sont morts avant l'âge
de trois mois. La plupart de ces nourrissons meurent à la fin de
l'été, en août, septembre. dossier
des Archives Départementales, Vivre sous les Bourbons Pendant des siècles, la majorité
des nourrissons sont trimballés par leur mère paysanne qui
les amène avec elle aux champs, dans des paniers d'osier. Il sont
aussi laissés sous la garde de quelque grand-mère ou d'une
grande soeur parfois âgée de moins de dix ans. Dans ce cas,
lorsque le bébé commence à marcher à quatre
pattes, il arrive qu'il finisse par se noyer dans la mare ou dans le puits
de la ferme. Pour toutes les femmes des villes qui doivent travailler,
il est hors de question d'élever au sein un bébé
pendant une année ou deux et de le surveiller à l'âge
où il commence à explorer la maison: la seule solution est
la mise en nourrice... L'épopée
des bébés. Pour terminer, deux personnages qui ont fait jaser dans les chaumières, bien oubliés depuis... Deux personnages ayant défrayé la chronique à leur époque vécurent à la Chapelle Rablais. La fortune ne leur sourit pas de la même manière: l'une eut la chance de devenir châtelaine, l'autre paya bien cher une rixe d'ivrognes.
Eléonore Vergeot Eléonore Vergeot, 21 Champs Elysées, Paris, château des Moyeux, la Chapelle Rablais eut des débuts bien modestes. Elle s'appelait alors Alexandrine, était repasseuse, dans la Somme, dans la ville de Ham. Ce bourg tire sa célébrité d'une forteresse où furent détenus, entre autres prisonniers politiques, Louis de Condé, le prince de Polignac, le général Cavaignac et Louis Napoléon Bonaparte. Celui- ci était emprisonné pour avoir tenté de renverser Louis Philippe en 1836 à Strasbourg puis en 1840 à Boulogne. Il s'en évada en 1846 en endossant les habits de l'ouvrier Badinguet, d'où le surnom qui lui fut donné. Le caractère du prisonnier commençant à s'aigrir du fait d'une chasteté prolongée, il lui fut octroyé une maîtresse choisie administrativement. Une dizaine de jeunes filles furent présentées au prisonnier, pour s'occuper de son linge, par l'entremise d'un abbé qui devint plus tard second aumônier du château impérial des Tuileries et évêque d'Adras. Alexandrine- Eléonore fut choisie; on l'appelait la Belle Sabotière, surnom qu'elle garda quand Louis Napoléon devint célèbre. Mais, en décembre 1842, le commandant du fort de Ham écrit à son ministre: "Par ma lettre du 26 novembre dernier, j'ai eu l'honneur de vous rendre compte que la femme que vous avez autorisée à entrer dans la prison pour visiter et réparer le linge était enceinte..." Le bébé naquit le 25 février 1843 et reçut les prénoms de Eugène Alexandre Louis. Le père demanda à une amie intime, Mme Cornu (aucun rapport avec les seigneurs du XIII° siècle), de le prendre en pension. André Castelot note qu'en mars 1845, à force de repasser le linge du prisonnier, Eléonore met au monde un second fils, Louis. Vous pourrez suivre leur carrière dans les Histoires d'amour de l'histoire de France de Guy Breton. Eléonore ne devint pas impératrice, Napoléon III ayant épousé Eugénie de Montijo en 1853. Elle se maria en 1858 avec Pierre Jean François Bure, frère de lait de Napoléon III, trésorier général de l'Empire qui acquit les Moyeux en 1865. Il revendit le château en 1870, pour partager l'exil de la famille impériale en Angleterre après le désastre de Sedan et la capitulation devant les Prussiens. Eleonore Bure née Alexandrine Vergeot-Camus mourut en 1886. sources: RC Plancke: Nangis et son canton à la belle époque / André Castelot: Napoléon Trois / Guy Breton: histoires d'amour de l'histoire de France tome 9
Vincent Paré En 1783, Vincent Paré,
ancien serviteur de monsieur Belin, curé de la Chapelle Rablais
est accusé: Dans la République de Seine et Marne du 8 décembre 1980, édition de Fontainebleau, page de Montereau.
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