Eleonore Vergeot
châtelaine des Moyeux
Eleonore Vergeot, 21 Champs Elysées, Paris, et châtelaine des Moyeux, la Chapelle Rablais entre 1865 et 1870, eut des débuts bien modestes. Elle s'appelait alors Alexandrine, née en 1820 à Estouilly, dans la Somme, elle était repasseuse dans la ville de Ham. Ce bourg tire sa célébrité d'une forteresse où furent détenus, entre autres prisonniers politiques, Louis de Condé, le prince de Polignac, le général Cavaignac et Louis Napoléon Bonaparte. Celui-ci y était emprisonné à perpétuité pour avoir tenté de renverser Louis Philippe en 1836 à Strasbourg puis en 1840 à Boulogne.
Le caractère du prisonnier commençant à s'aigrir du fait d'une chasteté prolongée, il lui fut octroyé une maîtresse choisie administrativement, sous le prétexte de s'occuper du linge du prisonnier. Une dizaine de jeunes filles furent présentées à Louis Napoléon Bonaparte par l'entremise d'un abbé, Vital-Honoré Tirmarche. Alexandrine-Eléonore fut choisie; on l'appelait la Belle Sabotière, surnom qu'elle garda quand Louis Napoléon devint célèbre.
Mais, en décembre 1842, le commandant du fort de Ham écrit
à son ministre: "Par ma lettre du 26 novembre dernier, j'ai
eu l'honneur de vous rendre compte que la femme que vous avez autorisée
à entrer dans la prison pour visiter et réparer le linge est
enceinte..." Eléonore fut éloignée de la prison
de Ham pour l'accouchement qui eut lieu à Paris, chez un proche du
prince: Pierre Bure.
Des documents relatifs au château figurent dans un chapitre consacré aux maçons migrants venus de la Creuse pour travailler à la Chapelle Rablais.
10° page du dossier sur les maçons de la Creuse. Le château.
La bibliographie sera à chercher
plutôt chez Castelot, Napoléon Trois; Guy Breton, Histoires d'amour
de l'histoire de France 1980, tome IX etc... nombreuses références
sur Internet.
Voir "Eleonore Vergeot, pour l'amour d'un prince" éditions
la Vague verte, ouvrage de Robert Lamouche, qu'il vint présenter dans
le lieu de résidence d'Eléonore Vergeot, le château des
Moyeux, grâce au propriétaire actuel du château qui vous
propose d'y séjourner en chambres d'hôtes.
Les routes d'Eléonore et de Louis
Napoléon divergèrent à partir de l'évasion. Après
la révolution de 1848, Louis Bonaparte fut élu député,
se présenta à l'élection présidentielle qu'il
remporta avec 75% des suffrages et ne tarda pas à renouer avec l'Empire
plébiscité par 96% des votants. Il épousa Eugénie
de Montijo dont il eut un fils, Louis Napoléon 1856/1879, mais ne perdit
pas l'habitude de bondir sur tout ce qui portait jupon. On lui prête,
entre autres enfants naturels, Eugène et Alexandre, déjà
évoqués, Charles, fils d'une actrice, Jules, d'une fille Haussmann,
Arthur, fils de la Castiglione, Bonaventur, qu'il conçut en Suisse,
Benoni, Christian, Emma, Martin ... et Georges Feydeau, dont on ne sait trop
qui est le père: soit l'empereur, soit son demi frère, fils
naturel de la mère de Louis Napoléon, Charles de Morny qui déclarait:
" Dans ma lignée, nous sommes bâtards de mère en
fils depuis trois générations. Je suis arrière-petit-fils
de roi, petit-fils d’évêque, fils de reine et frère
d’empereur."
Si Napoléon III ne désirait plus revoir maîtresse et
enfants, il ne les laissa pas dans la misère. La rente de 1.600 francs
passa à 6.000 lorsqu'il devint empereur, et la dot apportée
par Eléonore montre qu'elle n'était pas démunie: l'usufruit
d'une maison rue St Lazare à Paris, une maison à Eppeville
où logeaient ses parents, des rentes: 8.500 francs ici, 1.500 francs
là, 25 actions de 500 francs, l'usufruit de rentes au nom de ses
enfants...
Ceux-ci ne furent pas oubliés. Après avoir été
confiés "à Miss Howard, la maîtresse
anglaise de leur père, qui les éleva pendant dix ans d'abord
à Paris, rue du Cirque, puis au château de Beauregard, avec
le fils qu'elle avait eu en 1842 de François Montjoy Martyn, futur
comte de Béchevêt," leur mère les reprit
près d'elle.
"Peu de temps avant sa chute, Napoléon acheta à l'intention
de la famille Bure, un vaste domaine situé dans les Landes, au sud-ouest
de Saint-Vincent de Tyrosse, ayant appartenu au Comte Walewski, fils naturel
de Napoléon Ier. Et, par décret impérial du 11 juin
1870, il créait l'aîné de ses fils Comte d'Orx et le
cadet Comte de Labenne." site internet
histoire du Vésinet
L'empereur n'avait pas oublié ses soutiens à Ham: l'abbé
Vital-Honoré Tirmarche qui lui avait présenté Alexandrine-
Eléonore devint second aumônier du château impérial
des Tuileries et évêque "in partibus
infidelium" d'Adras (Adrasée:
Ville de Syrie qui fut autrefois un siège épiscopal , suffrageant
de Séleucie, dans le patriarcat d'Antioche. dictionnaire:
Le grand vocabulaire françois ed Panckoucke)
En 1865, Pierre et Eléonore Bure achetèrent le château des Moyeux à la Chapelle Rablais qui venait d'être entièrement rebâti sur les fondations de l'ancien manoir, par Marie Claude Charles Lemaire qui l'avait acquis de Just Charles Faÿ Latour Maubourg, gendre de La Fayette. La matrice cadastrale garde la trace de la destruction notée pour 1847 et de la reconstruction 1852, au nom de Lemaire.
"Un Château tout blanc, du temps de Louis-Philippe,
se dresse sur la douce inclinaison d'une pente boisée, dans l'encadrement
d'alignements de grands arbres et de futaies, précédé
de parterres à la française. De tous côtés, s'ouvrent
de grandes échappées sur la plaine d'où le regard embrasse
ici des paddocks, là les vastes champs où les attelages assurent
le productif labeur de la terre. A l'image des domaines des gentilshommes
du XVIII° siècle, prairies et cultures se joignent harmonieusement
jusqu'aux abords de la demeure, ajoutant l'intérêt, l'action
et la vie d'une exploitation de culture et d'élevage et d'une chasse
giboyeuse, à l'adorable tableau des architectures de verdures et
de fleurs.
Tout au sortir du petit village de la Chapelle-Rablais qui, à l'instar
de tous les villages agricoles, respire un air de prospérité,
la route de grande communication de Vinneuf à Gastins s'engage entre
de hautes lisses de paddocks qui font présager un vaste domaine.
Bientôt, une haute grille se découpe en un vaste hémicycle,
flanquée d'un pavillon à l'italienne. Au-delà, s'ouvre
une longue avenue droite, accompagnée de larges tapis de gazon, cernés
de plates-bandes jalonnées de formes nettes d'ifs taillés,
comme autant d'accents, et de deux longues contre-allées aux doubles
rangées de platanes.
Cette avenue et son accompagnement, composent un ensemble à la française,
de belle allure, vaste premier plan à la blanche architecture d'une
demeure qui en est la raison d'être et pour la mise en valeur de laquelle
ces arrangements ont été ordonnés. Cette demeure est
le Château des Moyeux, centre d'activité d'un vaste domaine
de culture, d'élevage, de bois et de chasses renommés que
nous allons parcourir... "
Suite de la brochure publiée vers 1920 pour la vente du domaine des Moyeux
Le domaine occupait une vingtaine de personnes à temps plein, qui furent recensées en 1866, sans compter la domesticité qui devait suivre le couple quand ils se rendaient de leur résidence parisienne à leur "campagne". Sans compter non plus les manouvriers qui participaient au travail des terres liées au château.
Le personnel des Moyeux en 1866
Car les Moyeux était le plus gros employeur de la Chapelle Rablais,
ses terres n'ont cessé de s'étendre: entre 1832, date du premier
cadastre et celui 1913, on peut noter la concentration et l'extension des
terres du domaine, jusqu'à posséder près de mille hectares
sur les 1.544 de la commune.
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