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Etienne Fare Charles
Huvier/13
1724/1784 Curé de la Chapelle Rablais...
Notes dans les registres paroissiaux
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Toussaint 2024
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A Marolles Etienne Fare Charles Huvier, vicaire
desservant, eut la reponsabilité des baptêmes, mariages
et sépultures qu'il transcrivit dans le registre paroissial;
en fait "les" registres paroissiaux car ils devaient être
tenus en double. L'un, la minute, signée des témoins,
restait au village, l'autre, la grosse, était adressée
chaque année au greffe du juge royal qui, pour l'année
suivante, mettait à disposition deux nouveaux volumes, l'un sur
papier timbré, l'autre sur papier libre.
Prêtre débutant, Etienne Huvier gardait parfois l'exemplaire
timbré, parfois l'autre. Il prenait le temps de transcrire l'acte
sur la minute, et le faire signer, mais aussi sur la grosse et de faire
aussi signer les témoins. Par exemple, dans l'acte concernant
mon ancêtre, cité à la page précédente,
Edme Allaix qui savait écrire a mis sa marque à droite
sur l'exemplaire en mairie, à gauche sur le registre consultable
aux AD77.
Si l'acte de baptême ne fait que quelques lignes, on peut imaginer
l'impatience des témoins d'une noce, obligés attendre
que le curé ait copié et recopié un texte de plus
d'une page...
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"Registre contenant dix feuillets cottés et paraphés
par premier et dernier en exécution de la déclaration du
Roy du neuf avril 1736 par nous ... lieutenant général civil
et de police au baillage et siège présidial ... pour servir
à l'enregistrement des baptêmes mariages et sépultures
pendant le courant de l'année prochaine... " Exemple
d'en-tête de registre; Cerneux le 10 décembre 1765
Les registres se terminaient par une
formule : "Nous Etienne Fare Charles Huvier,
prêtre du diocèse de Meaux... curé soussigné
, certifieons et attesteons que le présent registre contient tous
les actes faits dans nôtre paroisse pendant le courant de la précédente
année ... qu'il est conforme à celuy que nous avons déposé
au greffe et que foy doit y être adjoutée..."
Orthographe respectée
Feuille volante dans le registre paroissial
en mairie de Marolles en Brie. En haut, reçu du greffe 15 janvier
1750; en bas, quittance de sept sols et six deniers payés par Denis
Hu, marguillier à Louis Mulot de Saint Siméon qui a porté
les anciens registres au greffe et rapporté les nouveaux. 12 février
1750
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Dès qu'il eut accès aux registres paroissiaux,
Etienne Huvier en fit un usage très personnel. Il commença
à rédiger des "nottes" dans les pages blanches.
Au début, seulement six notes durant les trois ans et demi qu'il
passa à Marolles concernant de menus travaux et un fait de société;
près d'une cinquantaine sur les registres de la Chapelle Rablais
pendant sept années : de longues pages sur le presbytère,
la recherche d'un maître des petites écoles, les lourds
travaux à l'église, ses difficultés à percevoir
la dîme...
Et pas loin de deux cents à Cerneux, où il resta plus longtemps,
dix huit ans; ses notes portèrent sur de nombreux sujets: communions
et confirmations, travaux à l'église et au presbytère,
relations avec les paroissiens au sujet des processions dont les Rogations,
longues copies de décrets sur les défrichements, les dîmes
novales, les portions congrues, notes sur la météo et son
incidence sur les prix du blé et du vin, notes sur les curés
voisins, les châtelains, la famille royale, la famille Huvier et bien
d'autres encore...
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Il n'était pas rare qu'un prêtre
complète les actes des registres, principalement pour la sépulture
où la cause du décès pouvait être ajoutée.
Grégory Quenet estime que "14 % des
desservants sont des curés écrivains" soit environ
un sur sept, ce qui me paraît beaucoup; dans toutes les paroisses
dont j'ai parcouru les registres, je n'ai trouvé que deux prêtres-écrivains,
le curé Huvier, et son voisin à Courtacon, le curé
Mercier.
Comme Etienne Huvier, le curé
Mercier a noirci de nombreuses pages vierges de ses registres. Le faisait-il
avant d'arriver à Courtacon et cotoyer le graphomane de Cerneux?
Les recherches dans les registres de Champcouelle, sa cure précédente,
n'ont rien révélé en ce sens. (Merci pour leurs recherches
aux AD77 et à mairie de Villiers St Georges, commune à laquelle
est rattaché Champcouelle depuis 1841). A Courtacon, on trouve
des notes sur la météo, le prix des denrées, les
petits événements locaux, mais aussi la convocation des
Etats Généraux et cet exceptionnel témoignage sur
une catastrophe météorologique dont on ne comprenait pas
alors la cause et que l'on sait maintenant être la conséquence
de l'éruption du volcan Laki, en Islande:
"Dans cette année 1783 nous avons eu
un brouillard ou fumée si épaisse que le soleil paraissait
toujours comme éclipsé. Depuis le dix du mois de mai jusqu’à
la fin de juillet ce qu’aucun ancien ne se souvenait pas d’avoir
vû. Les chaleurs pendant tout ce tems ont été excessives
et l'on attribue à ces brouillards et chaleurs la multitude de
fièvres qui sont venues dans les mois suivants, d’août,
septembre et octobre dont il est mort beaucoup de monde, trois cent grands
corps sont morts dans la ville de Provins, peu de personnes ont été
exemptes de ces fièvres dans la campagne comme dans les villes,
dans ma paroisse de deux cent dix sept âmes, nous n’avons
été que vingt neuf qui n’en n’ont pas été
attaqués, encore j’en ai eu deux accès, cependant
il n’est mort dans ma paroisse que quatorze personnes tant grands
que petits des suites de ces fièvres." Note
du curé Mercier registre paroissial de Courtacon 5 Mi 7836 p 73
"Les curés écrivains commencent toujours à écrire
dès le début de leur charge. L'écriture sur le registre
a une fonction très claire d'appropriation et d'affirmation, parfois
redoublée par une formule de prise de possession de la cure, insérée
parmi les actes." Cette phrase du même Grégory
Quenet semble avoir été écrite pour le curé
Huvier, graphomane qui ne manqua pas de signaler ses prises de possession
de cures, à l'inverse de bien des prêtres dont la mutation
n'est révélée que par un changement de signature.
Grégory Quenet Les tremblements de terre aux XVIIe et XVIIIe siècles
ed Champ Vallon
"Les motivations des curés sont nombreuses et diverses, à
savoir : pour s'inscrire dans la lignée de leurs prédécesseurs
dont ils lisent parfois les registres et y laissent des commentaires".
Ce fut le cas d'Etienne Fare Charles qui relut et annota les registres
anciens. Il a laissé plusieurs traces de ses lectures des registres
précédents; l'une sur l'acte de décès du curé
Guichard, le 28 juin 1754, qu'il se permit de retoucher, nous y reviendrons
plus loin. Le 28 juin 1759, il tira profit d'une page blanche du registre
de Cerneux de 1755 pour y compiler en latin la liste de ses prédécesseurs
(qu'il copia aussi à la fin du registre de 1696, avec quelques
lignes raturées et une faute de latin), avec leur lieu d'inhumation,
le plus souvent dans l'église, sans oublier d'ajouter en fin de
liste les dernières étapes de son propre sacerdoce, passant
sous silence ses années de vicariat : "D.
Stephanus Fara Carolus Huvier Columericus diocesis meldensis, capellae
beate mariae magd. veteri castelli de Columbaris in Bria, ontea capella
arablay propé Nangiacum rector, possessionem adeptis die jovis
prima martin 1759..." poussant même jusqu'à envisager
sa propre inhumation, alors qu'il venait tout juste d'arriver à
Cerneux. Les annotations du curé Huvier
cocheraient presque toutes les cases de la liste proposée par Thierry
Sabot dans son fascicule "Nos ancêtres et les mentions insolites
des registres paroissiaux" coll. Théma
ed. Thisa
Ces ajouts n'étaient pas du goût de l'évéché
: "déffense de rapporter dans les relations
choses inutiles comme l'histoire de la mort" Visite
pastorale de l'évêque de la Barbe AD22 citée par T.Sabot
C'est pourquoi les mentions insolites ne se trouvent que rarement
dans le registre du greffe mais uniquement sur la minute qui restait dans
la cure. De fait, elles n'étaient pas destinées à
être lues, sauf après le départ du prêtre, et
seulement par son successeur : "Lisez la fin
des registres 1768 et 1769, vous y voirez un édit et une déclaration
qui pouront vous être d'une grande utilité pour vous même
et vos amis." Il s'agissait ici d'un édit royal de
mai 1768 "portant fixation des portions congrues"
et des dîmes anciennes et novales, ne pouvant à l'évidence
concerner qu'un prêtre. Une autre (rare) justification de ses "nottes"
concerne la conservation d'actes notariés; en 1763, à propos
d'une grange bâtie dix ans plus tôt : "A
l'occasion de la grange bâtie par Maître François Guichard
mon prédécesseur médiat, on doit trouver chez Mr
Solvet notaire à la Ferté Gaucher et chez Mr Maulnoir notaire
à Courgivaux des actes favorables à cette cure. Mon intention
est d'en lever expédition mais comme elles pourroient être
perdües où enlevées, je fais cette notte afin que mes
respectables successeurs puissent dans l'occasion en faire usage. (L'occasion
peut s'en trouver)"
Registre paroissial de Cerneux en mairie, noté rédigée
en 1767
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On conçoit tout à fait qu'un curé
transmette à son successeur des informations importantes sur
les travaux dans sa cure, les relations avec les paroissiens, la succession
des curés dans les paroisses voisines, les sépultures
des seigneurs dans le caveau de l'église, les épisodes
météo inhabituels, ou des faits divers marquants.
Mais est-on certain qu'un de ses successeurs aura
été intéressé par les deuils dans la famille
Huvier, la promotion de son beau-frère chez les mousquetaires,
l'épitaphe en latin de Messire Henry de Pomponne, marquis de
Reffuge, seigneur de Jaulnes, la plantation d'asperges en 1762, le transfert
de Milan à Cologne des reliques des Rois Mages, les horaires
des postillons depuis la Ferté Gaucher, un accident survenu à
l'archevêque Talleyrand Périgord en traversant l'Aisne
etc... Sans parler de ces deux listes incongrues "Pâques
que j'ai fait dans cette paroisse" qu'il copia à la fin
du registre de 1772 et recopia sur un acte notarié de 1770 "mesurage
et plan figuré de clos, clozeaux et terres novales de la paroisse
Saint Brice de Cerneux" AD77 120 G 1.
Les deux listes ne concordent pas, celle du mesurage se terminant en
1777, date du départ du curé, l'autre, ci-contre oubliant
1777 pour le remplacer par 1779, bizarre, d'autant qu'un simple calcul
aurait suffi, quitte à compter sur ses doigts !
Après avoir usé raisonnablement des annotations dans les premiers
registres, il semblerait que le curé Huvier, vieillissant, leur ait
confié un peu tout et n'importe quoi.
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Sa graphomanie s'est-elle arrêtée
aux registres paroissiaux ou peut-on espérer trouver d'autres
traces d'Etienne Fare Charles? Les papiers familiaux ont été
déposées aux Archives départementales de Seine
et Marne par une descendante et ont donné lieu à un volumineux
inventaire du Fonds Huvier 195 J 1-69.
Hélas, ce dossier ne comporte que deux références
concernant le prêtre, la bénédiction de la chapelle
du château de l'Orme à Courtacon en 1779, voir plus loin
944 F 165 et
un mémoire pour obtenir une bourse par un "jeune
Huvier" 4 Mi 82. qui
n'était pas ce curé, comme on l'a vu à la cinquième
page
Etienne Huvier, après avoir résigné sa cure de
Cerneux passa quelque temps dans la ferme de son frère à
Saints, non loin de Coulommiers où une chapelle fut bâtie
à son intention. Mais il n'y termina pas sa vie, son décès
eut lieu à Paris, paroisse Saint Médard. Ses archives
durent le suivre et les papiers ne furent probablement pas restitués
à la famille.
Il serait étonnant qu'il n'ait pas
tenu un journal, comme ceux qui nous sont parvenus, rédigés
par son père, sa mère, son neveu... Et peut être
a-t'il tenu un "registre des âmes, status animarum"
: "Dressés théoriquement
chaque année après Pâques par les curés,
ces états des âmes, parfois appelés catalogues des
pénitents, visaient à recenser l’état religieux
des âmes de la paroisse." Revue
française de généalogie
"À l'origine, ils contenaient uniquement les informations
religieuses concernant la vie religieuse (bénédictions,
exorcismes, sacrements). Au XVIIIe siècle d'autres informations
ont été apportées : composition détaillée
de la famille, propriétés, profession, âges des
composants, arrivées et départ de la paroisse."
Wikipédia
"Chaque curé doit s'appliquer à tenir bien décrit
et disposé en belle forme l'état des âmes confiées
à ses soins en un livre particulier et réservé
à cet effet. Ceci lui est d'une nécessité impérative
afin qu'il puisse avoir la connaissance entière et précise
de tout le Troupeau confié à la garde du Bon Pasteur."
Statuts Synodaux du Diocèse de Nice
"Les curés ne sont pas tenus de déposer chaque année
à la curie épiscopale un double du Liber Status Animarum,
ce qui dans une certaine mesure pourrait expliquer ce pourquoi on aurait
souvent oublié de les conserver..." Dictionnaire
de droit canonique. Tome VI
Si Etienne Fare Charles avait tenu des
registres des âmes, il aurait été étonnant
qu'il ne les ait pas aussi agrémenté de "nottes",
surtout concernant les fortes têtes qui "murmurent"...
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Il faudra se contenter des apports des
archives : registres paroissiaux avec leurs nombreuses "nottes",
actes chez les notaires royaux et apostoliques et autres sources, peut
être des écrits du chanoine Ythier de Provins que l'on m'a
signalés où il serait question de Huvier. Si vous avez des
informations...
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