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Etienne Fare Charles Huvier/14
1724/1784 Curé de la Chapelle Rablais...
Premiers pas à Marolles, finances

 

Pour le financement de ses deux paroisses, le curé Renard bénéficiait de la dîme, mais il n'était pas seul : le prieur de Choisy "étoit aussi décimateur de toute espèce de dixmes, à l'exception d'un petit canton dont jouissoit le curé Michelin
Sur une somme d'environ 1.000 livres, le curé de Choisy devait gérer deux paroisses et payer deux vicaires, Huvier qui desservait Marolles et François Joseph Sarazin qui l'assistait à Choisy (ce dernier continuera le vicariat de Marolles après le départ d'Etienne Fare Charles Huvier pour la Chapelle Rablais, en 1752, et ce jusqu'à son décès, en 1769; il fut inhumé dans l'église du village.)


Je pensais naïvement que les dîmes n'étaient prélévées que par les curés, pour subvenir à leurs besoins, et que ces prêtres passaient de champ en champ pour désigner la part qui leur revenait. Tout était bien plus complexe!
Les dîmes de Marolles, étaient partagées entre "le prieur, le curé de Choisy, l'abbesse de Jouarre, le chapelain de la Petite Mère Dieu dans l'église paroissiale de Coulommiers et l'Hôtel-Dieu de la même ville." Michelin Essais ... sur le département de Seine-et-Marne 1829/1841
Les décimateurs cités par Michelin étaient tous religieux, parmi eux, le chapelain de la Petite Mère de Dieu que nous avons découvert à la septième page de ce dossier, dont le maigre bénéfice ne s'élevait qu'à 70 livres.
Pour complexifier un peu le tout, un laïc, "Mr de Laval, seigneur de Montferrat &." (que l'on retrouvera plus loin quand le curé Huvier bénira la chapelle de l'Orme de Montferrat à Courtacon) semblait revendiquer le droit de dîmage sur la paroisse de Marolles, puisqu'il en fit lever le plan.


Ce "Plan de dimage de la paroisse de Marolles" ayant subi les outrages du temps (transmis par un descendant de Mr de Laval, que je remercie encore) peut être rapproché du plan d'Intendance (vers 1780) en passant la souris sur l'image. Même orientation, mêmes parcelles, mêmes superficies à une "perche" près. Seuls diffèrent les noms de lieux, plus détaillés sur le plan de dîmage. On trouvera dans la longue page annexe, les recherches relatives à ce plan ainsi que les actes de bénédiction de la chapelle du château de l'Orme.

Doc : Laval de Montferrat, Marolles et Courtacon



Le mode de perception de la dîme de Marolles n'intéressait pas directement Etienne Huvier, son traitement ne dépendait que du curé de Choisy. On ne sait pas quelle somme fut laissée au vicaire de Marolles et à son collègue de Choisy par le curé titulaire pour subsister. Un édit royal du 13 mai 1768 fixa le salaire minimum (portion congrue) à cinq cents livres pour les curés et seulement deux cents pour les vicaires. Qu'en était-il en 1749 et le curé Renard s'était-il montré plus généreux? Le vicaire bénéficiait aussi de quelques faibles biens appartenant à la cure: le presbytère et ses dépendances, ainsi que trois quartiers d'arpent de terre et autant de prés; soit un jardin de curé et de l'herbe pour son cheval.
Source : Biens nationaux AD77 extraits du classeur 1Q...

Il tirait un complément de revenu du "casuel", le paiement des cérémonies religieuses à l'exception des baptêmes et des "obits", les messes en souvenir des morts, dont cette fondation en mémoire de Marie-Geneviève Giraudet et Joseph-Joachim Goblet, duement passée devant notaire:
" Sire Joseph-Joachim Goblet, ancien consul de la ville de Paris, a fondé à perpétuité dans cette église une messe basse tous les lundis de chaque semaine, en mémoire et pour le repos de l'âme de Marie-Geneviève Giraudet, sa chère épouse, qui a puisé sur les fonts baptismaux de cette paroisse les vertus dont elle étoit douée, et pour le repos de la sienne après son décès, avec recommandation au prosne, suivant qu'il est énoncé par le contrat passé devant Hazon, notaire à Paris, le 13 août 1742. Requiescant in pace. Cette épitaphe, en lettres dorées, est à droite dans le choeur, sur un tableau de marbre blanc." Citée dans Michelin

 


Les charges liées à l'église, le cimetière et la maison d'école ne relevaient pas de la Cure, mais de la Fabrique qui en était possesseur et pourvue de biens pour les entretenir. A la suite de donations, la Fabrique disposait de rentes et de terres qu'elle mettait en location. Chaque année, un acte devant notaire fixait les baux arrivés à terme après trois, six ou neuf années de location; de quatre à six renouvellements chaque année de présence Etienne Fare Charles Huvier qui participait à ces réunions, en soutien du marguillier, responsable des fonds, qui était renouvelé tous les ans :
"Ce jourd'huy dimanche quatrième jour du mois d'avril mil sept cent cinquante et un, issus des vespres et complies ditte et chanttée en l'église parroissialle Saint George et St Thomas de Marolle en Brie, les habittans de ladite parroisse étant assemblée au devant de la principalle porte et entrée de l'église et place publique dudit Marolle, après avoir sonnée la cloche à la manière accoutumée et sur le réquisitoire de Mesire Estienne Farre Huvier prestre vicaire de l'église parroissialle dudit Marolle en Brie, pour suitte et diligence de Pierre Duvalle manouvrier demeurant à Bois Saint Georges paroisse de Marolle en nom et comme marguillier et proviseur de l'église parroissialle dudit Marolle a éttée procédé par devant Jacques Christophe Camus nottaire substitut de juré commis aux branches des parroisse de Choisy et Marolle en Brie, dépendant du tabellion de Coulommier en Brie, résident audit Choisy soussigné un bail à loyer et adjudications en délivrance des terres prez et bois appartenant à la dite église fabrique dudit Marolle au plus offrant et dernier enchérisseur à la manière accoutumée, pour les temps terme et espace de trois six ou neuf années consécutives..." Minutes du notaire Camus à Choisy AD77 67 E 20

D'après la liste qui en a été établie pour la vente des Biens nationaux, la Fabrique disposait de cinquante arpents et quarante six perches de terres et prés. Des comptes au brouillon en fin de l'acte de location du 14 mars 1750 semblent comptabiliser, pour l'un des rentes pour cinquante six livres un sol auprès de particuliers "une livre par les héritiers Jean Guiot" et "quinze livres par l'hotelle dieu de Paris", pour l'autre trois cent vingt trois livres et quatre sols qui pourraient correspondre aux locations de terre, sans certitude car les archives de la Fabrique de Marolles sous l'Ancien Régime n'ont pas été conservées. On pourra avoir une idée du budget d'une Fabrique en parcourant celui de la Chapelle Rablais, paroisse où officia le curé Huvier à partir de 1752.

Biens de la Fabrique de Marolles, actes de baux
Doc: Biens nationaux à Marolles en Brie
Budget de la Fabrique de la Chapelle Rablais
Fabrique, marguilliers, hommes vivants et mourants, dossier de trois pages

 



Les dépenses qu'Etienne Huvier fit à Marolles furent minimes : une croix de bois, une niche pour la Vierge...

"Le samedy vingt neuf janvier mil sept cent cinquante deux la niche de la Ste Vierge à été posée. Cette niche à été faite par Prouhasson Bearnet (?) menuisier à Coulommiers. Toute posée elle à couttée vingt livres laquelle somme à été prise sur les quêtes qu'on à coutume de faire pour la Ste Vierge. Les deux branches de fer ont couté chacune vingt cinq livres." Registre paroissial de Marolles en mairie

On trouve une statue de la Vierge dans une niche de l'ancien presbytère, mais s'agit-il de celle installée par le curé? On peut en douter car on ne comprendrait pas l'utilité de deux "branches de fer" qui aurait pu en constituer le support.

Quant à essayer d'en retrouver la trace dans l'église, c'est quasiment mission impossible, tant le bâtiment a été remanié : "Le terrain étant sablonneux et argileux, l'église est plusieurs fois restaurée, notamment au XIXe siècle."
Coulommiers tourisme

Dans sa monographie rédigée en 1889, l'instituteur en traça le plan et l'élévation (ci-contre) et précisa : "En 1811, l'église de Marolles subit une transformation et des réparations importantes. M. Quatre Solz, seigneur et maire, la fit diminuer de deux travées, et la tour d'une très grande solidité, en fut alors séparée, mais en 1812, elle fut également démolie et remplacée par un clocher peu élégant, reconstruit à neuf en 1857. Les pierres provenant de la démoliton de 1811 furent employées à la réparation du chemin du château."
Monographie de l'instituteur AD77 30 Z 251


"Le dimanche sept novembre mil sept cent cinquante un après les vespres, dimanche dans l'octave de la Toussaint, j'ai bénie une croix que j'ai fait planter près le cimetière au coin de la haye du jardin qui appartient à la succursale ... La permission pour faire cette croix m'à été accordée par Mr l'abbé Garnier grand vicaire de M. de Fontenilles évêque de Meaux. L'arbre qui à servi pour construire cette croix à été abbatu dans un petit morceau de pré appartenant à l'église près le Bois de la Bourdonne. Huvier vic. desservant de Marolles.
Notte marginale : J'ai fait mettre cette croix en couleur sur la fin du mois de may mil sept cent cinquante deux par un maître vitrier de Joüy sur Morin, il en a couté neuf livres."
Registre paroissial en mairie
Il ne s'agit pas de ces croix dans le cimetière, mais d'une croix de bois vert tout juste coupé dans un "pré appartenant à l'église", autrement dit, dans les biens de la "Fabrique" qui régla certainement la note de neuf livres pour la peinture.

 

 

Notons que, pour l'érection de cette croix, le vicaire Huvier n'a pas fait référence à une autorisation de son curé, qui ne sera jamais mentionné dans les registres, mais a fait remonter la demande jusqu'à l'épiscopat... Peut être parce que ce n'était pas une simple croix, mais une étape symbolique : "... j'ai bénie une croix que j'ai fait planter près le cimetière au coin de la haye du jardin qui appartient à la succursale. Cette croix a été plantée pour faciliter les stations du jubilé dont j'ai fait l'ouverture le mercredy trois dudit mois. J'ay commencé les processions ordonnées pour le jubilé le onze du même mois jour et fête de Snt Martin après les vespres. La première station à été la chapelle de la vierge, la 2e la croix du cimetière, la 3e celle plantée pour le jubilé et la quatrième le maître autel. La permission pour faire cette croix m'à été accordée par Mr l'abbé Garnier grand vicaire..."

"Les occasions de célébrer un jubilé étaient fréquentes. En plus des Années Saintes – ou plus exactement de leur extension à la catholicité un ou deux ans après les solennités romaines, deux grands types de jubilé étaient proposés aux fidèles; les uns accompagnaient l’avènement d’un nouveau pape ; les autres étaient liés à des circonstances exceptionnelles..." C'était "un temps de grâce, au cours duquel la réconciliation du pécheur avec Dieu est facilitée par l’octroi de l’indulgence plénière et les possibilités de remise des fautes les plus graves par les confesseurs". Site HAL SHS

Vingt huit jubilés universels eurent lieu au XVII° siècle et dix au XVIII°, sans compter plus d'une dizaine particuliers à la France. Etienne Fare Charles Huvier en célébra cinq : en 1751, année sainte, 1759 en l'honneur du nouveau pape Clément XIII, 1766, 1770 pour Clément XIV et 1776 pour Pie VI, nous aurons l'occasion d'y revenir plus loin...
Le pape Benoît XIV avait débuté la célébration du Jubilé du demi-siècle la veille de Noël 1749 en ouvant les Portes Saintes à Rome; les célébrations de cette année sainte eurent lieu en France à l'automne 1751.
Le vicaire Huvier indiqua, en peu de mots, comment elles se déroulèrent dans sa petite paroisse : des processions d'une station à l'autre dans un petit périmètre dans et autour de l'église. En 1776, il précisera les cérémonies et les parcours pour "gagner le jubilé" à Cerneux :
"Suivant la Bulle Confession Comunion, 15 jours de stations dans quatre églises suivant le mandement de son Eminence, confessions, stations et comunions les 15 jours de stations réduits à l'assistance à cinq processions. 1ere station le choeur, 2e la croix du premier cimetière, 3e celle du 2nd, 4° la croix de Saint Pierre... à chaque stations 3 pater et 5 ave Maria" Registre paroissial de Cerneux


Ouverture des portes au Vatican pour le jubilé 2025

Cette simple procession dans une petite commune était fort éloignée des fastes déployés à Chartres, pour ce même jubilé de 1751. Après une procession générale dans les rues de la ville, débuta une mission de vingt huit jours où s'illustra, entre autres prédicateurs, le père Bridayne qui prêcha 256 missions en 45 ans.
"... dès cinq heures du matin l'auditoire était complet, et certains zélés attendaient depuis trois heures l'ouverture des portes de l'église. Des personnes de qualité, jusqu'à l'arrivée des missionnaires, faisaient des lectures édifiantes ou chantaient des cantiques. M. l'évêque disait la messe, puis le père Bridayne prêchait pendant quatre ou cinq heures à genoux avec tant d'onction et d'ardeur que son surplis en était baigné de sueur... quatre mille hommes rangés deux à deux employèrent trois quarts d'heure pour venir se masser devant le grand portique de la cathédrale, lieu destiné jadis aux amendes honorables. M. Guinot, debout devant la porte fermée de l'église, exhorta la multitude à se prosterner devant Dieu, pour lui demander pardon des fautes scandaleuses qu'elle avait commises; le peuple se prosterna donc, après quoi il reçut la bénédiction de la main du prélat."
Célébration du jubilé à Chartres par Emile Bellier de la Chavignerie 1855

 

 

  Suite : les danses de la Saint Friquet

 

 

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