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Etienne Fare Charles Huvier
1724/1784 Curé de la Chapelle Rablais...
Jean Baptiste Laval & Huvier

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En juin et juillet 1789, le célèbre agronome anglais Arthur Young 1741/1820 était en Brie. Il y fut reçu le 29 juin par le marquis de Guerchy, seigneur de Nangis, et de la Chapelle Rablais. Il assista à des émeutes "les prix qu'ils demandent pour le pain sont hors de proportion avec ceux du blé; des injures, on passe aux coups; c'est l'émeute, et l'on se sauve avec du pain et du blé sans rien payer; c'est arrivé à Nangis et dans maints autres marchés."

2 juillet. – Meaux. M. de Guerchy a eu la bonté de me reconduire jusqu'à Columiers; j'avais une lettre pour M. Anvée Dumée... Dîner avec M. et madame Dumée : la conversation, comme dans toutes les villes de province, ne roule presque que sur la cherté des grains.
Arthur Young Voyages en France

Doc : l'agronome Arthur Young à Nangis, 29 juin 1789
Doc : Arthur Young chez le bailli Huvier / Mauperthuis


"Monsieur Anvée Dumée de Columiers" n'était autre que le bailli Jean Huvier, frère du curé, propriétaire de la ferme du Mée à Saints (l'Anglais Arthur Young était un peu fâché avec les noms français!) Le bailli et maire de Coulommiers se piquait d'agronomie, comme nombre de notables de cette époque. "Se consacrant à des travaux agronomes, il collabore notamment au Journal de Paris et est admis comme membre correspondant de la Société royale d'Agriculture en 1787" Wikipédia article Jean Huvier du Mée

"... M. Huvier Dumée, Bailli de Coulommiers, a récemment employé un procédé analogue; il consiste à saupoudrer le Blé noir de poudre de cîment, à le remuer en le jetant à la pelle contre le mur, & à le passer à trois ou quatre reprises au crible incliné. Cette opération simple & facile, a augmenté la valeur du Blé de six sols par boisseau... j'ai reçu des échantillons de pain provenans, l'un de Blé noir, l'autre, du même Blé passé au ciment. Le premier était d'un noir violet, l'autre était blanc... M. Dumée s'est empressé de mander les Fermiers & petits Cultivateurs des qurante-six paroisses qui composent le ressort de son Bailliage; & il les a tous rendus témoins de cette expérience... "
Cité dans : Rapport sur les moyens de purger le blé du noir ... par MM Parmentier Cadte de Vaux et Brocq

Doc : le jardin de la maison du bailli

 

A la même époque, un autre agronome amateur, Jean Baptiste Laval : "Je cultive & fais valoir, comme Fermier & comme Propriétaire, depuis plus de vingt ans, dans l'intérieur & au nord de l'Election de Provins, une grande quantité de terres consistant en prés, bois, vignes, étangs, moulins, & autres natures d'héritages. Pendant longtemps n'ayant jamais suivi dans mon administration rurale que les anciens usages du pays & l'exemple des autres Laboureurs, mes voisins, j'ai eu, comme eux, souvent sujet de me plaindre du peu de fruit que je recueillais de mes travaux : j'ai cherché à en découvrir la cause; & à force d'application, de comparaisons, de recherches & d'expériences, j'ai reconnu mes erreurs, & le remède à y opposer ..." Il préconise l'emploi d'engrais dans la cour de la ferme alternant "des amas de limons amoncelés au bas des terres en pente, des boues sorties de vastes fossés, des buttes de terre qui se trouvent çà & là dans les campagnes, des vieilles chaussées d'étangs détruites ... "avec les fumiers qui proviennent de mes différens bestiaux". Rien de bien nouveau !

Bulletin de la Société royale agriculture de Paris trimestre hiver 1788

Le paragraphe précédent n'est pas de la plus haute importance, j'avoue que j'en ai profité pour exposer une facette du bailli Huvier, frère du curé, et d'introduire le sieur Jean Baptiste Laval.
Les chemins d'Etienne Fare Charles Huvier et de Jean Baptiste Laval se croisèrent plus d'une fois. L'un était curé de Cerneux; l'autre fut, entre 1770 et 1790, homme de confiance de "messire Jean-Louis Quentin de Richebourg, seigneur marquis de Champcenest, Des Marêts et autres lieux, gouverneur du château des Tuileries, à Paris, y demeurant". Champcenest est une paroisse proche de Cerneux; le curé Huvier y fit souvent référence quand il présenta un "compte que veut rendre à l'amiable ou par devant vous Mr le Bailly du bailliage et chatellenie du marquisat de Champcenetz ou Mr le lieutenant, Me Etienne Fare Charles Huvier prestre curé de la parroisse de Saint Brice de Cerneux y demeurant au nom et comme exécuteur testamentaire ainsy qu'il sera cy après expliqué de feu Me Jacques Bouflers décédé prestre curé de Courtacon."

Jean Baptiste Laval fut aussi "fondé de pouvoirs par procuration de monseigneur Jean-Baptiste-Charles-François de Clermont d'Amboise, marquis de Montglas...", le châtelain de Cerneux, à une période (1787-1788) où Etienne Fare Charles Huvier avait déjà quitté cette paroisse.

Baux à loyer par messire Jean-Baptiste Laval pour le marquis de Champcenest AD 77 E 939
Baux à loyer par messire Jean-Baptiste Laval pour le marquis de Montglas AD 77 E 244
Compte d'exécution testamentaire AD 77 254 E 27


"Je cultive & fais valoir, comme Fermier & comme Propriétaire, depuis plus de vingt ans, dans l'intérieur & au nord de l'Election de Provins, une grande quantité de terres...
" Comme son père Charles Joseph 1705/1770 avant lui, Jean Baptiste Laval 1740/1822 fut "agent des affaires" du marquis de Champcenest (ci-contre, l'emplacement du château détruit du marquis de "Champcenetz"; homme de confiance du marquis de Montglas, à Cerneux, ces deux paroisses "dans l'intérieur de l'élection de Provins", comme indiqué dans l'extrait; et il sembla avoir des relations privilégiées avec le marquis de Montesquiou Fezensac, seigneur de Coulommiers et propriétaire à Mauperthuis d'un château et de jardins que visita aussi Arthur Young, "au nord de l'élection de Provins".

Il ne fut propriétaire que quelques années sur la vingtaine où il déclare avoir fait valoir "une grande quantité de terres" Entre 1770 et 1779, il acquit de M. Desgranges le domaine de l'Orme (ou Lorme) à Courtacon, qu'il revendit en 1791 à Anne Charlotte Sophie de Silvestre pour la somme de 80.000 livres.
"L’Orme a été érigé en fief le vingt neuf aout mille sept cent quatre vingt deux par Mr de Montesquiou seigneur de Coulommiers et autres lieux et a pris le nom de Montferrat que porte la pièce de terre dépendante de l’Orme au bois de Fortail, je soussigné pretre curé de Courtacon ait été témoin de cette inféodation." Note du curé Mercier, registre paroissial de Courtacon
Le seigneur dudit lieu était le marquis de Champcenest, comme l'indique la notice de Courtacon dans la Description de la Généralité de Paris... Election de Provins, 1759 : "Paroisse du diocèse de Sens, à 3 lieues de Provins, 30 feux, 80 communians, Patron, S. Martin, Seigneur, M. de Champcenest, Curé depuis 1756, M. Bouflers, L'archevêque de Sens nomme à la cure, qui vaut 800 £. L'étang de Courtaçon renommé pour ses bonnes carpes est desseché." "L'étang était desséché depuis longtemps que, parait-il, les marchands criaient encore dans les rues de Paris "Le bon poisson de Courtacon!" Le poisson avait disparu mais la renommée avait survécu." Monographie de l'instituteur 1889 AD77 30 Z 128
Bien que n'étant pas seigneur du lieu, c'est le marquis de Montesquiou-Fezensac qui éleva cette terre roturière en fief; faveur spéciale pour celui qui était "i
nspecteur général conservateur des chasses eaux et bois dépendant du fief particulier de la chatellenie dudit Coulommiers en Brie" ou enclave dépendant de ladite chatellenie de Coulommiers ?

Jean Baptiste Laval fit de lourds travaux au château de l'Orme "Le Sieur Jean Baptiste Laval receveur des terres de Champcenest et des Marets ayant acheté le château de l’Orme ... de Mr Desgranges ancien exempt des gardes du corps du roi, et l’ayant reconstruit.." Note du curé Mercier
Il y modifia la chapelle "
trouvée dans le cas absolu d'être bénie de nouveau eu égard à gros mur d'icelle chapelle reculé de plusieurs pieds et autres changements notables...." Note du curé Huvier Celle-ci avait été précédemment bénie peu d'années auparavant : "le 21 septembre 1770, a eu lieu, en grande pompe, la bénédiction de la Chapelle du Château de l'Orme, appartenant à M. de Granges, chevalier de St Louis." Monographie de l'instituteur Courtacon 30 Z 128 "...ladite chapelle bénitte par messire Caquia de Monbourg, l'un des vicaires généraux de son Eminence, lors archidiacre dudit Provins dans le cours de ses visittes archidiaconales, le vingt un septembre mil sept cent soixante dix, sous l'invocation de la très Ste Vierge en son assomption glorieuse..." précise le curé Huvier, car c'est lui qui procéda à la nouvelle bénédiction, comme il le nota, dans le seul document de sa main du volumineux fonds Huvier aux Archives départementales.



"Coppie du procès verbal de bénédiction de la chapelle du château de l'Orme paroisse St Martin de Courtacon diocèse de Sens / ladite coppie collationnée à la minutte déposée es archives du secrétariat de l'archevêché du diocèse de Sens. AD 77 944 F 165

L'an de grâce mil sept cent soixante dix neuf le mercredy vingt octobre avant midy, nous Etienne Fare Charles Huvier prêtre du diocèse de Meaux, chapelain titulaire de la chapelle Nôtre Dame Ste Marie Magdeleine de l'ancien château de Coulommiers en Brie, ancien curé dela Chapelle Arablay et de St Brice de Cerneux, diocèse de Sens, en vertu de la commission à nous donnée en datte du dix septembre dernier de laquelle commission coppie collationnée en suitte du présent procès verbal, par Messire Charles Pierre de Biencourt, prêtre bachelier en théologie, licencié en droit civil et canon, vicaire général de son Eminence monseigneur le cardinal de Luynes, archevêque dudit Sens, official de l'officialité diocézaine et métropolitaine chanoine de ladite église et archidicacre de Provins, étant alors en ladite paroisse St Brice de Cerneux dans le cours de ses visites archidiaconales; ladite commission à l'effet de faire la visitte de la chapelle du château de l'Orme paroisse St Martin de Courtacon en ce diocèse.
Le château appartenant à Mr Laval, inspecteur général conservateur des chasses eaux et bois dépendant du fief particulier de la chatellenie dudit Coulommiers en Brie, ladite chapelle bénitte par messire Caquia de Monbourg, l'un des vicaires généraux de son Eminence, lors archidiacre dudit Provins dans le cours de ses visittes archidiaconales, le vingt un septembre mil sept cent soixante dix, sous l'invocation de la très Ste Vierge en son assomption glorieuse, et de la bénir à nouveau, si nous croyons, visitte faitte dicelle chapelle, qu'elle soit susceptible d'une nouvelle bénédiction, nous sommes transporté dans ledit château et visitte faitte de ladite chapelle l'avons trouvé dans le cas absolu d'être bénie de nouveau, en égard à un gros mur d'icelle chapelle reculé de plusieurs pieds, et autres changemens notables. En conséquense, en nous conformant au rituel de ce diocèze, nous avons bénie ladite chapelle présence dudit Laval, de Mre Pierre Mercier prêtre curé de ladite paroisse Snt Martin de Courtacon, de Mre Nicolas André Périgaud prêtre curé de la paroisse la très Snte Trinité des Marets, de Mre Etienne Robert Naret prêtre curé de ladite paroisse St Brice de Cerneux avec nous soussignés, dans laquelle chapelle nous avons, présence comune, dit et célébré à voix basse, ledit jour le Snt Sacrifice de la messe.
Fait audit château de l'Orme les jour mois et an susdits, dont acte ainsy signé sur la minutte des présentes Laval avec paraphe, Mercier curé de Courtacon avec paraphe, Naret curé de St Brice de Cerneux avec paraphe, Périgaud curé des Marets. Huvier anc. C. de Snt Brice de Cerneux."

Le curé Mercier de Courtacon, témoin de cette bénédiction, en livra aussi un compte-rendu, dans le registre paroissial de 1779 :
"Le Sieur Jean Baptiste Laval receveur des terres de Champcenest et des Marets ayant acheté le château de l’Orme ... de Mr Desgranges ancien exempt des gardes du corps du roi, et l’ayant reconstruit, la chapelle ayant été rebénite en l’honneur de l’assomption de la Ste Vierge le vingt octobre mil sept cent soixante dix neuf par messire Etienne Fare Charles Huvier ancien curé de Cerneux par commission de Mr de Biencour vicaire général de son éminence Monseigneur le cardinal de Luynes archevêque de Sens et archidiacre de Provins, en présence de Messires Naret curé de Cerneux, de Mr Perigault curé des Marets et de Mercier curé de Courtacon." Registre paroissial Courtacon AD77 5 Mi 7836 page 53

Le curé Mercier rédigea, dans le registre de 1782, une seconde note à propos de la chapelle de l'Orme-Monteferrat, ce qui laisse supposer qu'il y eut une troisième bénédiction de ladite chapelle, toujours par l'ancien curé Huvier, trois ans après celle de 1779 :
"L’an 1782 le sept novembre a été bénite la nouvelle chapelle de l’Orme aujourd’hui dit de Montferrat scise à droite à l’entrée de la cours par le Sr Etienne Fare Charles Huvier ancien curé de Cerneux, en vertu d’une commission spécial de Monseigneur le cardinal de Luynes archeveque de Sens, signé de Biencourt vicaire général de son éminence et archidiacre de Provins, en présence du sieur Pierre Nicolas Perigault curé des Marets et de moi curé de Courtacon soussigné Pierre Mercier curé de Courtacon."
Registre paroissial de Courtacon 5 Mi 7836 p 66

Quand il bénit en 1799 la chapelle de l'Orme, pour Jean Baptiste Laval, Etienne Fare Charles Huvier avait résigné depuis deux ans sa dernière paroisse, Cerneux, dont le nouveau curé, Etienne Naret, était présent à la cérémonie. Il s'était démis de ses fonctions en 1777 "à cause de [ma] grande infirmité depuis près de sept années" et s'était retiré chez son frère dans la ferme du Mée à Saints, à près de vingt cinq kilomètres de Cerneux où il se trouva pourtant, malgré sa "grande infirmité", le 10 septembre 1779 lors de la visite de l'archidiacre Caquia de Monbourg (celui qui avait béni une première fois la chapelle de l'Orme) qui lui confia la "commission à l'effet de faire la visitte de la chapelle du château de l'Orme paroisse St Martin de Courtacon en ce diocèse" qui eut lieu ce vingt octobre, et aussi plus tard, le sept novembre 1782.

Ce n'est pas l'archidiacre de Provins, ni le doyen rural qui procédèrent à la bénédiction de la chapelle de l'Orme, à Courtacon, mais le simple curé de petite paroisse voisine. Etienne Huvier fut quelquefois sollicité pour des fonctions proches de celles d'un doyen rural : "Les doyens ruraux, nommés par l'évêque, et révocables à sa volonté, mettaient en possession les curés, et après leur mort, les enterraient"
Félix Bourquelot Histoire de Provins tome 1 p 280

Il faut avouer que, vieillissant; Jean Chastellain, curé d'Hermé et doyen rural de Provins se faisait de plus en plus souvent remplacer lors d'inhumations et de prises de possession de cures. Il décéda en 1767 à l'âge de soixante dix ans... Ce n'est pas lui qui mit Etienne Huvier en possession de sa cure en 1759, ni qui inhuma le curé Bouflers en 1762 (Il n'oublia cependant pas de réclamer vingt deux livres pour son honoraire.) Etienne Fare Charles Huvier mit plusieurs curés en possession de leur nouvelle cure, remplaçant le doyen rural :
Le jeudy 23e 7bre 1762 après midy, en vertu de la commission de M. le Chastellin curé d'Hermé doyen rural de Provins, j'ai mis en possession de la cure de Lescherolles Mre Pierre Fourot "
"Le lundy quatre octobre mil sept cent soixante deux avant midy fête de Snt François d'Assise, en vertu de la commission de Mre Jean Chastellain curé d'Hermé doyen rural de Provins, j'ai mis en possession de la cure de Snt Martin de Courtacon Mre Pierre Mercier.."
Notes du curé Huvier, registre de Cerneux

Traces de quelques doyens ruraux et des conférences ecclésiastiques dans les notes du curé


 

Les chemins de Jean Baptiste Laval et d'Etienne Huvier se croisèrent aussi à propos du territoire de la paroisse de Marolles en Brie, proche de Coulommiers, où Etienne Fare Charles fut vicaire, dépendant du curé de Choisy en Brie, de 1749 à 1752 (Voir à ce sujet les pages de la biographie d'Etienne Huvier )
Un descendant de Jean Baptiste Laval, que je remercie à nouveau, m'a transmis ce "Plan de Dimage de la paroisse de Marolles à Mr de Laval, seigneur de Montferrat &c." ayant subi les outrages du temps...

 

 

Il n'existe pas de lieu-dit "Montferrat" à Marolles et Jean Baptiste Laval n'était pas seigneur dudit lieu : "Il y avoit deux fiefs : celui de la Hante à M. Quatresous (Quatresolz), et celui de la Cresonnière à M. de Caumartin, seigneur de Boissy le Châtel; celui-ci avoit justice." Michelin D'ailleurs, sauf exception, voir plus loin, un seigneur ne levait pas la dîme, mais le "cens".
Sans avoir besoin de chercher dans des contrées éloignées (Isère, Var, Italie...), il s'agit de ce même Montferrat de Courtacon, paroisse voisine de celle de Cerneux où officia aussi le curé Huvier.

Ce plan n'est pas daté, mais il présente de très fortes ressemblances avec le Plan d'Intendance de cette paroisse. AD77 1 C 31/11 Le tracé des parcelles est identique, elles sont semblablement ombrées, seuls diffèrent les noms des hameaux et des lieux-dits, d'une écriture différente, plus complets sur le plan de dîmage; ainsi qu'une toute petite différence : une perche de vigne en plus sur le plan d'Intendance, sur les 1875 arpents et 03 perches qui y sont métrées. Espérons que le sieur Laval aura eu l'occasion de copier le fond de carte du plan d'Intendance, grâce à ses liens avec les marquis de Champcenest, Montglas ou Montesquiou; on n'ose imaginer le coût d'un nouveau métrage...

 

 

De quand date cette carte ? Le plan d'Intendance de la paroisse de Marolles a été levé entre 1779 et 1783, d'après la notice des Archives de Seine et Marne, et certifié plus tardivement par le géomètre, le 1° août 1787.

D'autre part, Jean Baptiste Laval n'a pu se qualifier de "seigneur de Montferrat" qu'à partir d'août 1782; auparavant, sur le plan d'Intendance de Courtacon, le château ne s'appelait que "de Lorme" pour être nommé en 1824 "Lorme Montferrat" dans le cadastre napoléonien, voir la carte-ci-dessous. Les relations des bénédictions de la chapelle du château, ci-dessus, l'appellent "L'Orme" en 1779 et "l’Orme aujourd’hui dit de Montferrat" en 1782:
"L’Orme a été érigé en fief le vingt neuf aout mille sept cent quatre vingt deux ... et a pris le nom de Montferrat que porte la pièce de terre dépendante de l’Orme au bois de Fortail, je soussigné pretre curé de Courtacon ait été témoin de cette inféodation."

Note du curé Mercier, registre paroissial de Courtacon.

Baptiste Laval n'aurait pu faire figurer la mention "seigneur de Montferrat" qu'à partir d'août 1782, et ce, jusqu'au 22 décembre 1791, quand il revendit sa propriété, et même avant cette date puisqu'à partir du 2 novembre 1789, les biens du clergé avaient été "mis à la disposition de la Nation" et le plan de dîmage n'avait plus lieu d'être.


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Ci-contre, le château ne s'appelle que "de Lorme" sur le plan d'Intendance de Courtacon pour être nommé en 1824 "Lorme Montferrat" dans le cadastre napoléonien.
Plan d'Intendance AD77 1 C 58/7 / Cadastre AD 77 4P37/6842

 

Le mot "dîmage", d'un emploi assez rare, est en rapport avec la perception de la dîme que l'on associe le plus souvent avec l'impôt en nature que prélevait le curé du lieu pour sa subsistance. Pour simplifier ! Car les choses pouvaient être bien plus complexes sous l'Ancien Régime...
Par exemple, à Cerneux, dans le "mesurage et plan figuré des
clos, closeaux et terres novales ... par François Migneret arpenteur royal au bailliage et maîtrise particullière des Eaux et Forests de la Ferté Gauché", le géomètre à l'orthographe particulière nota la répartition de la dîme dans cette paroisse : "Les gros décimateurs ses confrerre quy sont les seigneurs de Monglas pour un thiers, monsieur le prieur de la Ferté Gauché pour un autre thiers, et ledit sieur curé dudit Cerneux pour l'autre thiers."
18 juillet 1770 AD 77 102 G 1
Parmi des religieux, on note un décimateur laïc, le seigneur du lieu. Par quel détour de l'Histoire le marquis de Clermont d'Amboise s'est-il trouvé parmi les décimateurs de Cerneux? Peut être pour la même raison que pour ce petit village de l'Essonne :

"Au Val-Saint-Germain, dans le XIIIème siècle, la dîme se trouvait inféodée, c’est-à-dire qu’elle avait été érigée en fief et appartenait au seigneur. Cette circonstance se présentait partout où, par spéculation, le seigneur, ayant fait construire l’église l’affermait à un prêtre, à la charge de la desservir, er moyennant une redevance, ou bien sous la réserve de la dîme, que le seigneur, conservait et qu’il aliénait ensuite quelquefois." Louis Richard Vian Histoire du Village de Saint-Chéron 1873-1875 tome 1 p 154

Le "dîmage" concernant la perception de la dîme, il aurait été logique qu'un "Plan de Dimage de la paroisse de Marolles" ait été tracé pour l'un des décimateurs qui, dans cette paroisse, étaient "le prieur, le curé de Choisy, l'abbesse de Jouarre, le chapelain de la Petite Mère Dieu dans l'église paroissiale de Coulommiers et l'Hôtel-Dieu de la même ville" Michelin
Aucune mention d'un laïc. Par quel cheminement ce
"Mr de Laval, seigneur de Mont-ferrat &c." s'est-il trouvé amené à lever la dîme à Marolles? Il aurait pu racheter la part du droit de dîmage de l'un des ayants-droits, auquel cas, il aurait fait une très mauvaise affaire qui n'aurait couru que sur une dizaine d'années, au maximum, avant la vente des biens de l'église, décret du 2 novembre 1789.


Il est aussi possible que Jean Baptiste Laval ait pris à bail la perception d'une partie des dîmes de Marolles. La pratique était courante; plutôt que de prélever directement les fruits de la terre (ce qui supposait de nombreux aides, des chevaux, des voitures, des espaces de stockage...), les curés avaient souvent mis aux enchères le "bail des dixmes" à un fermier. Ci-dessus, l'en-tête d'un bail passé le 4 octobre 1772 par le curé Huvier à Louis Laplaige, concernant la perception des dîmes de Pierrelez : "C'est à savoir toutes et chacunes dixmes de telle nature qu'elles puissent être et sans aucune réserve appartenantes au sieur bailleur dans ladite parroisse de Pierrelay en sa qualité de desservant... le prix et somme de trois cent cinquante livres en argent (plus loin : payable en trois fois 87 livres), et cinquante boisseaux de bled froment... à la mesure de la Ferté Gaucher... (livrable) à son grenier audit lieu de Cerneux ou sous la halle de laditte Ferté Gaucher..." Minutes du notaire Jean François Leboeuf, Augers AD77 253 E 279

A quoi pouvait correspondre ce "dîmage" ? Le transfert des droits de l'un des décimateurs à Jean Baptiste Laval ? La trace d'un "bail de dixmes" ? Le coût de cette grande carte aurait-il été justifié pour un bail de location pouvant courir sur seulement trois, six ou neuf années, sans certitude de renouvellement ?
Il faudrait découvrir l'acte qui lèverait l'ambiguité, et je ne l'ai pas encore trouvé, ni dans les minutes des notaires (l'un résidait à Choisy même, dont on a conservé, parmi les minutes, des liasses spécialement consacrées aux baux des Fabriques de Choisy et Marolles, mais pas au prieuré de Choisy
AD77 67 E 20), ni dans les "Tables des baux des biens de gens de main-morte", n'ayant rien donné pour Coulommiers et manquant pour la Ferté-Gaucher; il faudrait chercher à nouveau à Meaux.

 


Jean Baptiste Laval fut, comme son père, régisseur au service du marquis de Champcenest. Son frère Joseph, après avoir été garde général de la conservation de la forêt de Gault, était aussi régisseur,
"concierge au château de Choisy en Brie" Il n'existait pas de château à Choisy, cependant, on y trouve de nos jours une "ferme du château" sur la place du village de Choisy, ancienne demeure du prieur.
Flohic, patrimoine des communes de Seine et Marne

Autrement dit, le frère de Jean Baptiste Laval était au service du prieuré de Choisy, le plus gros décimateur de Marolles. Il est possible qu'informé par son frère, Jean Baptiste Laval ait perçu les dîmes des moines de Choisy sur Marolles.

Il est aussi possible que le "seigneur de Montferrat" ait été en contact avec Louise Madeleine Charlotte de Barentin de Montchal, épouse Quatresolz, seigneur de Marolles, que nous avons découverte à la troisième page de se dossier.
Elle possédait, non loin de Cerneux et de l'Orme, une ferme, le fief de Villiers Templon sur le territoire de Saint Mars, et correspondait avec le curé de cette paroisse pour qu'il transmette des instructions à son fermier. Cette correspondance entre le curé de St Mars et Madame Quatre-Solz de Marolles, née Louise-Madeleine-Charlotte de Barentin de Montchal lui fut fatale; elle servit de base à l'accusation pour écrits contre révolutionnaires. Le prêtre, l'épouse Quatre Solz et son fils, furent pris accusés de complot dans la "conspiration de Coulommiers", condamnés et guillotinés le 10 frimaire an II (30 nov. 1793)

Quelques mois plus tard, le 9 ventôse an II, une autre session du Tribunal révolutionnaire condamna une dizaine d'autres accusés de ce complot de la "petite Vendée briarde", parmi eux, deux prêtres, des laboureurs, des artisans et deux gardes :
"434 Joseph Davale, âgé de 46 ans, né à la paroisse de St-Thibaud, ci-devant évêque (évéché) de Toul, résident à Choisy, ci-devant garde de chasse, district de Rosay, département de Seine et Marne, complice des ci-dessus, a été condamné à mort et exécuté le 12 ventôse
435 Jean-Etienne Raby, âgé de 60 ans, né à Maupertuy, garde des bois nationaux, ci-devant appartenant à l'émigré Montesquiou, résident à Maupertuy; tous convaincus d'être auteurs ou complices d'un complot qui a existé dans plusieurs communes du district de Rosay, département de Seine et Marne, le 23 février dernier, et s'y être continué le 24 et 25, tendante à renouveler une nouvelle Vendée, où plusieurs citoyens ont été tués, les autres ont couru risques de leur vie, et le drapeau national outragé; ils ont été tous condamnés à mort, et exécuté le 12 ventôse (2 mars). Fin des conspirateurs de Coulommiers"

Liste générale et très-exacte de tous ceux qui ont été condamnés à mort par le Tribunal Révolutionnaire établi à Paris, Volume 2 p 23

En Joseph Davale, né à St Thibaud, il faut reconnaître Joseph Laval, né en 1746 à St Thiebault, Haute Marne, frère de Jean Baptiste né au même lieu en 1740, ce dernier ayant traversé sans encombre la Révolution et devint maire de Provins.

 

 

On peut comparer le plan de Marolles avec l'un des rares plans de dîmage conservés aux Archives départementales de Seine et Marne, celui de la Haute Maison "appartenant à messieurs du Chapitre St Etienne de Meaux pour deux tiers, et l'autre tiers appartient au sieur prieur dudit lieu de la Haute Maison". AD77 Plan G 69 / Matrice G 70 On constate alors que, sur celui de Marolles, manque un élément important : une numérotation permettant un renvoi à une matrice où étaient répertoriées les parcelles avec leurs natures et leurs propriétaires. Ce plan de Marolles n'aurait eu que peu d'utilité pour la perception de la dîme; comme sur le plan d'Intendance les parcelles y sont figurées par "masses de culture" et non suivant les différents cultivateurs.

 

Par contre, il expose clairement la répartition des ces "masses de culture" et est plus précis que le plan d'Intendance pour la localisation des hameaux et des lieux-dits; idéal pour représenter le territoire de la paroisse de Marolles à quelqu'un qui ne le connaîtrait pas très bien, comme Jean Baptiste Laval, résidant à quelque distance, Champcenest puis Courtacon. Ce bel objet aurait aussi pu ajouter au prestige du tout nouveau "seigneur de Mont-Ferrat &c." montrant que le pouvoir de Jean Baptiste Laval dépassait les limites de sa petite seigneurie, s'étendant "dans l'intérieur & au nord de l'Election de Provins".
Ceci n'est qu'une réflexion personnelle; n'hésitez pas à la critiquer et proposer votre alternative, merci d'avance.

 

 

Cette très longue page regroupe des paragraphes qui trouveront certainement une nouvelle place dans les pages à venir...