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Etienne Fare Charles Huvier/3
1724/1784 Curé de la Chapelle Rablais...
nourrissons & nourrices

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"Jeanne Marie Charlotte Huvier fille de Charles Antoine Huvier et de Marguerite Bazier de la paroisse de Coulommiers a rendu son âme à Dieu le vingt neuvième septembre mil sept cent vingt et un, étoit âgée d'environ quatre mois et son corps a été inhumé dans le cimetière de cette paroisse le même jour par moy Antoine Meunier curé en présence des soussignés. Christophe Cheron, Dupré, Meunier"
Registre paroissial St Germain sous Doue 5 Mi 5716
Acte, hélas, fort commun, car à cette époque, un enfant sur quatre décédait avant son premier anniversaire, un autre avant d'atteindre l'âge adulte.

Même chez les proches de la famille Huvier, notables aisés de Coulommiers, les décès en bas âge n'étaient pas rares, surtout dans la famille de l'épouse du bailli Jean Huvier, Elisabeth Marguerite Hébert : Alphonse Denis ne vécut que du 24 septembre au 9 octobre 1728; Jeanne Marie Magdelaine une année entre le 4 juin 1730 et le 5 septembre 1731; un seul mois pour Denis Armand du 22 avril au 23 mai 1733; Jeanne Françoise de Paule décéda après une quinzaine de jours, du 2 au 18 avril 1738. Alexis Henri vécut trois ans, sept mois et cinq jours comme le nota son père, il eut droit à une épitaphe, ce qui ne fut pas le cas des nourrissons où seul le décès est mentionné. (Voir page suivante)
Ci-dessus, le journal de Pierre Nicolas Hébert, recopié par Antoine Huvier, neveu du curé, relate les circonstances particulièrement éprouvantes de la venue au monde d'une fille en 1726. Le registre paroissial de Coulommiers en relate une version un peu différente : l'enfant venue avant terme ne fut pas baptisée par le chirurgien, mais simplement "ondoyée", elle n'eut ni parrain, ni marraine, ni même de nom, ce qui fait très fortement penser à un bébé mort-né, donc dans l'impossibilité d'être baptisé et inhumé en terre consacrée, comme on l'a vu en page précédente. Le vicaire ayant procédé à l'inhumation avait d'abord écrit: "née et décédée d'hier" avant de rayer cette dernière mention et la remplacer par "née et ondoyée du même jour et décédée aujourd'huy". Le père avoue que l'enfant est morte "quelques moments après" sa naissance, le curé la fait mourir le jour suivant... A l'évidence, il y eut accomodement entre le notable et le prêtre pour que l'enfant puisse être inhumé en terre consacrée. Par contre, un neveu du curé, venu après seulement cinq mois de grossesse, vécut effectivement du 3 au 5 septembre 1749.
Nicolas Lefort de Champroger, fils de Jeanne Charlotte Marguerite Huvier Coulommiers 5 Mi 2260 p 320
Une petite parenthèse à propos de la variole, la "petite vérole" qui grêla tant de visages et fut à l'origine de l'accouchement prématuré en 1726. Louise Madeleine Barentin en fit un commentaire plutôt primesautier, que n'auraient probablement pas apprécié les parents Hébert:
"Vous m'avez fait trouver, Monsieur, le seul désavantage que j'ai eu à avoir la petite vérole, puisqu'elle est cause que j'ai été privée d'avoir l'honneur de vous posséder à Marolles. Je sais que vous la craignez beaucoup, mais peut-être seriez-vous revenu de ce préjugé, si vous nous aviez vus quatre attaqués de cette jolie petite maladie, la manière dont elle nous a traités est vraiment attrayante. Je me trouve si heureuse de l'avoir eue, que je la désire de même nature à toutes les personnes à qui je m'intéresse. J'en éprouve une satisfaction, un bien-être que l'on ne peut rendre que lorsqu'on l'a éprouvé. Je vais tête levée dans les rues montrer à tout le monde mon joli masque couleur de rose. Je suis toute fière, même lorsque j'entends dire autour de moi: « Tiens, regarde-la donc, elle a eu la vérole. » J'en ris !"
Lettre du 5 janvier 1791 au curé Cagnyé de St Mars

Bien que n'étant pas de la même génération, Louise Madeleine Charlotte de Barentin de Montchal put être en relations avec le curé Huvier. Elle épousa en 1769 Nicolas Michel Quatresolz, seigneur de Marolles en Brie, proche Coulommiers, où Etienne Fare Charles Huvier fut curé de 1749 à 1752; il avait gardé contact avec cette paroisse puisqu'il fit venir auprès de lui Louis Guinand, maître des petites écoles à la Chapelle Rablais, puis Pierre Leroy dit Dauphin, son domestique à Cerneux, tous deux originaires de Marolles. Louise Barentin entretint une longue correspondance avec le curé de Saint Mars (aujourd'hui St Mars/ Vieux Maisons), entre autres, pour transmettre des instructions au fermier de leur fief de Villers Templon dans cette paroisse, dont quelques parcelles sur Cerneux furent redevables de la dîme auprès du curé Huvier. Cette correspondance entre le curé de St Mars et Madame Quatre-Solz de Marolles, née Louise-Madeleine-Charlotte de Barentin de Montchal lui fut fatale; elle servit de base à l'accusation pour écrits contre-révolutionnaires.
Le 10 frimaire an II "Dans la charrette qui conduisait les condamnés au lieu du supplice, se trouvaient son fils, Charles-Nicolas Quatre-Solz de Marolles, un cousin de son mari, Pierre Quatre-Solz de la Hante, trois prêtres, Jean-Pierre Le Bas, curé assermenté de Coulommiers, Jean-Baptiste Cagnyé, curé de Saint-Mars, également assermenté, Augustin Leuillot, curé de Saint-Remy de la Vanne etc."

Les lettres d'une mère : épisode de la Terreur 1791-1793 publiées par Victor Quatre-Solz de Marolles en 1901 / à retrouver sur Gallica

 

Revenons à la soeur du curé, Jeanne Charlotte : "Le vingt quatre may mil sept cent vingt et un, entre une et deux heures du matin, le vingt neuf de la lune" naquit à Coulommiers Jeanne Marie Charlotte, soeur d'Etienne, qui ne vécut que quelques mois : "Jeanne Marie Charlotte Huvier fille de Charles Antoine Huvier et de Marguerite Bazier de la paroisse de Coulommiers a rendu son âme à Dieu le vingt neuvième septembre mil sept cent vingt et un, étoit âgée d'environ quatre mois et son corps a été inhumé dans le cimetière de cette paroisse le même jour ..."
Registres paroissiaux de Coulommiers AD77 5 Mi 2255 /Saint Germain sous Doue 5 Mi 5716 / Journal d'Antoine Huvier 195 J 8 p 6 recto

"Morte le 29 7bre 1721 à Snt Germain sous Doue inhumée ledit jour dans le cimetière dudit lieu" note Charles Antoine Huvier, le père, dans son journal, en marge de son baptême. AD 77 195J8
Ni le père, ni la mère, ni le parrain Denis Person, oncle maternel de la femme de Charles Antoine, ni sa marraine Jeanne Daulx qui était aussi sa grand-mère paternelle; aucun proche n'assistait à l'inhumation. Le décès de Jeanne Marie Charlotte n'avait d'ailleurs pas eu lieu à Coulommiers, lieu de résidence de la famille, mais dans le petit village de Saint Germain sous Doue, une lieue et demie à vol d'oiseau. Il n'aurait pourtant pas été bien difficile d'envoyer un messager jusqu'à Coulommiers pour informer la famille du dècès, quitte à retarder un peu l'inhumation qui fut faite le jour même.

Dans des familles de notables proches des Huvier, nombre de nourrissons signalés plus haut sont décédés dans des villages autour de Coulommiers, dans un rayon de 3 à 6 kilomètres, moins d'une heure à pieds :

  1. à Aulnoy, le 22 mars 1779 , Anne Jean Perrine Ogier de Baulny nièce du curé par sa soeur
  2. à Saint Germain sous Doue, Jeanne Marie Charlotte, soeur d'Etienne le 29 novembre 1721
  3. à Champ Breton, paroisse de Boissy le Châtel Alphonse Denis Hébert le 9 octobre 1728
  4. à Forette, paroisse de Beautheil, le 18 avril 1738, Jeanne Françoise de Paule, septième fille du couple Hébert
  5. le 23 mai 1733 décès de Denis Armand Hébert à Barny, paroisse de Saint Augustin

Tout semble indiquer que les nouveaux-nés avaient été mis en nourrice à la campagne, ce que confirme une note du journal du père à l'occasion de l'inhumation de Jeanne Françoise de Paule Hébert: "en présence de Pierre Robinot, manouvrier à la Grande Foiret où elle étoit en nourisse". Il en est de même pour les décès d'Alphonse Denis décédé "au village de Champ-Breton près Boissi où il étoit en nourrice" et de Denis Armand Hébert "décédé au village de Barny, paroisse St Augustin où il étoit en nourrice"; et si la précision manque pour les petites Jeanne Marie Charlotte Huvier et Anne Perrine Ogier de Baulny, on se doute bien de la cause de l'éloignement...
Sources : Journal d'Antoine Huvier / Registres paroissiaux Aulnoy 6 E 15/1 p 312 & Beautheil 6 E 30/1 p 243 /lacunes pour Boissy et St Augustin

Il est fort possible que les enfants survivants aient eux aussi été placés en nourrice, mais pour le prouver, il faudrait trouver un acte qui n'a peut être jamais existé, comme on le verra plus loin. Le curé Huvier a peut être passé les deux premières années de sa vie dans une famille de paysans, dans un village proche de Coulommiers; rien pour le confirmer, mais c'était, hélas, dans l'air du temps...

Quand on pense "nourrice", on évoque le plus souvent celles du Morvan, donnant leur lait aux rejetons des plus belles familles parisiennes dans leurs luxueuses demeures. A Paris, en 1780 on recensait ainsi mille nourrices à domicile, autant que de mères qui allaitaient. Une infime proportion par rapport aux dix-neuf mille campagnardes qui, chaque année, accueillaient des "Petits Paris". Tels étaient les chiffres : seulement un enfant sur vingt et un était nourri par sa mère, et le plus grand nombre était envoyé à la campagne; soit dans les banlieues les plus proches, les plus chères, où les parents pouvaient rendre visite à leurs rejetons, soit dans des villages plus reculés, plus abordables pour les bourses des parents, souvent modestes artisans, mais trop éloignés pour envisager une visite au bébé jusqu'à son sevrage. L'hôpital des Enfants Touvés, aux finances restreintes, était obligé d'envoyer ses protégés dans des villages encore plus éloignés. "Les gens mettent leurs enfants en nourrice à la campagne et ne se soucient pas d’eux pendant un an ou deux." Princesse Palatine lettre du 4 août 1718

Comme de nombreux villages d'Ile de France, la Chapelle Rablais accueillit des bébés en nourrice, révélés par le grand nombre de leurs décès. Entre 1749 et 1852, on dénombre près de deux cents nourrissons qui y moururent, la plupart étant originaires de Paris, l'adresse et le métier des parents y est même précisé. Combien ont été placés dans ce petit village d'une centaine de feux, moins de quatre cents habitants sous la Révolution; combien ont survécu ?

  Traces des Petits Paris à la Chapelle Rablais
  Traces des Petits Paris: tableau récapitulatif

Les hospices cherchaient aussi des nourrices, pour les jeunes orphelins, mais surtout pour le grand nombre d'enfants abandonnés à la naissance, rares à la Chapelle Rablais : "Le vingt six mars (1760) a été baptisé Anne Alexandre fils de père et mère inconnu reçüe et présenté par Margueritte Bectare (Bectard) femme de Antoine Rondinet maîtresse sage femme..."
Registre paroissial la Chapelle Rablais 5 Mi 2828 p 230

A la campagne, les abandons dès la naissance étaient rares, comme ce bébé "reçu" par la sage femme du village. Comment cacher les derniers mois de la grossesse, comment accoucher (en silence) sans témoins? Marguerite Bectard, la sage-femme a-t'elle vraiment découvert le bébé devant chez elle, a-t'elle accouché discrètement la mère en gardant le secret sur son identité?
En ville, les abandons se multiplièrent tellement que, pour garantir la survie des nouveaux-nés, souvent laissés au seuil d'une église, certains hospices se dotérent de "tours d'abandon", comme celui du couvent des Cordelières, ci-dessus, conservé au Musée de Provins.

Certaines filles célibataires avaient cherché à se débarrasser définitivement de leur nouveau-né, ce que combattirent évidemment les autorités, tant laïques que religieuses car le nourrisson privé de baptême ajoutait la damnation au meurtre (voir page précédente). Henri II publia en 1756 un édit qui enjoignait les filles célibataires enceintes à déclarer leur état.
".. Et estant düement avertis d'un crime très énorme & exécrable en nostre Royaume, qui est, que plusieurs femmes ayant conceu enfant par moyens déshonnettes ou autrement, déguisent, occultant et cachant leurs grossesses, sans en rien découvrir et déclarer; Et avenant le temps de leur part, & délivrance de leur fruit, occultement s'en délivrent puis le suffoquent, meurdrissent, & autrement suppriment, sans leur avoir fait impartir le Saint Sacrement de Baptême. Ce faict les jettent en lieux secrets & immundes, ou enfouïssent en terre profane, les privans par tel moyen de la sépulture coutumière des chrétiens..."
La déclaration de grossesse devait être faite auprès des lieutenants des baillis ou sénéchaux, procureurs fiscaux, notaires, greffiers, consuls dans les villes : "Laquelle fille ... pour satisfaire aux ordonnances de sa majesté nous a dit et déclarée par serment prêté entre nos mains de dire vérité, être enseinte d'environ six mois des œuvres de monsieur ..." Exemple de déclaration publiée dans Geneawiki

Un exemple local : le 17 janvier 1776, Angélique Mellin, domestique de la paroisse Sainte Croix à Provins, accoucha d'un enfant naturel, Joseph Ange; Joseph Croutel domestique de la paroisse de St Quiriace en étant le père (leur état de domestiques ne favorisait pas le mariage). La sage femme qui l'accoucha précisa : "laditte Gauthier nous a assuré que la mère avoit fait sa déclaration en justice". Les parents durent abandonner leur bébé, il décéda à Brie Comte Robert sur le chemin des Enfants Trouvés de Paris, âgé de quatre jours; on en retrouvera la trace à la page des "morts en passant". Baptême : Sainte Croix 5 Mi 6256 / décès Brie Comte Robert 5 Mi 7376

  Morts en passant

Les curés étaient tenus de "fulminer" cette ordonnance d'Henri II quatre fois par an, au prône de la messe. Le registre paroissial de Pierrelez que desservit le curé Huvier, en même temps que Cerneux, en garde les traces, le 5 janvier 1773 et le 11 janvier de l'année suivante, les deux actes sont fort tachés, d'où les lacunes dans leur transcription : "Nous Etienne Fare Charles Huvier prêtre du diocèze de Meaux, ancien curé de la Chapelle Arablay près Nangis, chapelain titulaire de la chapelle Nôtre Dame de Snte Marie Magdeleine du vieux château de Coulommiers en Brie depuis mil sept cent quarente cinq et en cette qualité aumonier de Monseigneur le duc de Luynes, curé soussigné desservant nôtre Dame de Pierrelay .... que pendent le cours de ladite année... d'Henry deux concernant les femmes et les filles enceintes à été publié tous les trois mois au prône des messes paroissiales. Fait à Cerneux ce mardy cinq janvier mil sept cent soixante treize. Huvier C. de St Brice de Cerneux dessvt N.D. de Pierrelay"
Registre paroissial de Pierrelez AD 77 5 Mi 5925

 

 

Les curés avaient aussi la charge de contrôler la mise en nourrice des bébés. Un "Certificat de renvoi pour les nourrices" est resté glissé entre les pages du registre paroissial de Cerneux, car il n'avait jamais été envoyé, le bébé étant décédé comme l'indique la note marginale du curé Huvier : "décèdé le mercredy 30° Xbre 1767 (30 décembre), et inhumé le lendemain dans le cimetière près l'églize. Ledit enfant décédé d'un flux de sang qu'il avoit depuis trois semaines/. Huvier curé desservant St Brice de Cerneux"
"... [la gestion de ces petits] fut placée sous l'égide du Châtelet de Paris pour la justice, et du curé de la paroisse pour le reste : la religion, la morale, l'état civil, le suivi et les courriers aux parents, l'envoi de l'extrait mortuaire le cas échéant, l'agrément et la surveillance des nourrices et des meneurs... Car il fallait bien une surveillance exercée par un tiers neutre et respecté, pour obvier à toutes les déviances subies par des nourrissons, sources de profit, que leurs parents ne revoyaient pas avant leur retour, si tout allait bien, soit entre deux et trois ans."
Christian de la Hubaudière: Le sein de Paris

 

Cette petite feuille oubliée révèle une mine de renseignements sur les formalités entourant la mise en nourrice des "Petis Paris". Le curé Huvier avait donné son assentiment pour que Marie Françoise Cendrier puisse recevoir un nourrisson ".. Marie Françoise Cendrier Femme de Pierre Guezou, Nourrice de la Paroisse de Cerneux Election de Provins, nous a remis entre les mains le Certificat du Sieur Huvier Curé de ladite paroisse, que nous avons enregistré en notre Bureau de la rue St Jacques de la Boucherie". La nourrice prit en charge le bébé, dès le lendemain de sa naissance, après qu'il eut reçu le baptême : " l'Enfant un garçon né le 20 juillet 1767 qui a été cejourd'hui (le 21 juillet) confié à ladite Nourrice". Accompagnée par Benard, meneur, Marie Françoise Cendrier rejoignit son village où elle présenta au curé ce certificat délivré par la "recommandaresse". Le curé en confirma la réception le 19 août.

Quelques mots, seulement, à propos des personnages cités, car le sujet des enfants en nourrice à la campagne est trop vaste pour être traité sur une seule page, ce sera le thème d'un dossier à venir.
Recommandaresse : "Femme à laquelle il est permis de tenir une manière de bureau d’adresse, où l’on va chercher des nourrices. Aller chercher une nourrice aux recommandaresses, chez les recommandaresses." Dictionnaire de l'Académie
Il s'agit, pour le placement à Cerneux, du bureau de la rue St Jacques de la Boucherie; à la Chapelle Rablais, quand une adresse de bureau des nourrices était connue, il s'agissait plutôt de ceux de la rue de la Planche Milbray ou de la rue Quincampoix qui, à partir de 1769 centralisa toutes les mises en nourrice. Au cours du XIX° siècle, il s'en trouva bien d'autres, dont celui de la rue du Cherche-Midi, photographié ci-contre.

  Doc: Certificat de renvoi pour les nourrices...

Le meneur était toujours sur les routes, pour convoyer les futures nourrices jusqu'aux bureaux de Paris, (imagine t'on une jeune paysanne de débrouiller seule dans les rues de la capitale?), revenir au village avec elles et leurs nourrissons (paiement : 2 livres) avec la "bulle" de la nourrice, comprenant les petits habits, le certificat de baptême, et, en prévision, celui de décès. Les meneurs devaient ensuite faire le lien entre les parents et la famille nourricière, apporter chaque mois le salaire dont ils prélevaient environ 1 sol par livre; ramener, sans la nourrice, les bébés d'environ deux ans à la famille à la fin du nourrissage, ce qui coûtait 3 livres aux parents, et dans le cas où le bébé venait à décéder, cinq sous pour rapporter la "vêture" aux parents. Le réseau des meneurs d'enfants trouvés était distinct de celui des bureaux de nourrices. Aux meneurs de nourrices, il était interdit de convoyer des marchandises, un bébé seul, une nourrice avec plusieurs bébés, un nourrisson d'un autre bureau ou provenant des Enfants Trouvés...
Les meneurs entretenaient un réseau d'informateurs en vue de repérer les jeunes femmes en attente d'un bébé, suceptibles de devenir de nouvelles recrues pour le bureau des nourrices.

 

 

  Traces des meneurs de nourrices en Brie


 

 

Après ce très rapide survol du réseau des enfants mis en nourrice à la campagne par leur parents par le truchement de recommandaresses, de meneurs, en faisant l'impasse sur le réseau des Enfants Trouvés, à la mortalité encore plus effrayante, revenons aux bébés Huvier et apparentés.
Leurs parents n'eurent nul besoin de s'adresser à l'un des Bureaux des Nourrices ayant pignon sur rue à Paris, puisque tous furent accueillis dans des villages proches de Coulommiers où ils étaient nés. Existait-il un petit bureau des nourrices dans cette petite ville ? On l'ignore. Cependant, on peut affirmer que son fonctionnement devait être beaucoup moins strict que ceux de la capitale. Les curés des villages d'accueil des "Petits Paris" avaient entre leurs mains des pièces imprimées, fournies par le bureau des nourrices et transmises par le meneur, comme le certificat reproduit plus haut, où figuraient par écrit tous les renseignements concernant l'enfant et sa famille. Or, il semblerait que le curé d'Aulnoy, s'il connaissait le nom de la famille Ogier de Baulny quand il inhuma Anne Perrine, n'avait sous les yeux aucun document en donnant l'orthographe qu'il transcrivit de l'oral par "Anne Jean Perrine Augiez de Bony" au lieu d'Ogier de Baulny.

Si une vraie structure de placement des nourrissons à Coulommiers reste à découvrir, il n'est pas possible qu'il n'ait pas existé au moins un réseau informel pouvant mettre en relation les familles cherchant à placer leurs bébés et les nouvelles mamans prêtes à les accueillir; avec peut être, à la base, les sages-femmes...

 

 

Pour résumer : des nouveaux-nés Huvier et familles apparentées ont été placés en nourrice dans des petits villages alentour, ce que prouvent des actes de décès et des notes sur les livres de raison. Etienne Fare Charles avait-il lui aussi été en nourrice? Cela reste à découvrir, comme les traces du réseau mettant en liaison les futures accouchées avec les futures nourrices...

 


  Suite : enfance, affection et aussi château de Coulommiers