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Etienne Fare Charles Huvier/7
1724/1784 Curé de la Chapelle Rablais...
Chapelles et chapelains/1

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Laurent Guay, jeune curé de Courpalay que nous avons découvert à la page précédente était prêtre et chapelain : "Mre Laurent Guay prêtre curé de Courpalais ... et chapelain de l'église de St Yves à Paris" Ladite chapelle, comme sa nouvelle cure, lui apportait un "bénéfice" : "il est aujourd'huy pourvu de bénéfices suffisants pour le mettre à même de vivre honnêtement en l'état écclésiastique (# desd. cure et chapelle)" Minutes du notaire Vaudremer Nangis AD 77 188 E 110
La chapelle Saint Yves, aujourd'hui disparue, à Paris non loin de la Sorbonne, avait été bâtie sous Jean le Bon, à l'initiative d'une confrérie à la dévotion de ce saint breton, réunissant "notamment des étudiants et maîtres originaires des diocèses de Tréguier, de Léon et de Cornouaille en Bretagne." Wikipédia / voi aussi le fonds-saintyves.fr
Rien de breton chez Laurent Guay dont la famille était originaire de la Brie; pas de rapport avec l'Université proche de la petite église, le jeune prêtre aurait mentionné un diplôme; et impossible d'assurer en même temps un service religieux dans une paroisse de campagne et une chapelle parisienne...


En 1759, le successeur du curé Huvier à la Chapelle Rablais, Louis Jean Poiret dont nous avons fait connaissance à la page précédente, était lui aussi chapelain : "messire Louis Jean Poiret, prêtre, bachelier de la faculté de théologie, chapelain titulaire de la chappelle St Michel ditte de la Bouchardière, curé de laditte paroisse"
7 février 1763 la Chapelle Rablais AD77 5 Mi 2828
Un autre acte précise la localisation de ladite chapelle : "... Messire Louis Jean Poiret prêtre du diocèse de Paris, bachelier en théologie, prieur de St Michel de la Bouchardière diocèse du Mans curé de cette paroisse..." idem, 7 septembre 1772
Les lieux-dits "la Bouchardière" ne manquent pas dans le vaste diocèse du Mans; savoir duquel il s'agit n'a peut-être pas d'importance, puisque le curé Poiret, résidant à plus de deux cent cinquante kilomètres, n'aurait eu que peu d'occasions d'y célébrer la messe... Quant à savoir pourquoi ce prêtre du diocèse de Paris devint chapelain dans le diocèse du Mans...

Avant d'officier à la Chapelle Rablais, le curé Poiret était desservant de l'église St Blaise et Ste Geneviève de Moulignon, succursale de Saint Ferréol de la paroisse de Saint Fargeau, comme l'a noté Etienne Fare Charles Huvier le 13 mars 1759 : "Cejourd'huy mardy treizième jour de mars mil sept cent cinquante neuf avant midy j'ai mis en possession de cette cure Mre Louis Jean Poiret prêtre du diocèze de Paris curé de Portes et desservant de Moulignon succursale de St Fargeau diocèze de Sens, et j'ai pris possession de la cure de Cerneux près la Ferté Gaucher en Brie le jeudy premier mars audit an." Registre paroissial AD77 5 Mi 2829

Etrange situation que celle de Louis Jean Poiret, curé de Portes et pourtant simple vicaire dans une succursale de Saint Fargeau ! Ce n'est pas une erreur de transcription; dans les registres de Moulignon, Louis Jean Poiret signe à chaque fois "curé de Portes" et son successeur en 1759 fera de même.
AD77 5 Mi 2589 & 5 Mi 2590 registres à chercher dans Saint-Fargeau-Ponthierry
La paroisse de Portes semble avoir disparu, pas de registres, donc pas d'actes; pas d'église, une simple chapelle; pas plus que de maisons; Portes, aujourd'hui dans la commune d'Auvernaux, Essonne, n'est plus qu'un hameau, une simple ferme. A la fin de l'ancien régime, sur le plan d'Intendance, on ne voit à Portes qu'un château, son parc, sa chapelle... (passez la souris sur le plan ci-dessus). Une chapelle, même consacrée, n'est pas la base d'une paroisse; par exemple, en 1779, le curé Huvier bénit la chapelle du château de l'Orme à Courtacon, consacrée en 1770, mais
"trouvée dans le cas absolu d'être bénie de nouveau eu égard à gros mur d'icelle chapelle reculé de plusieurs pieds et autres changements notables...." L'Orme n'en devint pas pour autant une paroisse. La chapelle castrale de Portes était peut être le vestige de l'église d'une paroisse disparue.
20 octobre 1779 Copie du procès-verbal de la bénédiction de la chapelle du château de l'Orme AD77 944 F 165

Au XVIII° siècle, Portes, comme d'ailleurs le hameau de Beauvais à Champcueil, étaient considérés comme des paroisses : "Le sieur de Chalibert d’Angosse, de qui est empruntée cette observation [dans La Généralité de Paris divisée en ses XXII élections] nomme les douze Paroisses qui sont Menecy, Fontenay-le-Vicomte, Escharcon, Ormoy, Villabé et Monceaux, toutes les six de l’Election de Paris et du Diocèse. Les six autres du Diocése de Sens et Election de Melun sont Balencourt, Chevannes, Champcueil, Beauvais, Portes et Auverneaux."
Histoire de la ville et de tout le diocèse de Paris par Jean Lebeuf 1687-1760 p 248 / Merci à M. Pacory, voir son site https://jours-de-fete.fr

Sur la carte de Cassini, les symboles employés pour Portes sont le château (en bas) et un autre qui pourrait être celui du hameau, sans croix, ou de la paroisse, avec croix; la barre de la croix se confondant ici avec le tracé du parc. Les caractères employés, le "romain droit" sont ceux d'une paroisse, alors qu'un hameau sans église aurait été en italique... Donc, pour Cassini, Portes est une paroisse non ruinée (l'église aurait été inclinée), avec un château.
Louis Jean Poiret était le curé virtuel d'une paroisse fantôme...

 

A défaut d'une représentation de la chapelle Ste Madeleine de Coulommiers, la chapelle sans fondation dans le parc des Moyeux, à la Chapelle-Rablais.
Vue intérieure en passant la souris sur l'image.

Etienne Fare Charles Huvier était, lui aussi, chapelain, de la "chapelle nôtre dame Snte Marie Magdeleine du vieux château de Coulommiers en Brie". Note du curé sur le registre de Cerneux.
"Chapelain: Prestre qui dit ordinairement la Messe dans une chapelle pour quelque personne de condition. Il signifie aussi, Un Beneficier qui joüit d'une chapelle: les Chapelains de Nostre-Dame, de la sainte Chapelle."
Cette définition tirée de la première version du dictionnaire de l'Académie française, 1694, fait la différence entre deux chapelains et deux chapelles, dépendant d'un château ou d'une église.
La chapelle Ste Madeleine, de l'ancien château de Coulommiers, délaissé au début du XVII° siècle quand fut édifié le "château neuf", était située dans l'enceinte du couvent des "dames religieuses du Couvent de la Congrégation de Notre Dame de Paix ordre de St Augustin"

"Une maison nommée le Vieil Château consistant présentement en une église à l'autel de laquelle le Seigneur châtelain de Coulommiers à droit de faire célébrer les messes par les chapelains de St Nicolas et de Sainte Madeleine, attendu que la chapelle de ces deux titres de laquelle il est patron fondateur et présentateur." et bien d'autres bâtiments pour les cellules des soeurs, l'infirmerie, ouvroir et apothicairerie, les parloirs, tours, classes, une cuisine, un réfectoire, une chapelle, une laverie, un petit bûcher, une bergerie, remise, greniers à blé et à farine, des cours, un jardin, melonnière, un canal ou réservoir à poissons etc.. et même un cimetière. AD77 H443
On découvrira en survolant à la souris le plan ci-dessous l'emprise des bâtiments du Vieux Château de Coulommiers, devenu couvent des soeurs, aujourd'hui détruit, situé entre deux brassets du Morin et, plus bas, sur le plan de Chastillon, le couvent (C), devant l'église saint Denis (A) et le prieuré Sainte Foy (B)

Le château neuf de Coulommiers à la 4° page du dossier

 

Description des bâtiments de la Congrégation de Notre Dame de Paix à Coulommiers AD77 H443

Je ne désespère pas de trouver, un jour, les actes concernant les prises de possession des cures du curé Huvier, et celle de la chapelle de la Madeleine. Hélas, les archives des notaires apostoliques sont très lacunaires. La famille Huvier entretenait de bonnes relations avec le notaire royal et apostolique Chalemot qui officia à Meaux de 1728 à 1753; si le répertoire et les minutes "royales" de ce notaire ont été conservées, les minutes "apostoliques" s'arrêtent en 1737. J'ai bien trouvé des actes chez les notaires apostoliques de Meaux, ville épiscopale, Chrestien et Décan; chez ce dernier, l'année 1745 est manquante, juste celle où Etienne Fare Charles Huvier fut nommé chapelain. A défaut d'avoir trouvé l'acte de possession de la chapelle du Vieux Château, je propose celle de la chapelle de Fonte archer à Saints, paroisse où se retira "l'abbé Huvier", vieillissant. Ci-dessous, la cérémonie de prise de possession :

"... Premièrement par l'ouverture et entrée libre de la principale porte de ladite église paroissiale de Sain, prise d'eau bénite, prière à Dieu devant le grand autel, baiser et toucher d'iceluy, sécance en la place ordinaire du pourvu, son de la clochette, exhibiton desdites lettres de collation et provision, et par les autres cérémonies en tel cas requises et acoutumées, à laquelle prise de possession. Lûe et publiée à haute et intelligible voix par moydit notaire apostolique soussigné suivant l'ord. Personne ne s'est opposé, dont et de quoy ledit sieur Lefrancois m'a requis et demandé à ce et luy ay octroyé le présent [acte] pour luy servir et valoir en temps et lieu ce que de raison, ce que fait octroyé et passé dans ladite église paroissiale de Sain..."
9 décembre 1750 Minutes apostoliques du notaire Pierre Saintin François Chrestien Meaux AD77 141 E 216

La chapelle de Saints, texte intégral

A noter que les prises de possession de chapelle et de cures sont fort semblables, sur le modèle proposé par "Le Parfait Notaire Apostlique" 1775, ci-dessous ; par exemple, à Coulommiers, la prise de possession de la chapelle de la Petite Mère de Dieu le 30 janvier 1747 : "... par l'ouverture et entrée libre par la principale porte de ladite église parroissialle de Coulommiers, prise et aspersion d'eau bénitte, prière faite à dieu devant la place du pourveu [au] son de la clochette exhibition desdites provisions, et par les autres cérémonies en tel cas requises et accoutumées à laquelle prise de possession leüe et publiée à haute et intelligible voix par moidit notaire suivant l'ordonnance personne ne s'est opposé.."
Minutes du notaire apostolique Antoine Décan Meaux AD77 82 E 4

Pour la prise de possession de l'église d'une cure, s'y ajoutent la montée en chaire et le toucher des fonts baptismaux, évidemment absents d'une simple chapelle.
Exemple : 22 mars 1747 Prise de possession de la cure de Septsorts, minutes apostoliques du notaire Décan AD77 82 E 4

Prise de possession de la chapelle de la Petite Mère de Dieu, texte intégral

 

Curieux ! Le curé Huvier fut chapelain de "nôtre Dame Sainte Marie Madeleine du Vieux Château de Coulommiers en Brie" en 1745 (la date précise manque) alors qu'il venait juste d'être tonsuré et avant même de franchir le premier échelon des ordres mineurs.
Titulaire d'une chapelle sans pouvoir y célébrer de messe, et plus haut, curé d'une paroisse qui n'existait plus, les institutions de l'ancien régime n'ont pas fini de nous étonner.

 

  Suite chapelles et chapelains 2