La piètre qualité des attelages de voituriers s'explique
peut être par une certaine raréfaction à l'époque
où les Thiérachiens se sont fixés en Brie, sous la
Révolution et l'Empire. Les chevaux étaient pourtant très
nombreux, en 1813: "les 130 départements
abritent alors 3.500.011 équidés (1.268.909 chevaux, 1.393.521
juments et 837.581 poulains de moins de 4 ans) tandis que, chaque année,
sont comptabilisées 280.320 naissances." mais l'Armée
était grande demandeuse: depuis un seul cheval
attribué à un lieutenant, sous-lieutenant ou capitaine d'infanterie
de plus de cinquante ans, jusqu'à dix huit chevaux de selle, huit
de trait, dix de bât et deux voitures pour un maréchal d'Empire...
"La proportion s’établit
globalement autour d’un cheval pour sept hommes, mais atteint un pour
quatre en campagne, essentiellement par l’accroissement des capacités
de traction." Cette citation et suivantes:
Le cheval dans la Grande Armée Revue historique des armées
n°249.
La Gendarmerie et l'Armée avaient besoin d'animaux fiables:
"Le cheval de selle doit être âgé
de cinq à neuf ans, celui de trait de cinq à sept ans. Le
fait de ne retenir que des chevaux âgés de 5 ans au moins permet
en outre d'éliminer la question du dressage qui commence à
trois ans ou 3 1/2 et s'achève normalement au cours de la quatrième
année. Pour la cavalerie, on n'admet que des hongres et, au maximum,
un tiers de juments "non pleines" (mais seulement un quart dans
les trains)." La préférence
pour des chevaux châtrés dura jusqu'à la fin de l'usage
de la cavalerie dans l'armée; ainsi, pendant la seconde guerre mondiale,
le paysan Grenadou rusait-il pour que ses chevaux ne lui soient pas confisqués
par l'occupant: "Ensuite, c'est la réquisition
des chevaux. J'avais un percheron d'un mètre soixante quinze, trop
grand pour l'armée. Quant à mes Bretons, ils étaient
entiers et ça déplaisait au militaires ; on ne leur menait
que des chevaux hongres. Je l'avais fait un peu exprès."
Grenadou paysan français
C'est une évidence: la guerre fait des morts, aussi bien du côté des hommes que de celui des chevaux. Même en mettant de côté l'hécatombe de la retraite de Russie (entre le 15 juin 1812 et janvier 1813, la cavalerie perdit 92% de ses montures), les pertes au cours des batailles pouvaient être conséquentes, par exemple, les effectifs et pertes hommes et chevaux le 25 fructidor an XIII, 14 septembre 1805, pour la première division de grosse cavalerie:
Forte de 150 officiers, 2574 sous officiers et cavaliers, cette compagnie a perdu 27 officiers, 60 sous officiers et 153 cavaliers (environ 10% de l'effectif). Cette cavalerie lourde comprenait au départ 2.448 chevaux. 759 d'entre eux manquèrent (environ 30%), pour la plus grande partie morts de fatigue (551 contre 166 tués et 42 pris par l'ennemi).
Après les massacres, il fallait trouver de nouveaux chevaux, quitte à diminuer le degré d'exigence; la taille au garrot minimale fut abaissée à 1,38 mètres pour équiper les éclaireurs. Suivant l'urgence, la fourniture en chevaux se faisait soit par achat de gré à gré, soit par réquisition. Ainsi, le 4 vendémiaire an VIII, eut lieu une "levée extraordinaire de chevaux pour le service des armées": recensement des chevaux de cinq à neuf ans dans tous les départements, achat "acquitté en numéraire et sans délai" du trentième des chevaux hongres, juments non poulinières, mules et mulets. En moyenne, la remonte de l'armée équivalait à la moitié des naissances des équidés, sauf années exceptionnelles. Pour 1812, la prévision était de 4.726 montures, mais après le désastre de la retaite de Russie, il aurait fallu "73.000 chevaux de selle et 52.000 de trait afin de recréer un outil militaire performant."
Pendant les rares périodes de paix, par souci d'économie, les chevaux de l'armée étaient placés chez des cultivateurs: "Le décret du 28 germinal an IX stipule par exemple que l’armée française conservera 19.100 chevaux de trait (15.100 pour l’artillerie, 3.000 pour les vivres et 1.000 pour les ambulances). Mais, sur ce nombre, 16.400 doivent être placés chez des particuliers qui les entretiennent et les utilisent jusqu’à réquisition."
Les Archives départementales de Seine et Marne conservent quelques
dossiers sur la remonte pendant la période révolutionnaire,
qui concernent principalement le district de Meaux, ainsi cette plainte
d'un citoyen chez qui étaient placés trois chevaux "remplis
de rouvieux", galeux, pleins d'escarres...
Citoyens. Le premier messidor (an 2), le citoyen Bernier de Villeneuve s'est
présenté à la maison commune pour requérir la
Municipalité, afin qu'elle se transportasse pour faire la visite
des trois chevaux désignés sous les n° 118, 119 et 120.
En conséquence, nous nous y sommes transportés, accompagnés
du citoyen Mauberquier maréchal ferrant en notre commune, lequel
après la visite desdits chevaux, nous a déclarés qu'ils
étoient remplis de rouvieux par tout le corps, et qu'il ne pouvoit
pas entreprendre de les penser (panser) a moins qu'il n'y est une visite
d'expert ordonné par l'administration du District de Meaux. Voyez
citoyens ce que vous jugerez a propos d'ordonner a ce sujet. Nous sommes
avec fraternité vos concitoyens. Vive la République une et
indivisible. AD77 L 426
Les voituriers par
terre /16
Chevaux
Hu dada! Hu dada
Su' le p'tit q'va d'sin papa!
Il a tant mangé d'aveine
Qu'il a tout perdu s'n haleine
Hu! Hu! Hu! Hu! Dada!
Les voituriers thiérachiens avaient apporté du Nord leurs attelages et leurs chariots. Les chevaux étaient qualifiés de "ragotins" par les Briards: "Ragotin: cheval de taille moyenne, mais solide, bien fait, nerveux." Ainsi les décrivait Auguste Diot vers 1930 : "Ils avaient des petits chevaux ragotins se dispersant dans la forêt pour chercher leur nourriture et rappliquant au galop auprès de leur maître lorsque celui-ci les rappelait en lançant des coups de sifflet entre ses doigts." En 1870, Félix Bourquelot parlait des "Thiérachiens: Charretiers qui mènent à Provins le bois de la forêt de Chenoise dans de longues voitures traînées par de petits chevaux à demi-sauvages, vivant dans la forêt et ne connaissant guère l'écurie." Cette définition a été reprise avec une légère variante dans les Dictons de Seine et Marne en 1873: " C'est le nom donné aux voituriers qui transportent les bois de Chenoise à Provins, et ce, à l'aide de longues voitures tirées par six ou huit petits chevaux à demi- sauvages, vivant comme leurs maîtres, dans les fourrés de la forêt qui avoisine le village précité."
Dans chacun de ces témoignages, les chevaux pâturent tranquillement dans les fourrés: "des Particuliers faisoient pâturer journellement plus de 60 chevaux dans les Bois de leur Abbaye, dont ils brouttoient les rejets" Hermières 1740 ce qui était strictement interdit par la tradition paysanne d'où conflit, procès... "dresser Procès verbal de l'abroutissement des rejets" que les propriétaires ne gagnaient pas toujours, les Thiérachiens, fournisseurs de bois pour Paris étant protégés, sous l'Ancien Régime par Lettres Patentes. En 1753 : "ils continueroient de faire paccager leurs Chevaux & Bœufs dans les Pâtures, Chaumes, Prez fauchés & Terres, après la Récolte, conformément à l'ancien usage; fait deffenses à tous Particuliers de troubler les Voituriers dans lesdits Paturages; & ausdits Voituriers de causer dommage dans les héritages en valeur. "
Quelques années plus tard, les
temps avaient changé, suivant les plaintes révélées
par les Cahiers de Doléances de 1789 "Police
des campagnes, article 16: Les voituriers et les conducteurs de bestiaux,
et spécialement les étrangers appelés Tirachiens ne pourront
mettre leurs chevaux et bestiaux en pâture sur les terres ni dans les
prés et bois, à peine de forte amende" Tiers
Etat de la prévoté et vicomté de Paris hors les murs
Cependant, les Thiérachiens de Brie avaient conservé leurs habitudes,
ainsi, en brumaire de l'an IX, le garde forestier des Montils "a
trouvé six chevaux et juments sous différents poils et âges
qui étaient à traverser et à l'abandon dans un bois taillis
de la coupe dernière... dans laquelle partie de bois, lesdits chevaux
et juments ont commis un délit considérable" ainsi
que quatre boeufs appartenant à un autre voiturier.
Jugements de simple Police, Nangis AD77 UP 2314
En 1818/19, en plus des dettes qu'il avait chez le maréchal ferrant
Debrosses, 45F, les boulangers Chéron, 48F et Sandrin, 23F, le tuilier
Tellier, 12F qui avaient porté plainte auprès du juge de paix
du Châtelet en Brie, le voiturier Charles Chesnot comparaissait pour
divagation de cheval: "un cheval ongre sous poil
gris souris appartenant à Cheneau par lui reconnu a été
trouvé ledit jour à deux heures du matin paissant à l'abandon
dans une pièce de trèfle appartenant au sieur susdit ce champ
non dépouillé de sa récolte." Rabourdin,
cultivateur aux Granges et maire de Courtry demandait 50 francs, il n'en obtint
que quatre. Justice
de paix du Châtelet 100 W 302
On peut imaginer que ces "charrons" (ils se nommaient ainsi entre eux, mais aussi rouliers, blattriers, blatiers, bossons...) originaires de Momignies, à la limite de la Belgique, des départements du Nord, de l'Aisne et des Ardennes, ont attelé à leurs chariots les chevaux locaux, des Ardennais, comme on en voit encore travailler dans les forêts proches. S'agit-il du même animal qualifié de "rouleur belge" auquel les éleveurs du XIX° siècle faisaient si mauvaise réputation (rouleur et belge, les deux mots pouvaient s'appliquer aux rouliers de Momignies et à leurs chevaux) :
"La tête forte, volumineuse,
les yeux peu saillants, l'oreille longue ; mal plantée, flasque dans
ses mouvements. Le cou assez court, épais, la crinière bien
fournie, mais d'un fil gros et rude au toucher. Les épaules couvrant
beaucoup trop l'avant-bras, cet avant-bras large, le genou généralement
mal placé, le canon large fourni de poils nombreux. L'attache du
boulet longue, le sabot assez bon mais manquant de talon. Le corps volumineux,
le ventre descendu, la poitrine assez large, l'épine dorsale enfoncée,
les hanches saillantes, la côte plutôt plate que ronde, les
flancs généralement longs. La croupe haute vers les hanches,
très-aplatie vers la queue, celle-ci attachée beaucoup trop
bas. Les cuisses larges, le jarret trop court, droit et charnu. La peau
épaisse, la marche lente et lourde.
Caractère doux, facile, bon ouvrier, peu sujet aux maladies, ce qu'il
faut surtout attribuer à la bonne qualité presque générale
des fourrages produits dans le département, ainsi qu'à un
travail toujours modéré. La couleur prédominante était
l'alezan lavé."
Et aussi :"... le rouleur belge qui lui même n'est qu'un rebut..."
Et encore: "Le rouleur belge est le plus mauvais de beaucoup."
Dénigrant le Rouleur belge, la Société d'Agriculture
de la Marne essayait d'imposer le Percheron: "C'est dans le Perche
que se firent les achats, l'honorable M. Gayot-Du-Fresnay secondé
par un des membres du Comice s'y rendit à plusieurs reprises. Les
reproducteurs étaient revendus dans chacun de nos arrondissements
et jamais dans la même commune. De cette sorte l'étalon se
rapprochait de la jument et venait ainsi se substituer en partie au rouleur
belge. " Il en était de même en Seine et Marne: "Une
concurrence nuisible à l'amélioration de la race avait été
faite jusqu'alors dans le département par les rouleurs belges. Dans
le but de l'atténuer, on fit circuler trois étalons dans les
divers arrondissements."
Sources sur le
rouleur belge: Journal d'agriculture pratique Volume 3 / 1868
Mémoires de la Société d'agriculture, commerce, sciences
et arts du département de la Marne / 1857
Documents officiels, statistique, rapports, comptes rendus de missions en
France et à l'etranger, Volume 1
Le département de Seine et Marne 1800/1895 d'après les documents
officiels notamment les délibérations du Conseil Général
De nombreux actes font mention de vente de chevaux entre
Thiérachiens, comme celui passé en 1778 à la Chapelle
Gauthier pour un cheval acquis à Mortcerf que le voiturier paiera à
crédit: "... fut présent Jean Louis
Collignon voiturier par terre demeurant à Morcerf lequel à par
ces présentes reconnu devoir bien et légitimement à Joseph
Pescheux aussi voiturier par terre demeurant ordinairement à Montmigny
Province Henault étant présent à ladite Chapelle ...
la somme de cent quatre vingt livres que ledit Collignon lui doit pour la
vente d'un cheval ongre sous poil rouge brun, or d'âge, faite par ledit
Pecheux audit Collignon ... laquelle somme il promet et s'oblige de payer
audit Pescheux aud. par lui élu chez le sieur Devin le jeune aubergiste
à ladite Chapelle ou au porteur le jour de la saint Martin d'hiver
onze novembre de la présente année.."
Minutes du notaire Baticle la Chapelle Gauthier AD77
273 E 23
Quelquefois, un voiturier pouvait servir d'intermédiaire entre deux autres Thiérachiens, comme dans cet acte de 1791: "Fut présent S. Joseph Germain voiturier par terre demeurant à la Chapelle Gauthier, chez le S. Devin le jeune aubergiste demeurant audit lieu Lequel à par ces présentes cédé transporté & abandonné de cejourd'hui, avec promesse d'en faire jouir & garantir de tout empêchement généralement quelconque à Jean Baptiste Delchande aussi voiturier demeurant ordinairement à Montmigni pays Henault et étant ce jour à ladite Chapelle Gauthier à présent acquéreur ce acceptant. L'effet et droit d'un billet de la somme de cinquante une livres qui reste à payer sur plus grande somme dont va être parlé, qui lui à été cédé par Pierre Houdion voiturier demeurant à Dammartin sous Tigault en datte du premier aoust mil sept cent quatre vingt dix... un autre billet de cent cinquante livres fait par Philippe Benson au profit dudit Houdon, en datte du douze novembre mil sept cent soixante dix sept...."
Jai souscigné reconnoit aitre redevable de la some de saintquante et une livre dont je promet pejer a pierre audions residant a dont martiens sur tigaut a la saint jans baties de lannait de 1778 fait a maux le 12 nauvembre 1777 Philippe Benson
Je donne moi pierre houdion plin pouvoir a Joseph Germain thirachien de recevoir la somme de cinquante et une livre dû par philipe Benson portée par ledit billet fait le premier aous mil sept cent quatre vingt dix" minutes du notaire Baticle la Chapelle Gauthier AD77 273 E 23 n°114
Les inventaires après décès
et les ventes aux enchères qui suivent donnent une indication de
la valeur des attelages. On est loin des prix pratiqués couramment.
Le cheval hongre acheté pour cent quatre vingts livres à Mortcerf
fait figure d'exception. Ainsi, le jour de Noël 1803, lors de la vente
aux enchères suite aux décès du fils Etienne et de
son père, Louis Dupin, voiturier "thiérachien" bien
que né à Bréau, proche de la Chapelle Gauthier, les
chevaux sont partis à un prix ridicule: estimés 122 francs,
cinq juments et un cheval ongre avec leurs harnais ont péniblement
atteint la somme de 126,50 , même pas le prix demandé par le
citoyen Lahouë pour deux mois de gardiennage de l'attelage
"Au citoyen Lahouë pour la garde des chevaux depuis le décès
132 F". Il faut dire que le citoyen
Lahouë (Lahoust, Lavout) était le gendre du défunt et
grapillait peut être un peu sur le très maigre héritage:
"Déclare ladite veuve Dupin qu'elle
n'a aucuns deniers comptant... sur le montant desquelles sommes, il sera
pris par préférence les droits d'apposition de scellés,
acte de curatelle, inventaire et procès verbal de vente.." minutes
du notaire Baticle AD77 273 E 28
"Item une jument sous poil noir garnie
de son collier et trez mise à prix à huit francs par le citoyen
Meunier et après enchères lui a été adjugé
dix francs." Le citoyen Meunier, voiturier,
s'est porté acquéreur de quatre Rossinantes et du chariot
(120 F) le tout pour environ 200 francs. Quelques années plus tard,
il faisait une joyeuse culbute en vendant un chariot, sept juments et un
poulain pour mille quarante francs à Edme Tissot, scieur de long
du Forez installé aux Montils, qui se convertissait en voiturier.
minutes du notaire Tartarin AD77 273 E 31,
1809
Succession Nival 1803
Item un cheval sous poil rouge hors d'âge avec son collier et traits
en fer prisé cent francs
Item un autre cheval sous poil rouge hors d'âge avec son collier et
traits prisés ensemble soixante douze francs
Item un autre cheval sous poil jaune avec son collier et traits prisés
ensemble soixante douze francs
Item un autre cheval sous poil rouge marqué en tête hors d'âge
avec son collier et traits prisés ensemble quatre vingt dix francs
Item un autre cheval sous poil rouge âgé de six ans avec son
collier et traits prisés ensemble soixante douze francs
Item une jument sous poil rouge hors d'âge avec son collier et traits
prisés ensemble quatre vingt dix francs
Item un poulain âgé de deux ans prisé trente six francs
Item une fourche en fer, une échelle prisés ensemble
Item deux paires de poulles prisées à raison de un franc cinquante
la paire revient à trois francs
L'estimation devait être un peu basse lors de l'inventaire après
décès de Nicolas Pupin, les enchères sont grimpées
car plusieurs voituriers se disputaient l'attelage, sans pour autant atteindre
le prix habituel d'un cheval de labour:
"un cheval sous poil rouge brun hors d'âge
faisant le numéro vingt sept de l'inventaire adjugé et livré
après plusieurs enchères à Nicolas Ledoux, voiturier
travaillant dans la forêt de Villefermoy pour cent un francs avec
ses harnoys"
"une jument gris bleu pour cent un francs à
Jean François Lecoyé, Beauwelz canton de Chimay, arrondissement
de Charleroi, département de Jemmapes." Jean François
Lecoyé (Lecoyer) était venu de Momignies avec Antoine Bourguignon,
gendre du défunt pour régler la succession. Ils sont restés
une quinzaine de jours et Jean François est reparti avec plusieurs
chevaux (une jument sous poil noir à 104 F, le cheval borgne poil
gris rouge pour 66 francs et le chariot pour 160 F). J.F. Lécoyer
est-il J. Lecollier qui assistait aux funérailles du père
de Philippe Badoulet en 1782 à la Chapelle Gauthier?
"Un cheval noir hors d'âge"
acheté par René Lazarre Michel Cottance, voiturier à
la Chapelle Gauthier pour 18 francs
Chez Huot (Huaux), on achète en famille:
Jean, voiturier à "Anor canton de Trelon,
arrondissement d'Avesnes, département du Nord demeurant à
la Chapelle Gauthier en la forêt de Barbeau" prend le
cheval noir de 5 ans pour 131 francs, Jacques, voiturier à "Beauwelz
canton de Chimay, arrondissement de Charleroi, département de Jemmapes,
étant à la Chapelle Gauthier, travaillant dans la forêt
de Villefermoy" repart avec une pouliche noire de 3 ans et le
poulain pour 27 francs.
Louis Dupont, à ses heures voiturier, ce jour-là cultivateur
aux Grandes Loges d'Echou-Boulains, avait remporté les enchères
pour un cheval souris (163 francs) et une jument grise qui avait atteint
la plus forte somme de la vente: 202 francs. Dommage pour la succession,
Louis Dupont n'a pu régler comptant ses deux chevaux qu'Antoine Bourguignon,
exécuteur testamentaire a finalement réservés.
D'autres voituriers et des habitants des villages voisins ont participé
à la vente aux enchères après le décès
de Nicolas Pupin, ils se sont partagé ses maigres possessions, par
exemple, Jacques Cornuet (d'une famille qui existe encore à la Chapelle
Gauthier) a acheté "une culotte de panne,
une vieille culotte de drap bleu, une paire de souliers"
pour 2,35 francs; Nicolas Roubault a payé 4,35 F pour un lot comprenant
"une mauvaise chemise, un torchon, un
mouchoir, un bonnet de coton, une culotte de grosse toile, une serpillère
de même toile".
Mais tous les chevaux ont été acquis par des voituriers. Est-ce
parce que les bêtes des Tirachiens ne convenaient pas aux paysans
briards, ou bien qu'ils n'avaient pas assez d'argent sonnant et trébuchant
pour les acheter (jardins, petits champs et menu élevage permettaient
au plus grand nombre de subsister mais pas de dégager beaucoup de
liquidités) ou bien encore, existait-il une "mafia tirachienne"
qui voulait que les affaires de voituriers se règlent entre voituriers
?
Les voituriers ont acheté tous les chevaux et pas bien cher, car certains n'étaient pas bien beaux. On ne compte plus les chevaux "hors d'âge", dont "une jument sous poil jaune hors d’âge, ayant le pied gauche de devant tourné" , canasson borgne et que sais-je encore? Pas bien beaux, pas bien chers, les chevaux des voituriers devaient tout de même être très efficaces, sinon, le groupe des Tirachiens n'aurait pas réussi à presque monopoliser la "vuidange" des bois en Brie.