Etienne Fare Charles
Huvier/8 |
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Il n'est pas certain que seules les grandes
vertus du jeune Etienne lui avaient fait attribuer en 1745 la chapelle
Sainte Madeleine dans le vieux château par le seigneur du lieu.
La position sociale de sa famille a dû influer grandement; son
père, Charles Antoine était alors "avocat
en parlement (1716), écuyer, conseiller du roi assesseur en la
juridiction du prévôt de la maréchaussée
à Meaux, procureur fiscal au bailliage et maîtrise des
eaux et forêts de la châtellenie de Coulommiers (1719),
bailli et maître particulier des eaux et forêts de Faremoutiers
(1722), bailli de Rebais (1738), président de l’assemblée
municipale de Coulommiers (1744)" et
gravira encore quelques échelons après l'année
1745. Son frère Jean sera bailli de Coulommiers en 1748, et maire
de cette ville; l'année suivante, il fut choisi comme "homme
vivant et mourant" pour représenter les curés et
chapelains de l'église St Denis.
Les titres des magistrats Huvier; 1° page du dossier
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"Dans ce château deux chapelles... étaient à la nomination des seigneurs de Coulommiers". Quand la "Magdelaine" fut vacante, Charles-Louis d'Albert de Luynes duc de Chevreuse avait le droit d'y nommer un nouveau chapelain suivant son bon vouloir, puisque la Madeleine et Saint Nicolas étaient à l'origine des chapelles castrales, à l'usage du châtelain. Comme on le verra plus loin, le seigneur de Coulommiers ne résidait pas dans cette petite cité. Ses affaires locales étaient gérées par le "fondé de procuration du duc et de la duchesse de Chevreuse" qui, pour le seigneur, établit des baux pour "deux moulins à tan de Pomolin, le moulin à tan des Prés et le moulin à blé des Prés" à Josse Pérot, laboureur à Montblu en 1737; le moulin à blé de Mouroux à Jean Mullot qui était aussi tabellion de Saints; le moulin de l'Arche à Isaac Caudart (Caudat), meunier à Meaux; il octroya à Thomas Cariat et Robert Piat, marchands tanneurs à Coulommiers "les droits de controlles et marques des cuirs, parisis sol et six deniers d’iceux, et le quart ensus, de tous les droits qui appartiennent au Domaine de Coullommiers, et à prendre sur les cuirs qui se fabriquent en cette Ville de Coullommiers et ceux de la Ferté Gaucher, dont les droits susdits sont aussy audit Domaine de Coullommiers". AD77 195 J 7 Il est plus que probable que l'avis du fondé de procurations du duc de Chevreuse fut pris en compte dans le choix d'un chapelain pour la Madeleine. Et devinez qui était le réprésentant local du seigneur? Un "avocat en parlement, écuyer, conseiller du roi assesseur en la juridiction du prévôt de la maréchaussée à Meaux, procureur fiscal au bailliage et maîtrise des eaux et forêts de la châtellenie de Coulommiers, bailli et maître particulier des eaux et forêts de Faremoutiers, bailli de Rebais, président de l’assemblée municipale de Coulommiers", pour faire court, le propre père du nouveau chapelain, Charles Antoine Huvier...
Continuons et voyons ce qui se cachait derrière
l'appelation fort valorisante de "Notre
Dame Sainte Marie Magdeleine du vieux château de Coulommiers en Brie".
Le château neuf de Coulommiers à découvrir à la 4° page du dossier
Le Vieux Château et son pourpris (enclos) sur le plan de Maillard. Le Vieux Château avait été
délaissé dès le début de la construction du
château neuf en 1613. Il trouva rapidement une nouvelle affectation
: "C'est dans cette antique demeure seigneuriale
que s'installèrent les sœurs Notre-Dame de la Paix. Venues de
Paris en 1643, elles logèrent rue du Baume (aujourd'hui rue des Vieux-Moulins),
puis en 1649, elles achetèrent le vieux château qu'elles firent
restaurer; depuis cette époque il s'appela d'abord le couvent des
Religieuses et aujourd'hui tout simplement le Vieux-Couvent." Avouez
que "chapelain de Sainte Marie Madeleine au Vieux Couvent" est
déjà moins prestigieux qu'au Vieux Château !
Doc: description des bâtiments de religieuses à la page "homme vivant et mourant" Les religieuses se consacraient à l'éducation des jeunes filles, ce que confirmèrent des lettres patentes du roi Louis XIV, datées de Rocroy en juillet 1673 : " Louis, par la grâce de Dieu, Roy de France et de Navarre, à tous présens et à venir, salut. Nos bien amées les Religieuses de la Congrégation de Notre-Dame establies en la Ville de Coulommiers, nous ont fait remontrer, que comme leur Institut béni de Dieu a esté souhaité en plusieurs villes de nostre Royaume, parce que loin d'estre à charge au public, elles y sont utiles : leur application estant entre autres actions de charité d'enseigner et d'ïnstruire les jeunes filles tant en la Religion Chrestienne et aux bonnes mœurs, qu'aux ouvrages convenables à leur sexe, elles auroient conséquemment esté désirées par les habitans de ladite Ville dés l'année 1637... qu'il nous plaise confirmer leur dit establissement, et prendre et mettre en nostre protection et sauvegarde et des Rois nos successeurs... |
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En 1770, deux soeurs Huvier, de
la branche de Jouy sur Morin, étaient "pensionnaires au Couvent
Nôtre Dame de Paix à Coulomiers en Brie", comme le nota
le curé Huvier en surchargeant un "mesurage et plan figuré
des clos, closeaux et terres novales de la paroisse Saint Brice de Cerneux".
Si le titre de chapelain de la Madeleine au Vieux Couvent manque un peu de prestige, que dire de "chapelain de la Madeleine dans un pensionnat de jeunes filles" ? |
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"De la discipline de cette école,
des matières qu'on y enseignait, autre que la religion chrétienne
et les travaux convenables aux filles, on ne sait rien. En 1787; il y avait
au couvent des Augustines 21 religieuses et 8 soeurs. Cet établissement,
si on en juge d'après le personnel avait une certaine importance, et
c'était plutôt un pensionnat qu'une école publique puisqu'on
y recevait des pensionnaires. On payait 180 livres pour les petites et 350
livres pour les grandes, mais à cette époque, combien peu de
familles du peuple pouvaient payer cette somme pour l'instruction de leurs
enfants! On peut donc conclure que le couvent des Augustines ne devait pas
être fréquenté par les enfants pauvres... Lors de la Révolution,
ce couvent subit le sort de beaucoup d'autres : il fut détruit et les
Augustines quittèrent Coulommiers... La nomination des institutrices, tant au couvent des Augustines qu'à l'école de l'hospice, se faisait par le prieur de Ste Foy [qui] était à Coulommiers le Grand Ecolâtre; il devait pourvoir aux grandes et aux petites écoles de la ville et donner aux maîtres et aux maîtresses le droit d'enseigner." Ecole de filles Monographie de Coulommiers 1889 AD77 30 Z 122 |
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En 1781, année où le
curé Huvier renouvela le bail des deux arpents de terres loués
à la veuve Liénard (voir page précédente),
les soeurs "religieuses professes du
Couvent de la Congrégation de Notre Dame de Paix ordre de St Augustin,
établi audit Coulommier" présentèrent
au nouveau seigneur de la ville, Anne-Pierre de Fezensac Marquis de Montesquiou,
un "homme vivant et mourant" pour les représenter. Dans
les biens relevant du seigneur, est décrite "une
maison nommée le Vieil Château consistant présentement
en une église à l'autel de laquelle le Seigneur châtelain
de Coulommiers à droit de faire célébrer les messes
par les chapelains de St Nicolas et de Sainte Madeleine, attendu que la
chapelle de ces deux titres de laquelle il est patron fondateur et présentateur
est actuellement démolie et que son emplacement est appliqué
à d'autres bâtimens."
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Où, quand, comment, pourquoi et
pour qui cette insistante mention de chapelain que le curé Huvier
n'avait jamais mentionnée avant l'âge de trente cinq ans?
Où et quand ? A ces deux interrogations, on peut répondre
avec certitude, ce qui ne sera pas le cas pour les autres; je n'ai pas
la capacité de découvrir les pensées d'un prêtre
ayant vécu au XVIII° siècle, pourtant, je me permettrai
d'essayer de comprendre pourquoi, après une quinzaine d'années
sans le mentionner, il fit si souvent référence à
son état de chapelain. |
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La mention de "chapelain de la Madeleine" apparaît dans ses écrits pendant les derniers mois qu'il passa à la Chapelle Rablais, pour être précis, à partir du 28 décembre 1758 et jusqu'au 26 mars 1759, date de son dernier acte dans cette cure "nous Etienne Fare Charles Huvier prêtre du diocèze de Meaux chapelain titulaire de la chapelle Notre Dame Sainte Marie Magdeleine du vieux château de Coulommiers en Brie, nommé à la cure de Cerneux" 19 février 1759 AD77 5 Mi 2829 p 217 Le 28 décembre 1758, lorsqu'il inhume Madeleine Liennard veuve Cercot, il emploie la formule habituelle "curé soussigné". Mais le même jour, à l'occasion d'un baptême, il use pour la première fois de la formule "par nous Etienne Fare Charles Huvier prêtre du diocèze de Meaux chapelain titulaire de la chapelle Notre Dame Sainte Marie Magdeleine du vieux château de Coulommiers en Brie, curé soussigné". Le bébé était une fille de Philippe Antoine Fadin, fermier de la Truchonnerie, second marguillier de l'église de la Chapelle Rablais, et de Louïse Goué dont les garçons furent enfants de choeur; c'était des proches du curé, de même que le parrain, "Jean Bordier, porte chappe de ladite église". Ces proches étaient-ils plus aptes que les manouvriers de la famille Cercot à apprécier que les titres de leur curé? Il ne semble pas qu'il y ait eu de rapport car dans les actes suivants, jusqu'en mars, il emploie environ une fois sur deux "curé soussigné" ou "chapelain..." aussi bien pour des cérémonies de manouvriers que de fermiers. Autre hypothèse à l'apparition de cette mention: Madeleine Cercot qu'il inhuma avant de baptiser la petite Fadin, était née Liennard, ce que découvrit peut être le curé Huvier au moment de rédiger son acte d'inhumation. Ce nom de Liénard lui était très familier, comme on l'a vu précédemment, car c'était un fermier de cette famille qui louait les terres de Montanglaust qui lui avaient été attribuées comme titre ecclésiatique en 1745. Ce sont aussi des Liénard qui prirent à bail les terres d'Aulnoy, bénéfice attaché à sa fonction de chapelain de Sainte Marie-Madeleine au vieux château. Le nom de jeune fille de la veuve Cercot lui a peut-être remémoré cette chapelle et le petit prestige qu'il pouvait en tirer. Le titre ecclésiastique du séminariste Huvier, 6° page du dossier
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"Le dixième jour de décembre
1758 a été inhumé par nous curé de Sancy soussigné
le corps de Mr Jean Baptiste Huerne curé de Cerneux, et prieur d'Aubigny
âgé de 72 ans ou environ, décédé d'hier
en sa maison presbitériale, dans l'église de cette paroisse,
en assistance de Pierre François de Bure cordelier desservant, et
en présence de Mathieu Loüis Huerne de Moulinot capitaine de
cavalerie et chevalier de St Loüis, Mr Jean Claude Huerne substitut
du procureur général de la cour de aides au grenier à
sel de Provins, de Melle Marie Huerne, soeurs et neveux, et de plusieurs
autres parens et amis qui ne signent." Registre
de Cerneux 5 Mi 7772 |
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Péche véniel que de se montrer sous
son meilleur jour, même si les attributs que l'on s'octroie n'ont
pas grande valeur : n'importe quel paysan
de la Chapelle Rablais n'aurait pas compris pour quelle raison on se glorifierait
d'être "ancien curé de la
Chapelle Arablay près Nangis",
simple petite paroisse entre la forêt et la plaine de Brie; et un
clerc connaissant Coulommiers n'aurait pas trouvé grande gloire à
un "chapelain titulaire de la chapelle
Notre Dame Sainte Marie Madeleine du Vieux Château de Coulommiers
en Brie" qu'il aurait pu traduire par
"chapelle détruite dans un pensionnat
de jeunes filles dont le bénéfice permet tout juste de se
payer une soutane et demie par an".
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A partir de 1770, il avait alors
quarante six ans, il lui prit la fantaisie de compléter son état
de chapelain par une autre mention, sa présentation put atteindre jusqu'à
neuf lignes, comme dans l'arpentage ci-dessous.
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Le duc de Chevreuse faisait partie de la très
puissante famille de Luynes, "M.
le duc de Chevreuse étoit neveu de son Eminence M. le cardinal
de Luynes, archevêque de ce diocèse" Marie-Charles-Louis d’Albert cinquième duc de Luynes 1717/1771 était "duc titulaire de Montfort, puis de Chevreuse, comte de Montfort, puis duc de Luynes et pair de France, prince de Neuchâtel, marquis de Saissac et de Dangeau, comte de Tours, de Noyers et de Dunois" Wikipédia Il hérita aussi de la châtellenie-pairie de Coulommiers qui était loin d'être son fief le plus important, puisqu'il n'est même pas mentionnée dans ses biographies les plus courantes. D'ailleurs, il n'y avait plus de château, l'ancien ayant été vendu aux Religieuses et le nouveau ayant été détruit suivant sa volonté. Ses propriétés se trouvaient en Indre et Loire où il était propriétaire du château de Saint Mars la Pile qu'il échangea contre celui de Bourdaisière à Montlouis sur Loire. |
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Il possédait à Paris un grand hôtel particulier, détruit pour percer les boulevards Saint-Germain et Raspail, qui se situait dans l'actuelle rue de Luynes. Le décor de l'escalier peint par Paolo Antonio Brunetti se trouve aujourd'hui au musée Carnavalet (ci-dessous), les boiseries de la chambre de parade sont au Louvre. On imagine sans peine le faste des demeures de Marie-Charles-Louis d’Albert cinquième duc de Luynes, la richesse et la puissance dudit duc de Chevreuse.
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Aumônier du duc de Chevreuse..."Quand
un prêtre a une charge particulière autre qu'une paroisse,
c'est un aumônier". Ce titre
recouvre de nombreuses fonctions : distributeur des aumônes d'un
roi, ecclésiastique dans un collège, un hôpital, une
prison, aumônier militaire...
Le duc de Chevreuse fut colonel général des dragons, participant à la guerre de succession de Pologne 1733/1738, puis à celle de succession d'Autriche 1740/1748, à la guerre de sept ans 1753/1763. Bien sûr, le curé Huvier ne l'accompagnait pas, puisque l'on suit sa carrière ecclésiatique sans aucune interruption. |
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Autre fonction d'un aumônier : "L'évêque doit constituer sa "maison" qui, outre une domesticité nombreuse, comprend au minimum trois ecclésiastiques : son secrétaire, son confesseur et son aumônier. Le rôle de ce dernier est fort important, car c'est de lui que beaucoup d'évêques entendent la messe, en leur chapelle privée, durant la semaine. Ils ne célébraient eux-mêmes que les dimanches et jours de fêtes." Bernard Plongeron : La vie quotidienne du clergé français au XVIII° siècle C'est probablement à ce rôle d'aumônier, ici synonyme de chapelain, que fait allusion le curé : si le duc de Chevreuse l'avait désiré, Etienne Fare Charles Huvier aurait été tout désigné pour lui faire entendre une messe dans la chapelle Sainte Marie Madeleine du Vieux Château de Coulommiers, oubliant que le vieux château était devenu couvent, le couvent pensionnat de jeunes filles et la chapelle passablement détruite... Il aurait aussi fallu que ce petit curé de campagne
ait été en contact avec le seigneur de Coulommiers, fort occupé
ailleurs. Il semblerait ce cela n'ait pas été le cas, faut-il
s'en étonner? Pour preuve, deux mentions à la fin du registre
paroissial de 1771 et au début du suivant :
Pourquoi, pour qui le curé Huvier faisait-il état de ces titres? Ce sera le sujet d'une autre page, celle-ci terminant le petit chapitre sur les chapelles et les chapelains. Après nous être aventuré jusqu'aux dernières années du curé, revenons à sa jeunesse, au moment où il débute une carrière ecclésiastique.
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