Les voituriers par terre /29
du nomade au résident
Voici deux cents ans, l'irruption d'une cohorte de chariots tirachiens devait déchaîner autant d'enthousiasme chez les paysans d'alors que celle d'une file de grosses caravanes tractées par des camionnettes blanches s'apprêtant à squatter un stade, une friche ou un terrain vague, de nos jours.
"Ces voituriers donnent lieu à beaucoup
de plaintes par les dégâts qu'ils causent aux forêts
où ils font paître leurs chevaux, et par les délits
qu'ils commettent sur les propriétés des particuliers. Plusieurs
fois, on a proposé de défendre aux marchands de bois de s'en
servir, d'autant qu'il est difficile d'obtenir des condamnations contre
ces voituriers qui échappent à la surveillance pendant la
nuit, et qui, d'ailleurs, présentent peu de solvabilité. "
Traité général des eaux
et forêts, chasses et pêches 1825
Dans les cahiers de doléances de Châtres, La Houssaye en Brie, Liverdy en Brie, la Madeleine les Tournan, Marles en Brie, Presles en Brie, Tournan, 1789, on trouve la même citation: "Qu’il soit pourvu très-incessamment et par une ordonnance précise aux dommages que les voituriers thiérachiens commettent dans les campagnes." Ce sont des paroisses proches, et les rédacteurs des cahiers, trouvant l'idée judicieuse se sont joyeusement copié dessus, sauf menues erreurs de retranscription: ainsi, à la Madeleine où très-incessamment est devenu très-nécessairement, ce qui n'est pas trop grave, par contre, à Châtres voiturier est remplacé par roturier et là, ça ne veut plus dire grand chose. A noter que toutes ces communes ont fait référence à la loi Emptorem, très rarement citée dans d'autres cahiers "... l'acheteur d'un fonds de terre n'est pas obligé de s'en tenir au fermier auquel le vendeur a antérieurement donné la terre à bail... Vente passe louage." Cela montre qu'à l'évidence, les habitants des villages proches des forêts de Crécy et Armainvilliers étaient tous fins légistes, ou un peu copieurs! Note sur la loi Emptorem, par Ed. Meynial, Paris 1907
Ces plaintes contre les voituriers sont
reprises dans le "cahier des demandes du Tiers
Etat de la prévoté et vicomté de Paris hors les murs
contenant les pouvoirs qu’elle confie à ses députés
des Etats Généraux:
Police des campagnes, article 16: Les voituriers et
les conducteurs de bestiaux, et spécialement les étrangers appelés
Tirachiens ne pourront mettre leurs chevaux et bestiaux en pâture sur
les terres ni dans les prés et bois, à peine de forte amende..."
dans celui de la noblesse: "Les vexations
commises par ceux qui sont connus sous le nom de thiérachiens, et leurs
droits prétendus formeront un des objets de la réclamation des
députés" , dans les cahiers du bailliage de Sens,
paroisse de Foucherolles: "Qu'il soit absolument
défendu aux voituriers, connus sous le nom de tiraches (ou thiérachiens)
de laisser leurs chevaux à l'abandon pendant la nuit, causant un très
grand dommage dans les blés, avoines, et prés, et qu'ils soient
obligés de nourrir à sec", dans celui du Meix Saint
Epoing (département actuel de la Marne): "...
que les rues, ponts et chaussées de ladite paroisse et communauté
du Meix sont absolument impraticables, tant relativement à la vidange
des bois pour l'approvisionnement de Paris et autres endroits voisins dudit
Meix, notamment de la ville de Sézanne... supprimer la faculté
ou tolérance aux étrangers d'introduire leurs chevaux dans les
prés... " dans celui de Château Thierry (Aisne) :
"Art. 37. L'agriculture, qui pourvoit seule aux
premiers besoins, ne doit être négligée dans aucune de
ses parties. Elle souffre par les délits champêtres des pertes
considérables; l'exploitation des bois amène dans les campagnes
une multitude d'étrangers qui font vivre seulement leurs bestiaux aux
dépens du public... "
Page: les plaintes contre les Thiérachiens
"... les étrangers appelés Tirachiens ne pourront mettre leurs chevaux et bestiaux en pâture sur les terres ni dans les prés et bois, à peine de forte amende. Ils n’entreprendront aucuns travaux sans s’être préalablement établi un domicile fixe." Doléances du Tiers Etat de Paris hors les murs
"...une multitude d'étrangers qui font vivre seulement leurs bestiaux aux dépens du public. Pour arrêter ce désordre, il est nécessaire de rendre les adjudicataires garants de ces délits, sauf leur recours: pour quoi, de les astreindre à faire élection de domicile dans le lieu de l'exploitation et dans les endroits voisins où les demandes pourront être formées contre eux." Cahier de doléances Château Thierry
Après une longue période de va-et-vient entre la région de Momignies et la Brie, les Tirachiens choisirent d'y élire domicile. Que cela ait répondu au souhait des autochtones, tellement irrités des libertés que pouvaient se permettre ces insaisissables voituriers, établissant ainsi d'autres rapports avec les paysans du cru, et permettant aux voituriers de travailler plus tranquillement, était peut être une des raisons de leur choix, certainement pas la principale: les raisons économiques et familiales ont dû primer.
La maison qu'acheta Nicolas Joseph Pupin (avec un P), voiturier thiérachien,
alors âgé de quarante huit ans, ressemblait peut être
à l'une de celles représentées par Corot, en plus petit,
une seule pièce, une porte et une fenêtre: "Une
maison consistante en un chauffoir où il y a four et cheminée
située aux Trois Chevaux, commune de ladite Chapelle Gauthier grenier
audessus de ladite maison; à côté d’ycelle une
petite grange d’une travée et demie environ dont il y a une
étable dedans, séparée par un cloisonnage de ladite
grange couverte en paille et la maison en thuiles cour devant lesdists Bâtimens
et trois petits jardins" qu'il acquit de Denis François
Roubault & Marie Anne Antoinette Maugis, sa femme, moyennant la somme
de six cent cinquante francs en 1805. Sa maison sera renvendue 400 francs
seulement à son décès.
minutes du notaire Tartarin 1808, divers actes; AD 77 273 E 31
Du tableau de Corot, effacez les femmes car Nicolas Joseph était
célibataire, et dessinez une forêt derrière les petits
jardins, vous pouvez ajouter quelques chevaux, mais remplacez la paille
par du bois...
Bien que possesseur de pièces d'or et de reconnaissances de dettes, Nicolas Joseph vivait, en ce début de XIX° siècle comme au temps de Louis XIII. Voici l'inventaire de sa pièce unique. Petit jeu: comptez le nombre de fois que "mauvais" est cité et cherchez ce qui manque...
Plus "un vieux coffre ouvert et vuide lequel ne dépend pas de ladite succession ainsi que le reconnaît ledit Bourguignon, un bonnet de coton et trois mauvaises chemises, une paillasse de grosse toile estimés ensemble cinq francs, quatre mauvaises musettes, deux mauvais sacs, une mauvaise veste, différents bouts de cuir & corde, un petit tas de ferailles, chaînes, chaînons, un mauvais paroir et différents morceaux de bois estimés ensemble un franc" Le tas de fumier, estimé trois francs avait plus de valeur que la plupart de ses biens ménagers. Nous reviendrons plus loin sur l'attelage et le matériel de voiturier.
Même si, "sous Louis Philippe, on estime à 20 francs, 10 jours de salaire seulement, la valeur moyenne d'un mobilier d'ouvrier" Pierre Pierrard, la vie quotidienne dans le Nord , avec l'inventaire de Nicolas Joseph Pupin, on est loin du compte. Un lot comprenant la paillasse, deux sacs de grosse toile et une blouse a rapporté 3,50 francs; une crémaillère et deux chenets sont partis à 2,75 F et il a fallu ajouter un petit tas de ferraille au "coffre très mauvais" pour qu'il rapporte 2,30 francs et c'est tout pour les meubles. Par contre, la couverture de laine valait 30 francs. En relisant l'inventaire après décès du voiturier Pupin, on note comme seuls meubles le vieux coffre, quatre petites sellettes (des tabourets), de quoi consituer un châlit avec sa paillasse, une seule paillasse. Où dormait donc son domestique, Jean André Gorget, qui avait pris pension chez la Veuve Roubault après le décès de son maître? "à la veuve Roubault du Petit Vincennes, la somme de (blanc) pour avoir logé et nourri ledit Gorget domestique dudit Pupin -note marginale: et logé les chevaux du même- depuis son décès." laquelle jeune veuve épousa plus tard Louis Serein Gorget, frère de Jean André.
Dans l'inventaire de Nicolas Joseph Pupin, il manque surtout une table, ce qui semble, de nos jours, avec un lit, le mobilier minimum; mais, si on regarde des tableaux, non du XIX°, mais de deux siècles auparavant, au temps de Louis XIII, on remarque que la table n'était pas si courante qu'on l'imagine, dans les intérieurs paysans. Une nappe sur un banc ou sur un coin de coffre, et la table était mise, comme dans le tableau des frères Le Nain ci-dessus et d'autres à découvrir :
doc: absence de table dans les auberges et intérieurs paysans
Le coffre était le rangement du nomade et les voituriers eurent beaucoup de mal à s'en passer. "Marie Anne Bonny voiturière, demeurante aux Montils, commune de la Chapelle Rablais veuve de Thomas Joseph Nival avec lequel elle étoit en communauté de biens..." oublia pendant quelques années de mettre de l'ordre dans ses affaires après le décès de son époux en 1800. Son concubinage avec Philippe Badoulet, son garçon voiturier, dont elle accoucha en janvier 1803 d'un enfant mort né, fut régularisé en juin de la même année. Marie Anne et Thomas Nival ayant eu des enfants, le juge de paix du canton de Nangis demanda au notaire Hardouin de réaliser l'inventaire des biens. Meubles, chevaux et dettes actives -le marchand de bois Préau, de Montereau, lui devait 48 francs, c'était tout- s'élevait à 848 francs, chevaux et chariot de voiturier compris; le passif se montait à 568,70 francs -le marchand de bois Préau récupérait 19,70 francs pour fourniture de graisse (à essieux)- Marie Anne devait encore ses gages à son garçon voiturier et futur époux, lequel apporta une dot plus importante (600 francs) que sa patronne et future épouse ( il ne lui restait plus que 280 francs et 15 cts). Tout ceci pour dire qu'il n'étaient pas bien riches, cependant, le mobilier de la maison qu'ils ne possédaient pas encore, était plus "moderne" que celui des voituriers précédents; table, chaises, un lit pour les adultes: "une couche de bois de chesne ... de couty rempli de plumes, deux draps de grosse toille, une mauvaise couverture de laine blanche, deux oreillers avec leur taye en toille, les soupentes, lirette rideaux de serge verte" , un autre lit pour les enfants: "une mauvaise couche en bois blanc ... rempli de menue paille, deux draps de grosse toille, une couverture de laine blanche" , bien sûr, un coffre, mais aussi une maie et "un petit buffet en bois blanc ouvert et vuide prisé cinquante c. 0,50 F"
Si ses deux maris étaient migrants thiérachiens,
Marie Anne Boni était originaire de la Chapelle Rablais, cela explique-t'il
l'amélioration des conditions de vie? S'il reste encore des coffres
aisément transportables chez Marie Anne, le mobilier devient un peu
moins "mobile", mais plus pratique: une maie pour pétrir
le pain, certainement dix miches à la fois car l'inventaire note
"dix corbeilles à pain en paille,
bien que plus loin, ses dettes fassent apparaître
"au citoyen Jean Tancelin boulanger aux Montils vingt quatre francs
pour pain qu'il a fourny cy 24 F" Mère
de famille et en même temps voiturière, Marie Anne n'avait
certainement pas le temps de tout faire...
Dans son inventaire: ...
un billot de chêne, un saloir, une poelle, un poellon, une chaudière
de fonte (chaudière: marmite), deux mauvaises chaudières en
fer, une marmitte avec son couvercle"
tout le nécessaire pour cuisiner dans la cheminée "une
crémaillère, une pelle, une pincette, deux petits chenets"
et enfin, un buffet. Minutes
du notaire Hardouin 1803 AD 77 261 E 61
Le buffet ne valait pas bien cher, cinquante centimes, moins cher qu'une
poule: "Item deux paires de poulles prisées
à raison de un franc cinquante la paire",
mais il montre une évolution dans la manière d'habiter: il
est plus pratique d'ouvrir une porte et de prendre un objet sur les étagères
d'un buffet ou d'une armoire plutôt que de déballer tout le
contenu d'un coffre pour retrouver la paire de chaussettes cachée
au fond. Une étude sur le mobilier en Brie d'après les inventaires
ne révèle en 1700 qu'une seule armoire, contre 123 vers 1775,
"une commode à Nangis-en-Brie
vers 1700, dix à la fin du règne de Louis XV !"
Histoire des choses banales
Ce progrès dans l'ameublement était récent à
l'époque des Tirachiens et les plus anciens devaient rechigner à
changer leurs habitudes.
doc: contrat de mariage d'une "voiturière" et de son garçon voiturier
Plus pratiques encore, les grands tiroirs d'une commode qui permettent d'atteindre le fond du rangement. La commode, apparue à la fin du XVII° siècle, ne se diffusera qu'au XIX°, à partir de la ville. On en trouvait au moins une à la Chapelle Rablais en 1800, à la ferme des Grands Montils: "trois lits de sangles, une couchette de trois pieds, quatre traversins, quatre matelas, un sommiers de crain, une paillasse, quatre couvertures dont deux vertes et deux blanches, six chaises de paille, deux chandeliers de cuivre et deux de fer, un gril, un trépieds, une chevrette, un feu pelle et pincette, une paire de marmites de fonte, deux pelles de bois à four, un fourgon (servait à "fourgonner" le feu, appelons-ça un tisonnier) , trois seaux ferrés, un étoufoir, trois échelles, quatre paires de gros draps, douze gros torchons, quatre essuies à main, deux nappes, une commode à deux tiroirs, deux gros tabliers, un soufflet, un rouet, une lanterne, un formier et une table ronde."
Si le logis de cette ferme est doté d'une commode, meuble citadin, c'est peut être dû à son propriétaire "Jean Gabriel Marie Richard, propriétaire demeurant à Paris, section du Panthéon" qui, pour régulariser sa liaison avec "Juliette Rechault fille majeure demeurante chez le citoyen Richard " établit un contrat de mariage le 29 frimaire an IX, 20 décembre 1800; y sont détaillés les biens meubles de l'un et de l'autre: mobilier d'une maison bourgeoise à Nangis appartenant à Jean Gabriel, mobilier et trousseau de Juliette, plus les meubles, instruments agricoles, cheptel et grains de la ferme Richard située aux Montils. Richard possédait aussi la ferme disparue du Ru Guérin.
Le mobilier de Juliette Rechault comprend entre autres: "une commode à tombeau en bois de rapport à dessus de marbre garni de ses fonds et de quatre tiroirs fermant à clefs. Une table de nuit à dessus de marbre bois de noyer, six fauteuils à cabriolet et une bergère pareille garni et couvert de velours bleu et blanc, une glace de cheminée avec son parquet et tableau au dessus garnis de ses ornements dorés." L'époux multiplie les pièces de mobilier: confessionnal, secrétaire, commode et cabinet de curiosités: "une autre armoire à côté en trois parties garnie par le bas de tiroirs remplis de coquilles et par le haut de tablettes garnies d'objets d'histoire naturelle... une sphère mappemonde tant terrein que céleste, deux morceaux de tapisserie de verdure, un cabinet noir dit d'hébreu garni par le haut de tiroirs et par le bas de tablettes formant deux vantaux haut et bas à clefs." et une commode ancienne à dessus de marbre cassé, montrant que sa possession n'en était pas récente.
On est encore loin de l'intérieur de cuisine bourgeoise peint par Martin Dolling en 1815, puisque la maison Nival- Boni- Badoulet ne comportait qu'un chauffoir, pièce à tout faire où se trouvait la cheminée.
Le contrat de mariage entre un autre voiturier, Louis Dupin (avec un D) et sa seconde épouse Agathe Mitaine, estime la fortune du ménage à 900 francs, chevaux compris, dont il ne restera que 511 francs à la vente aux enchères; Agathe Mitaine terminera sa vie indigente. Dans l'inventaire après décès de Louis Dupin, on trouve une table, des bancs et des chaises, un lit pour le vieux couple et un autre pour Etienne, le fils voiturier, qui décéda quelques jours après son père: "Dans le chauffoir: au foyer , crémaillère etc 3,50 F; soufflet, marmites etc 4,90 F; plats, seau, bouteilles, pots 3,75 F; salière, pots, billot, poêlons 3,88 F ; table, deux bancs, 4 chaises 2,80 F; 2 maies, une petite table 5,18 F ; corbeilles à pain, vieux coffre 2,55 F; lit, draps, couverture, tour de lit etc 24 F; vieux coffre en chêne 2,25 F; habits dans le coffre 6,25 F; 2 chapeaux, cravate, souliers 3,50 F; autre coffre 2,15 F; 3 chemises dans le coffre 1,10 F; 2 draps, une nappe, 2 essuie mains 6,90 F. Dans un bâtiment à côté du chauffoir: couche de bois faite à la serpe sur laquelle est un lit, couverture etc 12,80 F, cuvier, vieux coffre, trois outils de fer 3 F"
En plus du vêtement qu'il emporta dans sa tombe et dont on n'a pas la description, son linge comportait, d'après son inventaire: "une très mauvaise paire de bas de laine, un bonnet de coton, trois très mauvaises belouses de grosse toile, une vieille veste de drap bleu, une belouse de toile bleue, un mouchoir de nez, un gillet sans manche de Silézie, un vieux mouchoir, une vieille culotte de panne; un habit et une veste de Silezi doublés de toile de coton; un mouchoir de soie, un mauvais mouchoir de nez, un devant de gilet de velours à rayes, une grande culotte de toile, trois mouchoirs de nez, une autre vieille culotte de toile." A la vente aux enchères, la liste s'allonge un peu: "une mauvaise paire de souliers, une autre paire de souliers, une paire de gaitre très mauvaise en cuire" sans compter quelques serpillères et torchons.
Les longues blouses bleues qui sont devenues le vêtement
traditionnel de bien des campagnes était alors connu sous le nom de
"roulières" Gérard de Nerval, parlant de matois grossistes
en haricots au marché des Innocents: "Ces
gens en blouse sont plus riches que nous, dit mon compagnon. Ce sont de faux
paysans. Sous leur roulière ou leur bourgeron, ils sont parfaitement
vêtus et laisseront demain leur blouse chez le marchand de vin pour
retourner chez eux en tilbury."
la Bohême galante, chapitre XII, 1855
Le linge de Nicolas Pupin était blanchi
par la fille Barry des Trois Chevaux; l'acte de situation indique qu'elle
s'en était occupé pendant sa maladie, de même que de son
office de garde-malade: "journées
et nuits passées auprès du défunt & blanchissage,
12,90F" Il a dû décéder
après des rechutes de maladie car il devait une belle somme, 96 francs,
à l'officier de santé Senoble, la Chapelle Gauthier: "visites,
soins et médicamens, tant pour la dernière maladie dudit défunt
que celles antérieures".
Il
est mort en laissant une -relative- petite fortune enfermée dans un
simple coffre en plus des reconnaissances de dettes (celle de mille francs
d'Edmée Tissot était manquante).
Nicolas Joseph Pupin n'était pas dans la gêne, il aurait certainement
pu vivre d'une manière plus confortable, mais en ressentait-il le besoin
? Etait-il avare puisqu'il entassait les louis d'or, ou généreux
car il prêtait de l'argent sans intérêt, personne ne le
saura. On ne saura pas non plus s'il était très heureux de son
sort ou au contraire malheureux comme les pierres; bonheur, malheur, joie,
peine... les actes d'état civil ou les minutes de notaire n'en parlent
jamais.
Sur son grill, Nicolas Joseph devait accommoder les lièvres et autres gibiers que sa connaissance de la forêt -et des gardes forestiers- lui permettait d'ajouter à son menu. Pas de trace de vin, cidre, bière ou eau de vie, le petit baril est "vuide". Le pain venait de chez l'un des deux boulangers de la Chapelle Gauthier: au boulanger Roubault pour fourniture de pain: 12F, des miches livrées par le mitron et son âne comme se souvenait un ancien du village.
voir une page du livre de comptes d'un boulanger à la Chapelle Gauthier