Chasses chez le comte Greffulhe/2
8° page du dossier sur la chasse

On chassait de famille chez les Greffulhe. Son père Charles et son oncle Henri entretinrent un équipage de chasse à courre de 1840 à 1848. Henry le remonta en 1868. Des articles relatent les exploits du"vautrait" de Bois Boudran qui entraînait les piqueurs à la poursuite de sangliers, tant en forêt de Villefermoy qu'à Fontainebleau. Comme chacun sait (sauf moi qui l'ignorais), un vautrait est une meute entraînée à la chasse au sanglier. Henry chassa aussi le cerf.

On retrouve ce charmant animal sur les boutons des tuniques de l'équipage du château de Bois Boudran, conservées au musée de la Vénerie de Senlis. A l'époque, on "donnait le bouton" signe de reconnaissance des chasseurs d'un même équipage.En 1903, le comte Greffulhe avait "donné le bouton" à Hottinguer, Denys Cochin, comte de Segonzac, vicomte de Galard & Martin du Nord. (Il s'est d'ailleurs vendu récemment un lot de cinq boutons de Bois Boudran, à Drouot pour plusieurs centaines d'euros, fouillons les boîtes à couture, un trésor s'y cache peut-être).
Correspondance avec un collaborateur du site Mémoire des Equipages.

Le vautrait de Bois Boudran comportait alors quarante chiens dont une trentaine de nouveaux: "... une remonte de vingt chiens anglais de la plus grande beauté, arrivée un peu tard; une autre de dix jeunes bâtards anglais, nés au chenil..." menés de main de maître par un piqueur issu de l'une des meilleures maisons: "... le premier veneur de son époque, monseigneur le duc de Bourbon, de la maison duquel sort le piqueur qui dirige la meute de M. Greffulhe..." La chasse et les chasseurs

La meute du père et de l'oncle fut vendue en 1848; deux décennies plus tard, Henry la reconstitua en lui adjoignant une meute pour le cerf "cinquante bâtards vendéens derrière le cerf, et autant de chiens anglais derrière le sanglier" Laure Hillerin
Les chiens bénéficiaient de toutes les attentions du comte: la première ligne téléphonique à Fontenailles reliait le château au chenil !

Doc: le vautrait de Bois Boudran

"Mouvement de l'ame excité dans la partie concupiscible, ou dans la partie irascible" définition du premier dictionnaire de l'Académie en 1694, ou plus simplement "état affectif intense et irraisonné qui domine quelqu'un... mouvement affectif très vif... inclination irrésistible et violente... penchant vif et persistant..." pour citer le Larousse.
Henry Greffulhe avait la PASSION de la chasse.
"A Bois-Boudran, l'art cynégétique est élevé au rang de sacerdoce : toute la vie de la maison tourne autour de la chasse. Durant la saison, on chasse tous les jours, sauf le dimanche, jour du Seigneur... Tous les jeudis soir, selon un rite immuable, les meilleurs fusils de France, qui se sont nommés les « Fondateurs », arrivent par le train pour se livrer pendant deux jours à des hécatombes de gibier et repartir le dimanche après la messe. " Laure Hillerin: la comtesse Greffulhe

En 1843, la meute chassa "deux grands loups, vingt louveteaux et louvarts, dix sangliers, onze daims et deux cerfs; en tout quarante-cinq animaux" La chasse et les chasseurs Henry Greffulhe consacrait à sa passion beaucoup de temps et beaucoup d'argent; il pouvait se le permettre, percevant chaque année entre trois et quatre millions de francs de rente, sans toucher à son capital qui devait être vingt fois supérieur (la rente est longtemps restée à 5%).

Ci contre, l'un des panneaux de la Légende de Saint Hubert peinte par Maurice Denis en 1897 comme décor du bureau du baron Denys Cochin. Propriétaire du château de Beauvoir, non loin de Mormant, il était féru de chasse à courre en forêt de Fontainebleau; la livrée figurant sur les panneaux montre que Denys Cochin fréquentait aussi l'équipage de Bois Boudran.

Légende de St Hubert, musée Maurice Denis

"Les comtes Greffulhe sont aussi des amateurs de chasse à tir de premier ordre; leur vaste domaine, au point de vue de la conservation et de la propagation du gibier, est admirablement administré on y tue annuellement de vingt à vingt-cinq mille pièces; on y brûle pour vingt mille francs de cartouches." Le Figaro, supplément littéraire du dimanche 5 septembre 1880
En comparaison, au château des Moyeux, à la Chapelle Rablais,
"on tuait et on tue chaque année: 4.000 lapins de garenne, 1.000 faisans, 250 lièvres, 600 perdreaux, 50 chevreuils, des cerfs et des sangliers." Catalogue de vente du château 1920

Les chasses regroupaient des "gentlemen" possédant une résidence dans la région, mais domiciliés à Paris. Les Greffulhe possédaient un immense hôtel particulier rue d'Astorg, ainsi qu'une villa à Dieppe.. La Brie centrale était constellée de rendez-vous de chasse, du "chalet" des Clos, aux manoirs et autres châteaux: les Moyeux à la Chapelle Rablais, Champ Brûlé, le château des Bordes à Villeneuve, le manoir des Bouleaux... bien d'autres encore sans oublier Beauvoir, cité plus haut.
Un tableau de groupe "le Cercle de la Rue Royale" peint par James Tissot en 1868 montre une douzaine de fort-fortunés gentlemen, membres de ce prestigieux cercle. (Entre nous, ils ont l'air de ne pas être bien enthousiastes, pas un pour regarder l'autre et tous semblent bien s'ennuyer... soyez jeune et riche!)

Bois Boudran accueillait nombre d'invités prestigieux, venus pour les chasses d'Henry ou pour la compagnie d'Elisabeth. (Ces pages étant consacrées aux chasses du comte, je fais une énorme impasse sur la célèbre comtesse en vous invitant à la découvrir dans les livres d'Anne de Cossé Brissac et de Laure Hillerin. A défaut d'avoir vu ses robes au musée Galliéra, vous pouvez découvrir ses talents de peintre à Carnavalet, comme son auto- portrait ci- dessous.)

Si la famille Greffulhe n'y figure pas, on y reconnaît certains de leurs familiers: Gallifet et Du Lau, cités à la page précédente, Charles Haas... On y trouve aussi des membres des familles connues des châteaux proches de Bois Boudran: le comte Alfred de La Tour-Maubourg, petit neveu du châtelain des Moyeux; le marquis Alfred du Lau d'Allemans dont un parent fut châtelain et maire de la Chapelle Gauthier, que l'on voit chasser à Bois Boudran dans un petit film; le baron Rodolphe Hottinguer, propriétaire du château de Champ Brûlé, dans la même commune que Bois Boudran, fréquemment cité parmi les invités des chasses du comte... La bonne société parisienne se retrouvait, la saison venue, près des forêts giboyeuses dont Villefermoy faisait partie.

 

"La maison est toujours pleine d'amis, voire de pique-assiettes, comme le « vieux père Gramont » qui s'incruste tout l'hiver. Tous les jeudis soir, selon un rite immuable, les meilleurs fusils de France, qui se sont nommés les « Fondateurs », arrivent par le train pour se livrer pendant deux jours à des hécatombes de gibier et repartir le dimanche après la messe. Outre ces chasses «ordinaires», plusieurs grandes battues sont organisées chaque saison en l'honneur de personnalités, comme le maréchal de Mac-Mahon ou les princes d'Orléans... Pour les personnalités de marque, on affrète un train spécial, qui s'arrête à la gare de Grandpuits."
Laure Hillerin

La descendante d'un domestique de Bois Boudran relate que, pour la visite d'un prince russe (le grand-duc Wladimir, le grand duc Nicolas ?), toute la domesticité du château était alignée entre la gare de Grandpuits et le château, portant des flambeaux. Autre anecdote: dans le parc de Bois Boudran, le comte Greffulhe ne voulait voir aucun domestique quand il s'y promenait.

Vendredi 1° décembre 1905

Le roi de Portugal a chassé hier à Bois Boudran, chez le comte Greffuhle.
Un train spécial avait été mis à la disposition à la disposition de Sa Majesté pour le conduire à Grandpuits, avec les personnes de sa suite; il se composait d'un wagon- salon et de deux wagons de première classe. Le roi est arrivé en landau, à huit heures, à la gare de l'Est; il s'est aussitôt installé dans son wagon- salon avec le comte d'Arnoso, M. Paoli, commissaire spécial a suivi le roi dans ce déplacement. A son arrivée à Grandpuits, le comte Greffulhe attendait le souverain sur le quai. Il l'a conduit en voiture au château de Bois Boudran, où les invités ont été présentés au roi. Un déjeuner a été servi, après lequel on s'est rendu sur le terrain de la chasse.
Les fusils étaient: le roi Dom Carlos, le comte d'Arnoso, le comte Guy de la Rochefoucauld, le marquis de Mun, le comte Costa de Beauregard, le vicomte de Pâris, le comte Charles de Caraman, le comte Greffuhle. La chasse a été très animée. Le roi qui est un excellent tireur, a fait l'admiration de tous les chasseurs. Voici quel a été le tableau: Lièvres 129. lapins 8, faisans 807, perdrix 153, divers 7.
A huit heures, un dîner de dix huit couverts réunissait autour du roi: la princesse Murat, la princesse de Foix, le marquis et la marquise de Mun, le comte et la comtesse de Caraman, le comte d'Arnoso, M. Léon Bonnat, le comte Guy de la Rochefoucauld, le comte Costa de Beauregard, le vicomte d'Harcourt, le professeur Dieulafoy, le vicomte de Pâris, le comte Robert de Montesquiou, le comte et la comtesse Greffulhe.
Une soirée artistique a suivi le dîner, au cours de laquelle on a entendu Melle Lindsey, de l'Opéra, M. et Mme Silvain, de la Comédie Française, Melle Mariette Sully, MM Fursy et Jules Moy.
Un appartement avait été préparé pour le roi de Portugal, qui a couché à Bois Boudran, où il doit encore chasser aujourd'hui. Il sera de retour à Paris ce soir à sept heures.

Le Républicain du 3 décembre 1905 AD77 PZ 54/2
Légende des illustrations: passez la souris sur les photos

"On y voit le roi Alphonse XIII, assisté de deux chargeurs en uniforme, genoux en terre à ses côtés, tirant à jet continu à grande hauteur, tandis que les oiseaux morts pleuvent autour de lui... L'œil fixe, presque hagard, braqué vers le ciel, la lippe pendante sur son menton prognathe, le jeune roi tire deux coups, lance son fusil vers la main levée d'un chargeur à genoux, en attrape au vol un second, tandis que l'autre chargeur, impassible et concentré, en recharge un troisième, aussitôt lancé, attrapé, relancé, etc. Grâce à ce stupéfiant exercice de jonglerie, le tireur réussit l'exploit de tirer dix coups en quinze secondes, sans jamais détourner son regard du ciel. Un peu plus loin sur la ligne, une dizaine d'autres chasseurs en font autant - à une moindre cadence, car ils n'ont qu'un seul chargeur. Pendant les rares pauses, le roi se masse le doigt, visiblement malmené par l'usage intensif de la gâchette. Les dernières images nous montrent l'arrivée d'une foule de rabatteurs en blouse blanche, tenant dans chaque main des poignées de volatiles, puis le tableau impressionnant de centaines de cadavres à plume alignés sur le sol."
Le tableau de chasse du roi "de" Portugal alignait 1.104 pièces de gibier, principalement des faisans. Celui du roi d'Espagne, décrit dans le Républicain de Seine et Marne du 13 décembre 1913 tourna à l'hécatombe, pour citer les mots du rédacteur. La chasse avait débuté après le déjeuner; à cinq heures de l'après-midi, le roi était déjà de retour à Paris; entre temps, il avait eu le temps de se livrer à un massacre. Un film avait été tourné pour l'occasion, visionné par Laure Hillerin:

Il peut être révélateur que, sur les trente six films conservés par le CNC, tous, à l'exception de quatre, montrent des scènes de chasse; on y voit le comte Greffulhe et ses prestigieux invités: le roi d'Espagne Alphonse XIII, le Marquis Marie-Joseph Charles des Acres de l'Aigle, la Duchesse de Noailles et celle de Luynes, la Grande-Duchesse Wladimir, le Grand-Duc Nicolas, le Baron Hottinguer, le Duc de la Force, le Duc de Luynes, le Marquis du Lau et le Comte Charles-Albert Costa de Beauregard, le roi du Portugal, le vicomte de Galard et le duc de Doudeauville... Trois autres films montrent des scènes féminines au balcon de l'hôtel rue d'Astorg; le dernier montre le cortège nuptial descendant les marches de l'église de la Madeleine, au mariage d'Elaine Greffulhe, fille d'Henry et d'Elisabeth, avec Armand de Guiche, duc de Gramont; rendu public récemment, on y verrait brièvement Marcel Proust.

Lien vers le film du mariage, en regrettant que les films de chasse ne soient pas en ligne

Marcel Proust qui s'inspira d'Henry pour le duc de Guermantes (et d'Elisabeth pour la duchesse) l'analyse ainsi:
"À côté d'elle M. de Guermantes, superbe et olympien, était lourdement assis. On aurait dit que la notion omniprésente en tous ses membres de ses grandes richesses lui donnait une densité particulièrement élevée, comme si elles avaient été fondues au creuset en un seul lingot humain, pour faire cet homme qui valait si cher. Au moment où je lui dis au revoir, il se leva poliment de son siège et je sentis la masse inerte de trente millions que la vieille éducation française faisait mouvoir, soulevait, et qui se tenait debout devant moi. Il me semblait voir cette statue de Jupiter Olympien que Phidias, dit-on, avait fondue tout en or. Telle était la puissance que la bonne éducation avait sur M. de Guermantes, sur le corps de M. de Guermantes du moins, car elle ne régnait pas aussi en maîtresse sur l'esprit du duc."

Marcel Proust le côté de Guermantes II

On ne peut pas reprocher à un millionnaire de combler les désirs de ses invités. La sexualité d'un bouillant petit taureau ne devrait pas entrer en ligne de compte dans un chapitre traitant de la chasse -bien que virilité et arme à feu soient étroitement liés- si ce comportement bouillonnant n'avait eu des répercutions sur les habitants des villages proches. Et la gestion du gibier par "la Maison" pesait sur la vie quotidienne des petites gens, ce que nous verrons à la page suivante.

On y tirait le gibier, et parfois le chasseur... On verra plus loin que "Plonplon", neveu de l'Empereur, plon-plombait à tout va, ce qui lui valut d'être exilé à Villefermoy en 1865, il devenait trop dangereux dans les bois de Meudon.
Chez le comte Greffulhe: le Républicain du 11 janvier 1885: "M. le comte de Gramont d'Aster, en chassant, il y a quelques jours, à Bois Boudran, dans la superbe propriété de M. le comte Greffulhe, a reçu des grains de plomb dans l'oeil..."
Le 16 janvier:"M. le comte de Gramont d'Aster a succombé, hier matin, aux suites de l'accident de chasse que nous avons mentionné... C'est un simple grain de plomb qui l'a tué, et comble de fatalité, un grain de plomb qui avait fait ricochet sur une roche... M. le comte de Gramont a été le premier à rire de ce qu'il considérait comme une mésaventure sans conséquence... Deux incisions successives n'ont pas réussi à effectuer l'extraction. Puis, le grain de plomb est sorti de lui-même. Tout le monde croyait le malade sauvé lorsqu'un érésypèle s'est déclaré."
Il s'agit d'Antoine Eugène Amable Stanislas Agénor, comte de Gramont d'Aster, sans lien direct avec Armand de Guiche duc de Gramont, mari d'Elaine Greffulhe.

La chasse occupait les pensées d'Henry Greffulhe, tout autant que ses conquêtes féminines, dont il ne se cachait pas, Elisabeth les qualifiait de "sacrifice au dieu inconnu". Il alla même jusqu'à installer Marie Thérèse de la Béraudière au manoir de la Grande Commune, de l'autre côté de la forêt de Villefermoy; pendant qu'Elisabeth aimait à se réfugier aux Bouleaux, sur la route de la Chapelle Gauthier, pour fuir la lourde ambiance du château.
La pétulante comtesse Greffulhe n'était pas l'objet de toutes les attentions de son époux; il lui arrivait même de ne pas se comporter en parfait gentleman. Cocteau rapporte que, si Elisabeth et sa soeur n'arrivaient pas à l'heure exacte au déjeuner, il criait aux domestiques :
"Ne servez rien à ces salopes! Qu'elles crèvent !" La grande classe ! Il faut dire qu'Henry avait eu une enfance pourrie-gâtée, ce qu'il reconnaît lui même: "Doué d'un besoin d'activité prodigieux, d'une exubérance peu commune, j'avais en quelque sorte des besoins de circulation irrésistibles. Je ne connaissais pas la fatigue et ne tenais pas en place et, il faut bien le dire, pour mon excuse, je ne fus jamais détourné de mes vagabondages par la plus légère observation. Tout ce que je faisais était bien, tout ce que je disais était parfait et jamais enfant gâté ne fut plus adulé, flatté, je dirais même poussé à s'amuser."

"Je parlais un jour de M. Greffulhe avec une excellente et très vieille femme de Fontenailles. Or voici comment me le définit cette brave personne qui sait à peine lire: "Le comte a toujours été un enfant gâté qui n'a jamais fait qu'à sa volonté. Il n'a pour règle que sa passion et ses caprices. Il a la passion de la chasse et, pour la satisfaire, il ne reculerait devant rien. Il est prompt, emporté, impétueux." Et l'on me cita des faits... Je préfère ne point les rapporter." Le Briard, 11 novembre 1892

"Je crois que nous ne pourrons rien faire de grand rue d'Astorg. Il faut donc le faire à la campagne, c'est plus aimable comme hospitalité et plus chic d'avoir son Chantilly.." Une nouvelle aile de Bois Boudran avait été construite par l'architecte Sanson. "Tout en or, balustrades, pilastres, galeries, loges, tribune pour les musiciens, festons et astragales, girandoles, lustres de cristal..." La splendeur ne dura qu'un temps. L'aile droite a été détruite vers 1960, ses boiseries ornent un hôtel à Houston, USA; le carrelage et l'escalier ont été reposés aux Moyeux, à la Chapelle Rablais.
Passez la souris sur la photo : Bois-Boudran/les Moyeux

Le territoire de chasse du comte s'étendait sur plus de 6.700 hectares, tant sur ses terres propres que celles où il pouvait chasser à courre comme Villefermoy.
Et quand il ne chassait pas, il lui arrivait d'inviter d'autres équipages: "celui du marquis de l'Aigle, (Robert des Acres de l'Aigle) beau frère du châtelain qu'il a invité à venir de Franc Port (Oise), en déplacement prendre huit cerfs" entre le 15 février et le 15 mars 1903, Le Républicain du 1° février 1903 AD77 PZ 54/7
Faisant partie d'une série de cartes postales anciennes sur les chasses de Bois Boudran, cette meute n'est pas celle du comte, mais appartient au marquis de l'Aigle.

"Mémoire des équipages" : Bois Boudran

Le père Gérôme, si véhément à l'encontre de son mari rend hommage aux qualités de son épouse, au travers du témoignage de paysans de Fontenailles.
"Et que pense-t'on de la comtesse? demandai-je
-La comtesse, elle est plus "homme" qu'eux tous." Voici ce qui me fut répondu avec un véritable accent de conviction.
Traduction libre: la comtesse, c'est quelqu'un! Telle est donc l'expression du populaire à l'endroit de madame Greffulhe: Elle est plus homme qu'eux tous...
Il m'a plu de montrer en Mme Greffulhe l'instigatrice d'une mesure de pitié. Elle n'est pas seulement "plus homme qu'eux", il paraît qu'elle est aussi très femme c'est à dire bonne, sensible aux choses injustes, pitoyable aux humbles...

Le Briard, 11 novembre 1892

"Je connais un domaine où l'on tue, chaque année, plus de 25,000 pièces; je pourrais en citer pas mal d'autres sur lesquels on en abat de 2,000 à 5,000 tous les ans. Je me hâte de dire que ces chasses sont situées sur un rayon de trente lieues autour de Paris; que ce n'est pas la grande multiplication du gibier que nous blâmons, ce serait absurde, mais le mode de chasse employé pour le tuer. En effet, pour avoir, à la fin de l'année, de pareils chiffres à inscrire dans le journal de ses chasses, il n'y avait guère d'autre moyen que la chasse en battue. Or la chasse en battue a été la cause de la mort de la chasse au chien d'arrêt, la seule digne, la seule que nos pères estimaient et pratiquaient."
De La Rüe, Les chasses du second empire, 1882
L'inspecteur De la Rüe, qui gérait des forêts de la Couronne, dont Villefermoy (chasse attribuée au neveu de Napoléon III, voir plus loin), donne des techniques pour regrouper tant de gibier, et l'orienter vers l'hôte de marque, l'Empereur: "La proportion du nombre de pièces abattues, en raison directe du rang et de la qualité du tireur. Avec un peu de connaissance pratique de la manière dont les chasses sont ordonnées dans les tirés, rien n'est pourtant plus facile à expliquer. Lorsqu'un tiré est dans un parc clos de murs et de pâlis, il est fort simple, au moyen de panneautages et d'une abondante nourriture, d'y mettre autant de gibier qu'on en veut faire tuer. Mais lorsque le tiré est ouvert, en pleine forêt ... il faut avoir recours à d'autres moyens ... On sait que le gibier a pour habitude d'aller chercher sa nourriture aux gagnages pendant la nuit. A la fin du jour, chevreuils, lièvres et lapins se mettent donc en mouvement, et vont trouver sur le tiré et sur la plaine le grain, les pommes de terre, les marrons d'Inde, le marc de raisin, etc. qui y ont été déposés pour leur nourriture. Il devient alors très facile de retenir tout le gibier ainsi attiré. Vers une heure du matin, les gardes tendent des toiles tout le long du tiré, entre l'enceinte de ce tiré et la forêt, et lorsque les premières lueurs du jour viennent avertir les animaux qu'il est temps de quitter le gagnage, ils se trouvent enfermés. On double ainsi à peu près la quantité de gibier qui se serait trouvé sur le tiré.
A la même époque, l'Inspecteur forestier De La Rüe fit le compte des pièces de gibier tuées sur l'ensemble des forêts domaniales: "Je choisis l'année durant laquelle il a été tué le plus de gibier dans toutes les forêts de la couronne; ce relevé est pris sur les bulletins de tir que j'ai sous les yeux, mes chiffres sont donc officiels: chevreuils, 312; lièvres, 321; lapins, 9,803; faisans 3,004; perdrix, 278; bécasses, 20; diverses, 40. Total, 13,773 pièces. En ajoutant à ce chiffre 6,227 pièces tuées en dehors des chasses officielles, nous avons 20,000 en chiffre rond." C'était autant que pour la seule chasse de Bois Boudran. Il n'était d'ailleurs pas tendre pour ces tableaux de chasse de viandards:
La raison de cette concentration sur un même point est donc bien naturelle. Il n'y a pas lieu de s'étonner davantage s'il est tué plus de gibier sur le layon du milieu, ou layon de l'Empereur, que sur les autres. C'est sur ce layon qu'est placée la nourriture, que se fait l'agrainage de chaque jour, c'est naturellement aux environs que le gibier se tient d'habitude. Maintenant, si l'on veut accorder à celui qui occupe ce layon une dizaine de fusils toujours prêts et une certaine habileté à s'en servir, on comprendra qu'on y tue beaucoup de gibier." De La Rüe, Les chasses du second empire, 1882